Gilbert-Boonen, duo en or?

A mi-chemin entre une Espagne et son armée mexicaine et les sélections qui, comme la France, misent tout sur le même cheval, la Belgique s'avance pour sa part à Valkenburg comme un aigle à deux têtes. D'un côté, le puncheur Philippe Gilbert. De l'autre, le sprinter-costaud, Tom Boonen. Deux options. Deux atouts. Deux vainqueurs potentiels. Avec ce duo, les Belges ont toutes les raisons d'y croire. "Aucun autre pays ne sera aussi fort que la Belgique. Tom comme sprinter et moi-même comme attaquant", a d'ailleurs estimé Gilbert, n'hésitant pas à annoncer la couleur.

Il est vrai qu'il aurait tort de ne pas y croire. A titre personnel, d'abord. Philippe Gilbert ne trouvera probablement pas un autre parcours aussi idéal pour lui d'ici la fin de sa carrière. S'il veut le maillot arc-en-ciel, c'est le lieu idéal, à défaut d'être le moment idoine. Avec le Cauberg au menu, juge de paix de l'Amstel Gold Race que Gilbert a épinglé par deux fois à son palmarès depuis 2010, le tracé néerlandais est parfait pour lui. Même si, bien évidemment, le Mondial n'est pas l'Amstel. La ligne d'arrivée n'est pas située au Cauberg, mais 1800 mètres plus loin. "Ce sera une autre course, prévoit Gilbert. Personne ne va tout donner dans le Cauberg afin de garder des réserves pour les deux derniers kilomètres".

Pourtant, si Gilbert veut gagner, il lui faudra probablement tout miser ou presque dans la dernière ascension. Ensuite, il ne restera que 500 mètres de faux plat avant un gros kilomètre de plat. "On sait qu’un Philippe en forme est irrésistible dans le Cauberg et peut sortir tout le monde de sa roue", juge son coéquipier, Jurgen Roelandts, dans La dernière Heure. Pour ce dernier, même si tout ne sera pas fini au Cauberg, Gilbert a les moyens d'y faire la différence pour de bon. "Je ne vois pas très bien qui serait plus rapide que lui au sprint et, en même temps, capable de le suivre dans le Cauberg. Je pense que Phil, sûr de lui, poursuivrait de toute façon son effort." Il serait donc surprenant que le Liégeois ne tente pas de tout dynamiter sur cette pente. Il n'aura probablement pas d'autre choix.

Mais l'élément déterminant, au-delà du tracé, c'est d'abord la forme de Gilbert. Jamais, en 2012, il n'a semblé aussi proche de son niveau stratosphérique de l'an passé qu'en cette fin d'été. "Je ne suis vraiment pas loin du niveau de 2011, à quelque pourcent à peine, estime l'intéressé. Ma condition est arrivée juste à temps. Mentalement, ça fait du bien. Je suis en forme, c’est vrai, mais je ne suis pas le seul. Il y a d’autres favoris." Y compris au sein de l'équipe belge. Il y en a en tout cas un autre: Tom Boonen. L'Anversois, contrairement à son compatriote, a déjà goûté au maillot arc-en-ciel, en 2005. Contrairement à Gilbert, il a déjà pleinement réussi sa saison, notamment à travers son formidable printemps et un magistral doublé Tour des Flandres/Paris-Roubaix. Il joue donc moins gros que Gilbert dimanche. Ce qui n'écarte pas une certaine ambition.

Gilbert jouera sa carte, c'est une certitude ; mais Boonen compte sur le fait que la sélection ne soit pas si importante que ça lors du dernier passage au Cauberg. "La plupart des championnats du monde ces dernières années se sont joués au sprint, rappelle-t-il. Dimanche, il peut y en avoir un avec une trentaine de coureurs." Si tel est le cas, il se verrait bien jouer la gagne. Après la victoire dans le chrono par équipes et celle de Tony Martin dans le contre-la-montre individuel, c'est peut-être la semaine des Omega Pharma... En tout cas, entre les deux stars belges, pas d'ambiguïté ni d'embrouille. "Nous devrons simplement prendre les bonnes décisions au bon moment, note Gilbert. Mais je ne vois aucun problème à une bonne collaboration. J'ai d'ailleurs regretté que Tom n’ait pas été là ces dernières années. Avec lui, on peut dire dimanche qu'aucun autre pays ne sera aussi fort que la Belgique. Tom comme sprinter et moi-même comme attaquant." Ça promet.