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"Il faut rendre le tennis plus excitant pour satisfaire le consommateur et les diffuseurs"

Laurent Vergne

Mis à jour 08/11/2017 à 15:06 GMT+1

Ancien joueur britannique, bon spécialiste du double, Ross Hutchins a stoppé sa carrière en 2014 pour devenir directeur du tournoi du Queen's, avant d'intégrer l'ATP. A 32 ans, le voici à la tête du Masters des moins de 21 ans, qui se tient à Milan cette semaine et expérimente de nouvelles règles qui pourraient à terme bouleverser l'avenir du tennis. La révolution est-elle en marche ? Entretien.

Masters Next Gen

Crédit: Eurosport

Quelle est votre première impression sur ce Masters Next Gen qui a débuté mardi ?
R.H. : Comme membre de l'ATP, comme ancien joueur et comme simple fan de tennis, je trouve très excitant ce nouveau format de tournoi avec les meilleurs jeunes du circuit. Il y a tout pour que ce tournoi soit une réussite.
Malheureusement, dans ce Masters des moins de 21 ans, le meilleur joueur de cette catégorie d'âge, Sacha Zverev, est absent...
R.H. : Bien sûr, c'est dommage qu'il ne soit pas là, dommage pour les fans qui ne le verront pas. En tout cas en compétition, car il a montré son attachement à l'épreuve en venant jouer une exhibition mardi. Mais c'est très positif qu'il soit à Londres, au Masters. Au fond, nous devons voir ça comme un succès. Nous faisons la promotion des meilleurs jeunes du circuit depuis des mois. Le fait de voir un gars de 20 ans numéro 3 mondial est une formidable nouvelle pour nous. Je ne peux pas voir ça négativement.
La grande affaire de cette semaine, ce sont les innovations, sur le fond et sur la forme, avec de nouvelles règles qui sont testées. Etait-ce le rendez-vous idéal pour le faire ?
R.H. : Oui, car cette nouvelle génération de joueurs le permet. Notre philosophie, c'est de dire : 'Pourquoi pas ? Pourquoi ne pas essayer de nouvelles choses ? Pourquoi ne pas être un peu plus créatifs ?' On cherche des petites choses et d'autres plus importantes pour y arriver.
Parmi les changements majeurs, il y a l'absence de juges de ligne, avec cette technologie qui a même supplanté le hawk-eye. Est-ce une révolution majeure ?
R.H. : C'est une vraie révolution pour notre sport, oui. Beaucoup de sports se sont déjà penchés sur la question de l'arbitrage, nous devions le faire aussi. C'est une énorme opportunité pour le tennis. Et c'est un bon équilibre entre ce que nous voulons et ce dont nous rêvons. On l'a vu mardi, la technologie fonctionne parfaitement, c'est un succès et nous y croyons beaucoup.
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Ross Hutchins, patron des Next Gen ATP Finals

