Un Federer record

Il a beaucoup été question de place dans l'histoire et de records ces derniers jours à Roland-Garros. Du possible Grand Chelem de Novak Djokovic à la perspective d'une septième victoire record de Rafael Nadal à Paris, les compteurs s'affolent. Roger Federer se tient un peu en marge de cette chasse à l'Histoire. En attendant, il n'a eu besoin que d'un match pour y aller lui aussi, déjà, de son petit record. Un de plus dans son impressionnante collection. Le Suisse a remporté face à Tobias Kamke le 233e match de sa carrière en Grand Chelem. Il égale ainsi Jimmy Connors, lequel avait atteint ce total à 40 ans, pas à 30. Mais Jimbo, lui, n'avait que très peu joué en Australie.

233 victoires. La première, c'était en janvier 2000, à l'Open d'Australie (ce dont Federer se souvenait) contre Michael Chang (ce qu'il avait totalement oublié). Comme souvent lorsqu'on le met face à ses statistiques, le natif de Bâle a un peu de mal à prendre la mesure. Comme si ces chiffres lui semblaient presque déraisonnables. Surtout, il n'était pas au courant. "Je n'avais pas réalisé que j'allais atteindre ce record aujourd'hui. Merci de ne pas me l'avoir dit avant, ça m'aurait mis de la pression", s'amuse-t-il, avant de reprendre plus sérieusement. "C'est un gros record, qui montre ma longévité. Jimmy est l'un des plus grands. Il a été sur le circuit pendant vingt ans. Egaler ce record à trente ans, après avoir connu tant de succès, c'est incroyable."

Soucieux du respect de ses aînés et de l'histoire de son sport, Roger Federer avoue pourtant ne pas bien connaitre Jimmy Connors. De cette génération, c'est même sans doute un des géants qu'il a le moins côtoyé. "Je n'ai jamais vraiment parlé avec lui, constate l'actuel numéro trois mondial. Pourtant, il a été coach de Roddick pendant assez longtemps, mais il était assez distant. C'était un peu bizarre parce que je m'entendais bien avec Andy. Je l'ai souvent croisé dans des interviews. Je pense qu'il me respecte beaucoup mais il est plus proche de Rafael Nadal que de moi. C'est peut-être pour ça."

Avec un record de plus dans sa poche, voilà en tout cas le Suisse bien lancé dans sa quinzaine. Il a d'ailleurs été beaucoup question de chiffres lors de sa conférence de presse. De sa 233e victoire donc. De son 50e succès à Roland-Garros, aussi, ce qui est peut-être tout aussi porteur. Federer devient en effet le premier joueur de l'histoire du tennis à remporter au moins 50 matches dans chacun des quatre tournois du rand Chelem. Personne n'avait jamais réussi un tel "quadruplé". Pour un peu, ça lui donnerait envie de philosopher. "Quand j'ai débuté, raconte-t-il, j'affrontais des joueurs que j'adorais voir jouer à la télé, comme Sampras ou Rafter. Maintenant, je joue contre des jeunes qui eux me voyaient à la télé. C'est la vie, mais c'est sympa aussi."

Il y a quand même certains records qui, heureusement, échappent encore à Federer. Il lui manque une petite semaine pour égaler celui du temps passé à la première place mondiale, détenu par Pete Sampras. Histoire de revenir à Connors, un confrère lui demande s'il pense pouvoir atteindre l'autre marque "historique" du gaucher américain: ses 109 titres en carrière. Il en manque 35 à Federer. "Ça, c'est vraiment le record absolu, sourit l'homme aux 16 couronnes en Grand Chelem. Est-ce que je peux atteindre 110 victoires? Ce serait vraiment énorme. C'est un rêve. On verra, je regarde saison par saison." A chaque jour suffit ses records...