Monfils a-t-il les épaules

Gaël Monfils a surpris son monde. A une dizaine de jours du premier tour de la Coupe Davis, qui se jouera sur dur indoor en République Tchèque, le Français a décidé de s'exiler à Acapulco, sur terre battue. Et loin de tout, il fait honneur à son rang. En tant que nouveau membre du Top 10, le Français a fait parler la poudre au premier tour du tournoi sud-américain face à Olivier Patience en envoyant du bois : 17 aces et 97% de réussite derrière ses premières balles. Une démonstration qui efface sa déception de la semaine passée où Paul-Henri Mathieu l'avait éliminé dès son entrée en lice malgré un jeu aux statistiques similaires. C'est donc au Mexique que Monfils, tête de série N.2, a appris qu'il était retenu pour disputer le premier tour de Coupe Davis début mars en République tchèque.

Mais s'il a le rang pour figurer comme titulaire en simple, Guy Forget le fera-t-il jouer dans cette compétition pour la première fois de sa carrière? Appelé deux fois en tant que remplaçant en 2005 (face à la Suède au 1er tour et en quart de finale face à la Russie), Monfils n'a jamais joué une seule rencontre de Coupe Davis. Et au vu du groupe homogène que le capitaine de l'équipe de France a formé, difficile de dire si le protégé de Roger Rasheed fera son entrée en lice à Ostrava le 6 mars. Mais, si Jo-Wilfried Tsonga (11e mondial) semble promis à disputer les matches de simple - voire éventuellement celui du double - Gilles Simon, 8e mondial et N.1 français actuel, et Richard Gasquet, 26e à l'ATP et le plus expérimenté des quatre, peuvent y prétendre légitimement autant que lui.

De son côté, Guy Forget joue la montre. Conscient de la force de frappe de la France, il n'a pas voulu se risquer à indiquer ses préférences une semaine avant de le faire officiellement. "J'ai retenu les quatre mieux classés" , s'est justifié Forget à l'annonce de sa sélection. " Je risque d'avoir besoin des cinq et c'est pour cette raison que je ne peux pas encore donner l'ordre aujourd'hui pour affronter Tomas Berdych et surtout Radek Stepanek." Forget espère surtout que l'esprit de groupe soudera cette "Dream Team" du 21e siècle dont les membres se côtoient depuis longtemps. "C'est une belle histoire. Représenter la France ensemble, ça va être intense et l'esprit d'équipe sera présent à 100%, s'exclame Monfils. On va beaucoup attendre de nous car on est tous dans le Top 10, mais on se connait tous très bien et on saura trouver les mots justes s'il y a de la pression."

Quel fait pourrait pousser Forget à aligner Monfils à Ostrava ? Sans doute la statistique de son face-à-face face à Radek Stepanek, 16e à l'ATP et en grande forme comme en témoignent ses titres à Brisbane et San Jose en 2009. Monfils est le seul (avec Tsonga) à avoir un ratio positif face au Tchèque. En trois rencontres, il l'a battu deux fois (à Cincinnati en 2005 et à Vienne en 2008) et a abandonné à Monte-Carlo en 2007. Gasquet s'est incliné à deux reprises en autant de confrontations (Queens 2005 et Brisbane 2009) et Simon a remporté son dernier match face à lui en Masters Cup 2008, après une défaite face au Tchèque quelques mois plus tôt à Roland-Garros.

Au-delà des adversaires, Gaël Monfils a franchi un palier en n'étant plus le joueur dilettante qu'il était auparavant. Et Roger Rasheed, son nouvel entraîneur, n'y est pas pour rien. "C'est un vrai militaire!", insistait-il en marge de l'Open d'Australie où il a abandonné en huitième de finale face à Gilles Simon. "Il m'a fait faire des trucs de dingue à l'entraînement, donc ça m'a mis bien en jambes. Mais bon, sur le coup, quand on va dormir le soir, on n'a pas franchement envie de se lever le lendemain matin ! J'ai vraiment bien travaillé. Je n'ai plus eu ces sautes de concentration ou ces coups de pompe comme lors des premiers tours." Un travail qui a payé dès le début de l'année en étant le premier joueur de l'année à faire tomber Rafael Nadal sur le circuit ATP (en quart de finale de Doha 6-4, 6-4).

Avec un staff fixe (le kiné Stéphane Falchi et le préparateur physique Patrick Chamagne) et des blessures conjuguées au passé, Monfils a trouvé un équilibre qu'il cherchait depuis plusieurs années. "Je pense qu'au niveau du tennis, j'ai vraiment besoin de quelqu'un qui me mène, qui me rentre dedans. On parle énormément. C'est quelqu'un- peut-être pas avec vous, mais avec moi- qui laisse voir ses émotions. Roger est très dur, mais me comprend très bien." Sur la terre battue d'Acapulco, Monfils veut reprendre ses marques sur cette surface sur laquelle il a joué une demi-finale à Roland-Garros l'année dernière. Un frein éventuel pour le voir évoluer à son meilleur niveau sur dur en indoor? C'est là justement où Stepanek s'est cassé les dents la dernière fois face à lui...