Tour d'Italie 2023 - Pas le meilleur Thibaut Pinot (Groupama-FDJ), mais un sacré bon cru

Il avait quitté le Tour d’Italie en larmes en 2018, malade et incapable de prendre le départ de la dernière étape, après avoir perdu le podium la veille. Cinq ans plus tard, tel un phœnix qui renaît de ses cendres, une comparaison très à propos pour un coureur que beaucoup disaient cramé et fini pour le haut niveau, Thibaut Pinot est redevenu "grand, très grand" comme le disait si bien marc Madiot le jour de sa victoire au Tourmalet sur le Tour 2019. Et pourtant, au départ de cette 106e édition du Giro, personne n’imaginait un tel Pinot

"Au début du Giro, je pensais que Pinot devait viser une ou deux étapes, nous avouait d’ailleurs Nicolas Fritsch dans sa chronique de bilan. Je le voyais essayer de remporter une ou deux étapes dans les deux premières semaines, sans trop se préoccuper du général. Avant de voir ensuite ce qu’il passera en troisième".

Un scénario qui s’est d’ailleurs assez bien vérifié, puisque l’on a vu le Français plutôt actif pendant les 15 premiers jours de course, cherchant à grappiller des points pour le maillot azzurro de meilleur grimpeur et attendant le bon moment pour se glisser dans une échappée.

Un jour qui aurait dû être à Crans-Montana, où le Français a joué la victoire avant de céder au sprint face à Einer Rubio (Movistar). "Ça restera LE regret de Pinot sur ce Giro, admet notre consultant. Ce jour-là, il pouvait gagner". Un regret, oui, mais qui ne pèse pas bien lourd à l’heure de tirer le bilan, au terme d’une incroyable troisième semaine qui donne au Tour d’Italie du Français une autre dimension.

"Il y a cette étape du Monte Bondone (16e étape), au lendemain de la journée de repos, rappelle Fritsch. Il ne se sentait pas bien (il se plaignait de nouveau du dos), il perd 3 minutes… Mais il a eu les ressources mentales de repartir au combat dès le jeudi et c’est là que tout bascule". A Val di Zoldo, malgré la défaite au sprint contre Filippo Zana, Pinot retrouve le moral.

"J’y ai toujours cru, même quand j’ai eu mes jours sans, avoue le Français. Je sais que sur le Giro, il ne faut jamais lâcher et que cela se joue sur les 2/3 dernières étapes". Et la suite lui donne raison. Les deux jours suivants, le Franc-Comtois est à la bagarre avec les favoris, finit 6e des cadors sur l’étape-reine, prend la 5e place du chrono du Lussari et remonte à la 5e place du classement général. Son meilleur résultat en Grand Tour depuis le Giro 2017 !

"Ce n’est pas un podium mais je voulais vraiment aller le chercher ce top 5, car il signifie quand même beaucoup pour moi, explique le Franc-Comtois. Physiquement, c’est peut-être le Grand Tour que je finis le mieux. Ça montre que j’en ai encore dans les jambes ! J’ai toujours cru en mes capacités, je savais que j’avais des bonnes jambes. Ce n’était pas non plus simple de jouer le maillot de meilleur grimpeur et le général. C’est donc une fierté d’avoir réussi ces deux missions". Car, en plus de sa 5e place, Pinot a réussi à décrocher le maillot azzurro de la montagne, malgré les tentatives désespérées de Ben Healy vendredi.

Un vrai exploit car ce Pinot-là, cela faisait bien longtemps qu’on ne l’avait plus vu, du moins sur le long terme. "Je ne l’avais jamais vu aussi fort depuis 2020 et sa chute à Nice sur le Tour de France, avoue Nicolas Fritsch. En tout cas sur une aussi longue période. Il avait déjà fait des coups d’éclats, mais il n’avait jamais été aussi fort sur une longue durée. On a retrouvé un Pinot très fort, certes un peu en-dessous des cracks actuels, mais il est là, en deuxième rideau. Il fait 5e du général et un VRAI 5e, puisqu’il fait 5e du chrono final qui s’est conclu avec les 5 premiers du général aux 5 premières places. Pour moi, c’était le 5e plus fort de ce Giro !".

"Au début, je ne comprenais pas pourquoi il visait un classement général, poursuit notre consultant. Je ne comprenais pas l’intérêt dans sa carrière mais je l’ai compris en cours d’épreuve. Il avait simplement envie de se prouver déjà à lui-même – et peut-être à d’autres – que Thibaut Pinot est un sacré coursier et qu’il a sa place parmi les meilleurs".

Impression confirmée par l’intéressé lui-même. "Je vais encore profiter pendant 24 heures, mais ce soir, je me sens apaisé, explique le Tricolore. Je savais que je pouvais revenir à ce niveau-là, dans le top-5 d’un Grand Tour. Pour ça, je suis fier de moi, fier de n’avoir jamais rien lâché". Et il y a de quoi.