Darbelet en argent

Le rêve de Benjamin Darbelet a duré 1 min 08 sec dimanche, sur le tatami du hall de l'Universtité des Sciences et des Techniques de Pékin. Bien entré dans le combat, occupé à poser sa garde dans les premiers instants, l'outsider Français, devenu au fil des tours un véritable challenger, s'est fait piéger sur une liaison au sol dont a profité son adversaire, Masato Uchishiba, qui l'a neutralisé sur une clé de bras. Le ippon proclamé, le Japonais de 30 ans s'est relevé en double champion olympique en titre des - 66 kg... Et le Francilien plus péniblement -cervicales douloureuses- mais avec la satisfaction d'avoir dépassé les attentes et donné au judo bleu sa première médaille.

"J'étais bien, pas fatigué", a-t-il expliqué, avant de passer aux circonstances de sa défaite. "J'ai planté la tête dans le sol. Ça a craqué. Il m'a fait une clé de bras. J'avais mal au cou, je voyais un peu des étoiles. J'ai eu peur. J'ai tapé", a-t-il ajouté, précisant qu'il vivait sa médaille comme "un aboutissement".

"Cette bagarre a été très rapide", a commenté Uchishiba. "Je ne sais pas comment dire... Je me suis déplacé naturellement et je me suis retrouvé en dans une position gagnante. Je savais qu'après Athènes (2004) je vivrai une période difficile. Je ne gagnais plus tellement et je n'étais pas sûr d'avoir ma place dans la sélection nationale. Par chance, j'ai fait ce qu'il fallait pour être aux Jeux".

Champion d'Europe en 2003 et assidu au podium continental cinq ans de suite mais écarté du dernier tournoi continental, Benjamin Darbelet, 27 ans, aura tout au long de la journée tiré un parfait parti de son rôle d'expérimenté en quête de reconnaissance. Le Français, sélectionné de dernière heure, a réalisé un sans faute lors de ses trois premiers tours en matinée, jaugeant soigneusement ses adversaires avant de portant le coup fatal.

Le licencié de Levallois-Perret s'est mis dans le rythme contre Rachid Rguig, un grand Marocain, qualifié aux Jeux sur la foi d'un podium aux Championnats d'Afrique. Gêné par l'amplitude du longiligne Maghrébin, le Tricolore a abrégé le combat sur une clé de bras classique à 1 min 46 sec de la fin. La suite a été plus rugueuse contre Sasha Mehmedovic, un Canadien de son gabarit qui se déséquilibra finalement à 35 sec de la fin. Puis le Russe Adim Gadanov s'est dressé face à lui au 3e tour. Attentiste, Darbelet a écopé d'un avertissement (shido) et d'un autre bien plus sévère mais sans frais puisque le ippon n'a pas été retenu contre lui suite à un uchi mata porté hors des limites du tapis. En difficulté, Benjamin Darbelet a sorti son spécial, o uchi gari, à 1 min 12 sec de la fin du combat (yuko). Temporisant trop, il a reçu une seconde moulinette (chui) qui a rétabli l'égalité au tableau des scores. Acculé, le natif de Dijon a finalement emporté la décision à 17 sec du gong, sur un nouveau crochet, un o uchi gari rageur qui lui a valu un ippon.

Après la pause de mi-journée, il s'était ouvert la porte de la finale aux dépens du statique Nord-Coréen Pak, 9e des derniers Mondiaux. Après un avertissement de chaque côté (shido), Darbelet a pris la direction des opérations, étouffant l'Asiatique à mi-combat, d'abord sur une tentative d'immobilisation proche d'être chronométrée, et plus concrètement sur un beau contre compté waza ari. Volontaire, le Levaloisien a rajouté un waza ari automatiquement transformé en ippon à 38 sec du terme du décompte. Ce fût donc plutôt frais et dispo qu'il aborda cette lutte finale qui lui laissera un regret définitif.

Chez les dames, Audrey La Rizza concourrait aussi avec l'étiquette d'outsider. La Grenobloise de 27 ans a défendu ses chances avec moins de bonheur, subissant la loi de la Belge Ilse Heylen (koka) au golden score après un combat sans relief. Cette dernière ne se qualifiant pas pour la finale de tableau, l'aventure s'est achevé là pour La Rizza.