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Il était une fois les Jeux

Eurosport
ParEurosport

Publié 21/02/2010 à 11:20 GMT+1

Chaque jour, revivez une grande page de l'histoire des Jeux Olympiques d'hiver. Dimanche, retour sur l'incroyable chute d'Hermann Maier à Nagano lors de la descente. Elle n'a pas empêché l'Autrichien de conquérir deux médailles d'or par la suite.

1998 JO Nagano Hermann Maier chute

Crédit: Eurosport

. ET HERMANN DEVINT HERMINATOR
Pardon, Hermann. Pardon, car l'Autrichien n'aime pas que l'on mette en avant sa chute de Nagano. Et le mot est faible. Les journalistes qui ont eu le malheur, ces 12 dernières années, d'aborder ce sujet en sa présence, s'en souviennent, même si, avec le temps, le natif de Flachau se veut un peu moins agressif sur la question. Voilà quelques années, un reporter américain vint jusqu'en Autriche pour rencontrer Maier. "Je suppose que vous voulez tout savoir sur ma chute, lui lança Hermann. En général, c'est pour cela que les médias américains s'intéressent à moi. Seule la violence vous intéresse dans votre pays. Quand je me suis crashé, il y avait un photographe américain. Il ne m'a pas demandé si j'allais bien. Il a juste dit 'Hey, super photo".
Aussi cruelle soit-elle, la vérité est là: oui, la photo était super. Et elle a fait le tour du monde en 80 secondes, pour se figer définitivement dans la conscience collective de l'olympisme. A l'image de la photo située en haut de cet article, la cascade de Maier a été scrutée image par image. Chacun a cherché à comprendre, à déceler l'instant où l'athlète autrichien a commis l'irréparable. Elle est au ski alpin ce que le film de Zapruder est à l'assassinat de Kennedy: un témoignage exceptionnel, privilégié, résumant à lui seul la dangerosité de ce sport, tout particulièrement de la descente.
50 mètres plus loin...
Revenons sur les faits. Vendredi 13 (un signe?) février 1998. Archi-dominateur en Coupe du monde, Hermann Maier est le grandissime favori de la descente olympique, sur la piste d'Hakuba. Mais le contexte est particulier. La course n'a cessé d'être reportée depuis une semaine. Trop de neige. Pas assez. Trop de brouillard. Du vent. De la pluie... et même un tremblement de terre. Rien de méchant pour les autochtones. Pas de dégât. Juste, peut-être, dans la concentration des skieurs. Malgré tout, Maier semble promis au sacre. Il s'élance avec le dossard 8, quelques minutes après Jean-Luc Crétier, qui vient d'établir le meilleur temps. On l'ignore encore, mais personne n'ira plus vite que le Français.
Une vingtaine de secondes après avoir quitté le portillon de départ, l'Autrichien perd le contact avec la terre ferme. Il s'est envolé sur une bosse. Ce que l'on appellera plus tard "la porte de l'enfer" n'avait pourtant pas impressionné Maier lors des entraînements. Ironie: il l'avait même jugée trop plate. Trop facile. Soudain, le meilleur skieur de la planète ne maîtrise plus rien. Son temps de suspension, interminable, fait froid dans le dos. Il retombe plusieurs secondes plus tard et cinquante mètres plus loin. Lorsque Maier atterrit, rebondissant sur la tête puis les épaules, il n'est même plus sur la piste. Les barrières de sécurité sont derrière lui.
Au-delà de la limite
On le croit d'abord mort. Mais il bouge. Puis grièvement blessé. Le voilà qui se relève. Puis on l'imagine trop choqué pour poursuivre l'aventure olympique. Pourtant, deux jours plus tard, seulement deux jours plus tard, il décide de s'aligner au départ du Super G. Mieux, il s'impose. Le 19 février, Maier récidive lors du géant, dominant les deux manches. Sidérant. Hermann est devenu Herminator. Plus qu'un skieur, davantage qu'un champion, fut-il olympique. Un phénomène, défiant les limites de la physique. "Je ne me sens bien que lorsque je suis à la limite. Aujourd'hui, je l'ai dépassée", explique l'intéressé au sujet de son crash.
La presse parle évidemment de miracle. Le kiné de l'équipe autrichienne a une autre explication. Selon lui, "la musculature exceptionnelle" de l'ancien maçon, lui a permis de s'en tirer. Maier n'a pas fait une chute. Il a fait LA chute. La "Sturtz", comme disent les Autrichiens. "Franchement, je préfèrerai être célèbre pour mes deux médailles d'or olympiques que pour ma chute spectaculaire", râle Maier. Reste que l'un ne va pas sans l'autre. Sa chute est devenue légendaire précisément parce que ce champion à la volonté hors du commun a trouvé les ressources mentales suffisantes pour l'évacuer de son esprit et décrocher ces deux médailles d'or dans la foulée.
"La meilleure chose qui lui soit arrivée"
Mais à l'inverse, cette double couronne olympique n'aurait pas la même ampleur aujourd'hui si elle n'avait été précédée de ce dramatique incident, qui a finalement servi sa propre légende. "D'une certaine manière, c'est la meilleure chose qui lui soit arrivée, explique l'Américain John Garnsey, membre du jury à Nagano et qui fut également président du comité d'organisation des Mondiaux de Vail, en 1999. S'il avait gagné deux ou trois médailles d'or sans la chute, il serait un très grand champion autrichien parmi d'autre dans l'histoire des Jeux". Qui se souvient, d'ailleurs, que quatre ans plus tôt, l'Allemand Markus Wasmeier avait réussi exactement le même doublé à Lillehammer? Presque personne...
Au lieu d'entrer dans l'histoire, Maier a donc pénétré dans la légende. Nuance de taille. Pour expliquer son déficit de notoriété vis-à-vis de son illustre compatriote, Benni Raich a eu cette phrase pleine de lucidité il y a quelque temps: "Je ne me suis pas crashé à Nagano". Un évènement bien plus dramatique ajoutera trois ans plus tard une dimension supplémentaire à la destinée du personnage. Victime d'un accident de moto qui manquera de lui coûter une jambe, Hermann Maier sera donné perdu pour le ski, avant d'effectuer un des retours les plus invraisemblables de l'histoire du sport. Maier, le plus incroyable homme des neiges.
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