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Julian Alaphilippe, la grandeur dans la décadence ?

Simon Farvacque

Mis à jour 24/04/2023 à 23:33 GMT+2

Remco Evenepoel a gagné Liège-Bastogne-Liège dimanche, avec Julian Alaphilippe pour équipier de luxe. Mais ce dernier n'a pas pesé sur le final. Il a seulement préparé le terrain, bien avant l'explication entre les gros bras. Une situation bizarre qui peut à la fois forcer le respect et être attristante. Alaphilippe est grand. L'est-il dans un irrémédiable déclin ou dans un simple passage à vide ?

Un dernier relais et Alaphilippe s'est écarté à 62 km de l'arrivée

C'était en un sens pathétique. Mais pas dans la définition péjorative du terme. Voir Julian Alaphilippe se "sacrifier" en antépénultième étage de la "fusée pré-décollage de Remco Evenepoel" – alors qu'il restait donc deux autres équipiers au futur et prévisible vainqueur de Liège-Bastogne-Liège 2023 – avait ceci d'émouvant qu'il ne semblait ni vraiment à sa place ni vraiment illégitime dans ce rôle.
Alaphilippe serrait les dents, à 62 bornes de l'arrivée, pour faire mal à un peloton encore assez fourni. Puis il s'est écarté, rapidement, et il s'est accroché, en queue de ce groupe d'une soixantaine d'hommes, pendant quelques instants. Quand il a laissé filer les cadors, la réalisation s'est attardée sur lui, par égard à son pedigree plus encore que par intérêt pour le dénouement de la Doyenne.
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Privé de concurrence, Evenepoel a tout écrasé : le résumé du Remco-show

Soixante kilomètres pour une introspection

Evenepoel a fini le travail avec une aisance absolue. Alaphilippe a rejoint l'arrivée un quart d'heure après son leader, coupant la ligne en 86e position. Sur la course de ses rêves. L'épreuve que l'on pensait vouée à le faire entrer au panthéon du cyclisme, quand il en avait pris la 2e place en 2015. A quoi a-t-il pu penser pendant 60 kilomètres durant lesquels ses jambes ont tourné dans l'anonymat ?
A la façon dont Patrick Lefevere le tance dès qu'un micro se pointe devant le bout de son nez, le ramenant au décalage qui existe entre ses résultats et son salaire ? A la noblesse avec laquelle il passe le flambeau des honneurs à Evenepoel, pour y trouver du réconfort ? A sa terrible chute, sur ces mêmes routes ? Aux deux titres mondiaux qu'il a décrochés et à son envie de prouver qu’il est encore "ce gars" ? A ce qu'il pouvait bien faire là ?
Je n'en sais rien. Je n'ai suivi cela que de l'extérieur. Peut-être, d'ailleurs, qu'il n'y a pas grand-chose à extrapoler d'une telle situation. Peut-être que "Loulou" traverse sans psychoter cette période creuse de sa carrière, qui serait un pinacle pour beaucoup. Depuis l'accident de l'édition 2022 du Monument liégeois, il a levé les bras deux fois : sur une étape du Tour de Wallonie et lors de la Faun-Ardèche Classic.

La grandeur… sans la décadence ?

Si le titre de cet article contient un point d'interrogation, c'est parce qu'il est bien trop tôt pour acter qu'Alaphilippe n'a plus en lui ce qui l'a rendu différent durant de nombreuses années. Ce supplément d'âme, de force dans le jarret et de conviction qui fait les champions. Il est l'heure de se poser la question de sa déchéance, certainement pas celle d'y répondre de manière péremptoire.
Parce que dimanche, Julian Alaphilippe était en reprise, trois semaines après un Tour des Flandres qu'il avait achevé loin des grands protagonistes (51e), désabusé et le corps meurtri par un énième gadin. Ce refrain d'une condition pas optimale qui le contraint à endosser un costume trop petit pour lui a de quoi lasser ses fans. Mais il traduit une réalité. Les planètes ne se sont pas alignées au-dessus de sa tête depuis un long moment.
Les astres pourraient un jour se remettre en ordre. Le puncheur qui a fait rêver l'Hexagone en jaune en 2019 n'aura que 31 ans, en juin prochain. Il serait audacieux de lui imaginer un avenir plus glorieux que son passé, mais Julian Alaphilippe n'a peut-être pas dit son dernier mot. Chez Soudal - Quick-Step – où son contrat court jusqu'à fin 2024 – ou ailleurs, c'est un autre et vaste débat. Celui de son investissement dimanche n'a même pas frémi. Rien que pour cela, bravo à lui.
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Poignée de main entre Patrick Lefevere et Julian Alaphilippe, à l'arrivée de Liège-Bastogne-Liège - 23/04/2023

Crédit: Imago

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