Peter Carter, l'Australien qui a fait de Roger Federer ce qu'il est devenu
OPEN D'AUSTRALIE – Son nom ne vous dit peut-être pas grand-chose. Mais Peter Carter, qui fut des années durant l'entraîneur du jeune Roger Federer, a façonné le champion que l'on connaît aujourd'hui. Disparu prématurément en 2002, le technicien australien a profondément influencé le style, la technique et la personnalité du Suisse.
Roger Federer et Peter Carter en 1998
Crédit: Imago
6 juillet 2003. La carrière de Roger Federer prend définitivement son essor avec son sacre à Wimbledon. Son premier titre en Grand Chelem. Sur la balle de match, il tombe à genoux sur le gazon du Centre Court. Dans les larmes de Federer, il y a alors beaucoup de choses. L'émotion compréhensible d'une première. La joie de la concrétisation du talent et du travail. Mais il y a aussi une pensée particulière pour un homme, auquel le Bâlois rendra d'ailleurs hommage quelques minutes après, lui réservant ses premiers mots.
1er Août 2002. 11 mois avant son triomphe anglais, Federer tarde encore à confirmer son statut annoncé de futur crack du circuit. Il est à Toronto lorsqu'il apprend une sale nouvelle. Peter Carter, son mentor et ami, a trouvé la mort dans un accident de voiture lors d'un safari en Afrique du Sud. Carter, le coach de son enfance et de son adolescence, devenu le capitaine de l'équipe suisse de Coupe Davis, allait avoir 38 ans. Federer, lui, est à quelques jours de son 21e anniversaire. Il est du 8 août, Carter du 9. Ils avaient pris l'habitude de fêter leur anniversaire ensemble. "Je suis sous le choc et je suis effondré", réagit aussitôt Federer.
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L'hommage de l'équipe suisse de Coupe Davis à Peter Carter, en septembre 2002. A gauche, Marc Rosset et Roger Federer
Crédit: Imago
Sa maman, Lynette, expliquera plus tard que ce fut sa première confrontation avec la mort d'une personne qui lui était aussi proche. Cet évènement contribuera à lui faire relativiser chaque défaite et à changer son approche de la compétition. Pour le meilleur, sans doute. Sa mort fut d'une certaine manière la dernière et tragique d'une longue série de contributions au développement du joueur suisse. Ce dernier en a toujours convenu, même s'il ne veut évidemment pas le dire en ces termes. "Je ne peux pas dire que sa mort m'a fait du bien. Mais tennistiquement, ça m'a rendu plus fort. Il était dans mes pensées et je suis devenu plus fort mentalement à partir du moment où j'ai voulu gagner pour lui".
C'est donc à lui que Federer pense le 6 juillet 2003 à Wimbledon : "Il est une des personnes les plus importances dans ma carrière, dit alors Federer. On aurait fait une sacrée fête s'il avait été là. J'espère qu'il me voit de là où il se trouve." Ce ne sera pas son dernier hommage. Le 1er août 2004, Federer remporte le Masters 1000 de Toronto. Deux ans, jour pour jour, après la mort de son ami. C'est tout de noir vêtu qu'il bat Andy Roddick en finale. A l'issue de celle-ci, il lâche ces mots : "cette victoire est pour Peter, et seulement pour Peter."
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La victoire de Roger Federer à Toronto, en 2004, deux ans après la disparition de Peter Carter
Crédit: AFP
Roger Federer avait un peu plus de 9 ans quand il a rencontré pour la première fois Peter Carter, installé en Suisse à l'issue d'une carrière écourtée par une série de blessures. De 1991 à 1995, puis de 1997 à 1999, soit à l'aube du passage de Federer chez les pros, l'Australien va s'occuper du jeune Roger. "Il n'a pas été mon premier coach, mais il a été mon vrai coach", a expliqué le recordman des victoires en Grand Chelem il y a quelques années au quotidien The Australian.
Les fondations du jeu de Federer, tel que vous le voyez aujourd'hui, ont été posées par Peter Carter. "J'avais déjà eu des entraineurs avant lui, mais il est celui qui a eu le plus d'impact sur ma technique et sur mon style de jeu. Tactiquement, techniquement. Il a construit mon service, mon coup droit, ma volée, mon revers aussi." Cet élégant revers à une main, c'est la signature de "Carts". Rapidement, le technicien australien a eu conscience de tenir une perle. Un jour, Peter dira à son père, parlant du jeune Roger : "J'ai un gamin avec moi, qui va faire parler de lui. Il est très prometteur."
Mais Carter n'a pas façonné que le joueur. Il a aussi aidé le jeune homme à se construire, permettant à l'ado bouillonnant de s'apaiser sur le court, l'aidant à effectuer un gros travail sur lui-même pour ne pas se laisser gagner par ses frustrations. Mais bien au-delà de ça, il fut un parfait complément à ses parents en matière d'éducation. "Peter m'a inculqué les mêmes valeurs que mes parents et nous étions tous très proches, raconte Federer. Il m'a surtout appris à respecter chaque personne, à accorder la même importance à tout le monde, célébrité ou anonyme."
De son ancien mentor, Federer aime aussi dire qu'il lui a donné son "ADN australien". "Rogdeur" est suisse jusqu'au bout des ongles mais, tennistiquement et humainement, il se sent une proximité avec l'Australie. "Les Australiens sont des gens très cool, qui, d'une manière générale, ne s'en font pas trop. Peter m'a transmis ça, mais aussi cette éthique très rigoureuse dans le travail qui caractérise les Australiens. Travailler beaucoup, pour ne pas gâcher son talent." Le "bosseur cool" est devenu le plus grand champion que ce sport ait jamais connu. Peter Carter n'y est pas pour rien.
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Peter Lundgren, Mirka Vavrinec et Peter Carter en 2002, pendant l'Open d'Australie
Crédit: Eurosport
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