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Vidal: "J'étais programmé"

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 23/02/2012 à 08:59 GMT+1

Dix ans, jour pour jour, après son titre olympique en slalom à Salt Lake, Jean-Pierre Vidal nous a reçus longuement chez lui, à La Toussuire. Dans la première partie de son entretien, "Jipé" revient sur cette folle journée du 23 février 2002 : un jour imaginé depuis de longues années.

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Crédit: Eurosport

Ce jeudi, vous fêtez les dix ans de votre titre à Salt Lake City. Pourtant, un an avant les Jeux 2002, rien ne laissait imaginer une telle performance…
Jean-Pierre VIDAL : Cette course, c’est la cerise sur le gâteau. Il faut la resituer dans ma carrière. En 1999, je chute gravement à la Clusaz aux "France" (en descente). Mes ligaments croisés des deux genoux cèdent. Ce jour-là, je suis à deux doigts de tout arrêter. Dix mois après, je remonte sur les skis. En fin de saison 2000-2001, je deviens double champion de France (slalom, géant) à Courchevel. C’est un déclic. Je réintègre le groupe coupe du monde et tout repart. Quand on se remémore tous les tracas que j’ai eus, être champion olympique en 2002, c’est impensable effectivement. Je pense avoir eu une ascension fulgurante. En douze mois, j’ai progressé plus vite que lors de mes dix premières années sur le circuit.
Un mois avant les Jeux, vous gagnez à Kranjska Gora, en Coupe du monde. Le timing est idéal…
J.-P.V. : En début de saison, j’avais accroché un podium à Aspen. J’avais conscience d’être au niveau des meilleurs. Puis la victoire en Slovénie fait de moi un candidat à la médaille. Cette année-là, sont apparus les skis courts. Nous, on avait fait le choix tactique de skier, dès l’intersaison, avec ces skis de 155 cm. On savait qu’aux Jeux, la pente serait très raide et qu’elle privilégierait ce matériel. Dès le début de saison, j’avais prouvé que j’étais le plus rapide dans les murs. Tout cela m’a donné énormément de confiance. Ma montée en puissance était programmée. Et ce 23 février 2002, je suis en pleine possession de mes moyens. Ce slalom, c’est du bonus. Ça se joue au mental. Physiquement, j’étais frais après avoir passé une semaine au CERS de St-Raphaël avant les JO, avec Olivier Pédron, mon préparateur. La différence se faisait dans cette capacité à avoir créé de la confiance, à s’être programmé pour ce jour J. Moi, j’étais programmé pour gagner.
C’est-à-dire ?
J.-P.V. : Ce titre, c’était un rêve de gamin. Chez ma grand-mère, il y a un mur qui est rempli de photos de Jean-Noël Augert (son cousin), Jean-Pierre Augert, Jean-Claude Killy. Souvent, ma grand-mère me racontait leurs histoires. Dans ma tête, le rêve, c’était de décrocher un titre olympique.
Venons-en à cette course...
J-.P.V. : Je pars avec le dossard 3. Bode Miller s’est élancé avec le 1. Grand favori, l’Américain skie chez lui. Quelques jours avant ça, il avait fait une manche de slalom de mutant lors du Super-Combiné (2e derrière Aamodt). Pour le déstabiliser, il fallait que je frappe un grand coup dès la première manche. J’avais reconnu le tracé avec minutie. Je savais que je n’étais pas en mesure de lutter avec lui sur le haut mais qu’il était possible de faire la différence dans le mur final. Après avoir concédé cinq dixièmes sur le plat, je lâche tout dans la pente et lui en reprends sept. Pour l’anecdote, mon coach de l’époque, Stefano Dalmasso m’avait dit en bas : "Mais, t’es fou ! T’as pris trop de risques…" Je me rappelle aussi avoir vu Bode baisser la tête quand j’ai franchi la ligne. Il avait pris un coup.
Puis vient la seconde manche…
J.-P.V. : Je suis potentiellement champion olympique à mi-course. La situation n’est pas facile mais je reste dans ma bulle. Dans la cabane de départ, on avait un écran de télévision. J’ai donc pu suivre la manche : piégeuse, la piste a rapidement cassé. C’est au tour de Bode de s’élancer. Pendant mon échauffement, je le vois partir comme une bombe. Puis il disparaît. Je me dis qu’il est parti fort et qu’il va falloir envoyer du lourd. Et puis, j’entends une clameur dans le camp français…
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Crédit: Eurosport

… Et votre coach, Philippe Martin, vient vous annoncer la sortie de piste de l’Américain.
J.-P.V. : On a toujours été très proche avec Philippe. Entre les deux manches, je lui avais dit de me prévenir s’il se passait quelque chose d’important. Je préférais avoir un maximum d’infos avant de m’élancer. Là, à 30 secondes du départ, il vient me taper sur l’épaule et me dit : "Bode vient de tomber. Tu as 2"15 d’avance sur Sébastien Amiez". En quelques secondes, j’ai dû revoir complètement sa course. La course n’était pas gagnée. Mais elle était facile à réaliser. Je m’élance donc avec l’objectif de tout donner en haut et de calculer un peu plus sur le bas. Je me fais une grosse frayeur dans le premier mur. Après, c’est un combat contre soi-même jusqu’à l’arrivée. Et puis on voit son nom inscrit tout en haut du panneau. Et là c’est un grand moment. Moi, je me suis écroulé et j’ai immédiatement repensé aux galères passées. J’ai revu ma carrière en une fraction de seconde. C’était un rêve d’enfant qui se réalisait. Ce jour-là, ma vie a changé.
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