Crédit: Getty Images

Concrètement, comment cela fonctionne ?
R.H. : C'est un système entièrement automatisé. Le hawk-eye permettait déjà une avancée, en montrant aux joueurs et au public la marque de façon précise. Cette technologie va plus loin. Elle fonctionne par rapport au bruit. Le son produit par la balle n'est pas le même si elle à l'intérieur ou à l'extérieur des limites du terrain. Si le système comprend que la balle est dehors, elle produit aussitôt le bruit que vous avez entendu ("out", comme si l'annonce était faite par un juge de ligne). Si elle est dans le court, le système reste silencieux et le point continue.
Les joueurs ne peuvent donc plus utiliser de challenge ?
R.H. : Non. Le hawk-eye n'est plus là que pour valider la décision, en montrant aux joueurs que la machine ne se trompe pas. Mais ils ne peuvent plus challenger.
Mais vous imaginez vraiment une finale de Wimbledon sans juges de ligne ?
R.H. : Je pense que l'on peut tout imaginer. Sincèrement, aujourd'hui, je ne sais pas. Mais qui sait ce qui s'imposera ou ne s'imposera pas comme un succès aux yeux de tous ?
Au-delà du hawk-eye ou de la règle stricte des 25 secondes, la vraie révolution concerne le format, avec le raccourcissement des jeux (pas de let et point décisif à 40 A) et des sets, etc. Tout ceci donne un autre rythme au match mais, au fond, quel est le but profond recherché ?
R.H. : Rendre le tennis plus excitant, multiplier les moments excitants et limiter les temps faibles. Nous voulons attirer une nouvelle génération, en complément de nos fans les plus fidèles. Il faut réduire l'âge moyen du fan de tennis. Nous avons effectué une étude auprès de 30 000 personnes dans le monde, des jeunes, issus de nouveaux marchés pour le tennis. Vous, moi, les fans classiques de tennis, nous savons ce que nous aimons. Mais nous avons aussi besoin de savoir ce que ces potentiels nouveaux fans aimeraient. Nous avons donc établi des questionnaires et c'est le résultat de cette consultation que nous mettons en œuvre aujourd'hui, pour la tester.
Mais ne risquez-vous pas de dénaturer le tennis, qui est aussi un sport de traditions ?
R.H. : Cette saison, nous avons eu 63 tournois de tradition. Et nous avons cinq jours où nous essayons de nouvelles choses. Mais l'esprit est toujours respecté. En passant de deux à trois sets gagnants, il faut toujours gagner le même nombre de jeux pour gagner le match. On ne change pas non plus la façon de compter les points, c'est toujours 15, 30, 40. Nous n'introduisons pas de points de bonus ou de choses comme ça. C'est un bon équilibre.
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Un juge de ligne à Wimbledon

Crédit: Getty Images

Fragile et délicat à maintenir, tout de même, non ?
R.H. : Certains pensent que le tennis doit être joué d'une certaine façon et dans leur esprit, cela ne devra jamais changer. Mais il y a peut-être une nouvelle forme de tennis à inventer, qui peut éventuellement améliorer encore notre sport. Et si c'est le cas, nous regarderons cela très attentivement. Si ça fonctionne, alors, peut-être qu'à l'avenir, certaines de ces règles, si elles sont considérées comme un succès cette semaine, seront intégrées au circuit principal.
Quand vous dîtes "à l'avenir", qu'avez-vous en tête ? Quelques mois ? Trois ans ? Dix ans ?
R.H. : Nous ne le savons pas. Nous ne sommes qu'au premier jour de ces nouvelles règles. Nous verrons comment tout ceci est reçu.
Mais pour être clair, l'an prochain, nous ne verrons aucune des règles testées ici devenir la norme sur le circuit principal ?
R.H. : Non, vous ne les verrez pas. Enfin, je ne devrais pas dire cela aussi catégoriquement. Nous avons un comité exécutif la semaine prochaine à Londres au cours duquel nous allons faire le point. Mais disons que cela parait très improbable.
Comment réagissent les joueurs, les premiers concernés ? Y a-t-il des règles qu'ils approuvent plus que d'autres ?
R.H. : Il est vraiment trop tôt pour le dire. Il n'y a eu que quelques matches et des entraînements. Mais je crois qu'ils sont assez excités par tout ça.
Vous êtes-vous fixés des limites ? Aviez-vous envisagé des idées plus radicales encore ?
R.H. : On peut toujours avoir des idées. Nous avions par exemple envisagé un tie-break en cinq points mais nous avons préféré conserver le format classique. Il y a des épreuves en tennis, qui ne sont pas organisés par l'ATP, où il y a points de bonus, où une volée vaut quatre points, etc. Mais nous pensions que c'était la limite au-delà de laquelle nous ne pouvions pas aller aujourd'hui. Il faut être crédible et trouver le moyen de satisfaire le consommateur et les diffuseurs.
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