A peine pro, déjà l'âme d'un briscard : les 4 jours, l'acte de naissance de Romain Grégoire (Groupama-FDJ)

Il ne fallait pas compter sur lui pour s'extasier. Tout juste un poing levé au cœur du peloton au passage de la ligne d'arrivée, pour le distinguer de la masse. Romain Grégoire aurait pourtant eu bien des raisons de célébrer, de s'emporter, et de jubiler. On n'a pas tous les jours 20 ans, et on ne remporte que très rarement sa première grande course aussi prématurément. Aucun ne l'avait fait aussi jeune, tout simplement, dans l'histoire des 4 jours de Dunkerque. Mais Romain Grégoire est déjà fait d'un autre bois.

Le coureur de la Groupama-FDJ ne fait pas son âge. On lui promet les sommets du cyclisme international depuis des années, lui le champion d'Europe espoirs, vainqueur de Liège-Bastogne-Liège U23. Mais même sa première victoire chez les grands n'est pas du genre à faire s'emballer le Doubiste. "Il ne s'enflamme pas du tout, il est conscient que la marche est encore grande, mais petit à petit, il va progresser et j'ai envie de dire qu'il va très vite" peut, lui, s'enthousiasmer Franck Pineau, un des directeurs sportifs de la Groupama-FDJ, à La Voix du Nord. "C'est quelqu'un de très posé, extrêmement gentil, très mature pour l'âge qu'il a. Il sait où il veut aller, il connaît son potentiel."

Pur produit de la formation de la Groupama-FDJ, Grégoire était prévu surtout pour la découverte cette saison au sein de la formation World Tour, après avoir fait ses gammes chez l'équipe "Conti". Ses 4 jours auront surtout servi à ce que ses adversaires le découvrent. Plus malin que les cadors pour remporter la 2e étape, parmi les plus costauds sur le chrono de la 3e étape pour rester à l'affût au général, et enfin plus puissant pour faire différence samedi à Cassel, le Tricolore a montré l'étendue de sa large palette. Au point de se présenter aux commandes de la dernière étape.

Ce dernier rendez-vous aurait pu être celui des premières failles, sur un parcours pas sélectif mais particulièrement piégeux. Mais après avoir montré ce qu'il avait dans les jambes, Romain Grégoire a prouvé qu'il en avait aussi beaucoup dans la tête. La Soudal – Quick-Step a tenté de jouer la bordure en première partie d'étape, sans succès. La Jumbo-Visma pouvait encore jouer un vilain tour si Olav Kooij passait en tête de tous les sprints intermédiaires avant de remporter une troisième tape dans le Nord. Grégoire a évité toutes les embûches. "J'ai bien fait de douter parce que c'était vraiment dur toute la journée avec le vent et le circuit avec toutes les relances... C'était vraiment très dur, soufflait-il à l'arrivée. Je suis soulagé et content d'en finir."

"Une fois placé devant, ça allait mais rester devant, c'était super dur, analysait-il, avec une lucidité désarmante. J'ai compté, il y avait environ 30 virages. Si vous multipliez par sept tours, ça fait plus de 200 relances donc ça fait mal aux pattes." Visiblement bon calculateur et fin tacticien, Grégoire n'en oublie pas le poids d'une formation Groupama-FDJ qui s'est donnée corps et âme pour son apprenti leader. "Les gars ont fait le maximum pour me protéger et me mettre en confiance. Je leur dois cette victoire à 100%. Hier comme aujourd’hui, leur boulot a été monstrueux et je ne peux que les remercier."

Très fier, Grégoire savoure "le sentiment du devoir accompli" comme s'il avait l'habitude et un métier que son âge ne saurait montrer. "On se rend compte que les jeunes de la nouvelle génération réussissent à avoir des résultats tout de suite, en sourit Frédéric Guesdon, aujourd'hui directeur sportif de Romain Grégoire, sur le site officiel de la Groupama-FDJ. Ils sont opérationnels dès leur passage chez les pros, mais ça n’en reste pas moins beau et impressionnant."

"Pour l’instant je vais profiter de ces premières victoires professionnelles, c’est un moment dont je vais me souvenir", se délecte tout de même un peu la révélation de la semaine. Avant de vite se projeter. "Après je me reconcentrerai sur la suite de la saison avec bien sûr les championnats de France qui seront un bel objectif." Un maillot bleu-blanc-rouge à 20 ans avant un probable début en grands tours sur la Vuelta fin août, Romain Grégoire est vraiment du genre précoce.