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Finale de Coupe Davis - Suède-France - 1996, un dimanche hors du temps

Laurent Vergne

Mis à jour 18/11/2014 à 13:30 GMT+1

Suite de nos rétrospectives des finales de Coupe Davis disputées par la France. Cap sur 1996. Sans atteindre le niveau tennistique de Lyon, elle vaudra par son extraordinaire dernière journée : deux matches en cinq sets, près de 10 heures de jeu, un suspense inouï et au bout, le bonheur et la délivrance.

TENNIS 1996 FRANCE SUEDE

Crédit: AFP

  • LA FICHE DE LA FINALE
France bat Suède 3-2
29 novembre - 1er décembre 1996 - Malmö - Dur indoor
Cédric Pioline (FRA) bat Stefan Edberg (SUE) 6-3, 6-4, 6-3
Thomas Enqvist (SUE) bat Arnaud Boetsch (FRA) 6-4, 6-3, 7-6
Forget/Raoux (FRA) battent Bjorkman/Kulti (SUE) 6-3, 1-6, 6-3, 6-3
Thomas Enqvist (SUE) bat Cédric Pioline (FRA) 3-6, 6-7, 6-4, 6-4, 9-7
Arnaud Boetsch (FRA) bat Nicklas Kulti (SUE) 7-6, 2-6, 4-6, 7-6, 10-8
  • LE CONTEXTE
Cinq ans après le triomphe de Lyon, l'équipe de France a considérablement changé. Henri Leconte n'est plus là et Guy Forget ne dispute plus que le double, aux côtés de Guillaume Raoux. Les deux tauliers en simple se nomment à présent Cédric Pioline et Arnaud Boetsch. Le premier, finaliste de l'US Open en 1993, est revenu à son meilleur niveau après deux saisons difficiles. Le leader, c'est lui, même si, en Coupe Davis, il a parfois du mal à se libérer. Tout le contraire de Boetsch. Loin d'obtenir les mêmes résultats que Pioline dans les tournois du Grand Chelem, le natif de Meulan est en revanche transfiguré en équipe de France. Intrinsèquement moins fort qu'en 1991, ce groupe a pour lui son homogénéité, une bonne paire de double (Forget-Raoux) et, toujours, l'aura de Yannick Noah sur le banc. Il est le chainon liant avec 1991.
L'inconnue pour la bande à Noah à l'aube de cette finale tient au fait qu'elle se déroule en Suède, alors que les Français ont joué leurs trois premiers tours à domicile. Facteur qui fut déterminant en demi-finale, contre l'Italie. Menés 2-0 après les deux simples du vendredi, ils s'étaient imposés 3-2, Boetsch dominant Gaudenzi en trois sets dans le cinquième et dernier match. Mais jouer les Suédois, chez eux, c'est une autre affaire. Les Scandinaves partent logiquement favoris. Thomas Enqvist, membre du Top 10, vient de s'imposer à Bercy. S'il gagne ses deux simples, l'affaire sera compliquée pour les Français. Il est secondé par Stefan Edberg. A 30 ans, le plus grand volleyeur de ces 20 dernières années va prendre sa retraite. Mais il est tout de même quatorzième mondial. Les deux Suédois sont donc mieux classés que les deux Français. Mais en Coupe Davis, on le sait, cela ne veut pas toujours dire grand-chose.
picture

Noah dans les bras de Forget - Coupe Davis 1996

Crédit: AFP

  • LE DEROULEMENT DE LA FINALE
Si cette finale est restée dans les mémoires, c'est pour son troisième et dernier jour. Peut-être le plus incroyable dimanche de l'histoire de la Coupe Davis. Passons rapidement sur les deux premiers jours pour en venir à cet inoubliable 1er décembre. Pioline a battu en trois sets un Edberg diminué physiquement et Enqvist a répliqué de la même façon en corrigeant Boetsch. La victoire de la paire Forget-Raoux en double contre Bjorkman et Kulti permet aux Français d'aborder la dernière journée en position de force.
La suite, ce sera dix sets et 9h13 de pur bonheur. Deux matches à couper le souffle, au cours desquels les deux équipes effleureront la victoire avant de la voir s'éloigner. C'est d'abord Cédric Pioline qui a l'occasion d'offrir le titre à la France. Le Parisien livre un match exceptionnel. Il remporte les deux premiers sets, perd les deux suivants non sans avoir lutté, comme dans le quatrième set, où, mené 4-0, il revient à 4-4 avant de céder 6-4. Dans la dernière manche, il prend le large (5-2). Mais comme souvent à cette époque, Pioline coince au moment de conclure. Enqvist débreake et s'impose finalement 9-7. Tout est à refaire.
On croit avoir eu assez d'émotions, mais ce n'est rien à côté de ce que Kulti et Boetsch vont offrir. Kulti a suppléé Edberg, blessé. Transcendé par son public, il sort un très grand match. "Kulti sortait des coups gagnants incroyables. C’était une rencontre de fous, se souvient Patrice Hagelauer. Ce match a été épique car les deux joueurs étaient perclus de crampes, surtout Arnaud qui jouait sur une jambe." Mené deux sets à un, Boetsch ne va jamais céder. A 4-4 dans le quatrième set, il sauve une balle de break en forme de balle de match, avant de s'imposer au jeu décisif (7-5).
Pour la première fois, la Coupe Davis va se jouer au cinquième set du cinquième match. Il sera inoubliable. Les deux joueurs sont physiquement à la limite de la rupture. Kulti fait la course en tête. A 7-6, il mène 0-40 sur le service de Boestch. Le voici avec trois balles de match. Trois balles de titre. Trois balles pour changer sa carrière. L'Alsacien va toutes les sauver pour recoller à 7-7. Deux jeux plus tard, il réussit le break. Son deuxième du match seulement. Il lui faudra trois balles de match pour mettre, enfin, un terme à cette journée de dingues. Le malheureux Kulti n'aime décidément pas les Français. Quatre ans plus tôt, Henri Leconte l'avait privé d'une demi-finale à Roland-Garros. En cinq sets, déjà, alors qu'il avait mené deux manches à rien...
  •  CE QUI A FAIT BASCULER LA RENCONTRE
D'abord, la blessure d'Edberg. On ne peut pas réécrire l'histoire, mais avec son expérience, il aurait été un tout autre client que Kulti dans un cinquième match décisif. Pour les Suédois, ce fut un vrai coup dur, indéniablement. Diminué face à Pioline le vendredi, absent le dimanche, Edberg a cruellement fait défaut. Le deuxième élément décisif est d'ordre mental. Tout s'est joué là-dessus entre Kulti et Boetsch. Malgré le soutien du public, Kulti n'a pas su conclure. Boetsch, lui, a tenu. "Ce qui m'a beaucoup aidé, a-t-il expliqué à l'époque, c'est d'avoir déjà vécu cette situation en demi-finale contre l'Italie. Dans la façon d'aborder mon match contre Kulti, et dans la manière de gérer les moments difficiles, ça a compté."
Mais au final, pour Patrice Hagelauer, cette finale ne s'est pas jouée au cours de cette invraisemblable journée hitchcockienne, mais… la veille, lors du double. Enqvist a gagné ses deux simples, les numéros deux suédois ont perdu les deux leurs. C'est donc le samedi que le Saladier d'argent a choisi son camp, même si, paradoxalement, presque tout le monde l'a oublié. "Le double a été déterminant, estime Hagel'. Car Guy Forget joue avec Guillaume Raoux alors qu’il est blessé mais tient quand même à tenir sa place."
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