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Zidane s'en va seul

Eurosport
ParEurosport

Publié 10/07/2006 à 18:00 GMT+2

Pour son dernier match, Zinédine Zidane ne sera pas resté jusqu'à la fin. Victime de la provocation de Materazzi et expulsé, celui qui a tant fait pour le football méritait sans doute une plus belle sortie. Malgré son geste, les Bleus ne lui en veulent pa

Zinédine Zidane en 2006, après son expulsion en finale contre l'Italie

Crédit: Allsport

Son dernier match devait être le plus beau, celui qui devait lui permettre de rentrer dans la légende. A 34 ans, Zinédine Zidane allait raccrocher ses crampons sur une finale de Coupe du monde. Personne avant lui n'avait pu rêver d'un pareil destin. Mais Zizou, le guide que l'on a vu haranguer ses troupes au coup d'envoi ou les recadrer avant la pause lors d'une longue discussion avec Thuram et Vieira (33e), a craqué. On lui promettait le paradis, il a connu l'enfer. Non seulement il n'a pas réussi son pari de décrocher une deuxième étoile huit ans après celle de 1998 mais il a terminé l'aventure seul dans le vestiaire après un coup de sang aussi violent que surprenant sur Marco Materazzi dans les dernières minutes de la prolongation. Décidément, avec Zidane, les finales sont toujours une histoire de têtes.
Pourtant, avant cette 110e minute tragique, le maître à jouer des Bleus avait emprunté le chemin idéal pour réussir sa sortie par la grande porte après un Mondial exceptionnel, le meilleur de sa carrière et qui a d'ailleurs été récompensé lundi par le titre de meilleur joueur de la Coupe du monde. Ovationné mais le visage fermé, il était entré le premier sur la pelouse du Stade Olympique de Berlin, un lieu chargé d'histoire qui s'apprêtait à écrire une nouvelle page. La dernière Marseillaise, il la passe comme d'habitude au côté de Fabien Barthez, silencieux et impassible, avant une dernière accolade à Diamento De Faria, le magasinier de l'équipe de France, comme d'habitude. Cette fois, pas de "baiser de la mort" qui avait fait couler beaucoup d'encre après avoir frappé Raul, Ronaldo et Figo. Avant le coup d'envoi, ZZ se contente d'une poignée de main à Fabio Cannavaro.
Un coup de génie et puis...
Le maestro s'apprête à livrer ses derniers tours de passe-passe à des millions de téléspectateurs attentifs à chacun de ces gestes. Il ne leur faut pas attendre longtemps pour être servis. Pas du genre à faire le spectacle pour le spectacle, Zidane ose pourtant un geste fou sur penalty suite à faute commise sur Malouda. Une panenka qui vient se loger sous la barre de Buffon, passe la ligne et ressort (8e). Une Zidane, dira-t-on peut-être dans quelques années. Le public est médusé et des "Ohé Zinédine Zidane" descendent des tribunes. ZZ rejoint Pelé, Vava et Paul Breitner au rang des joueurs ayant marqué dans deux finales différentes et se trace une voie royale. La légende lui tend même sur les bras sur une tête à bout portant qui est repoussée par Buffon (104e). Il fallait bien le meilleur gardien du monde pour arrêter le cours de l'histoire.
Mais, après les deux victorieuses du 12 juillet 1998, c'est autre tête que l'on retiendra. Alors qu'on ne pouvait pas croire qu'il achèverait sa carrière sur une blessure lorsque Cannavaro le cloue au sol (80e). La clavicule droite endolorie, ZZ reprend sa place et se forge un destin à la Beckenbauer. Jusqu'au dérapage. "Je ne sais pas ce qu'il s'est passé, j'étais en train de sortir et de prendre place sur le banc. J'ai entendu un cri et j'ai vu Materazzi par terre. Je ne veux pas m'étendre là-dessus", raconte Thierry Henry. Les images sont cruelles pour Zidane : un coup de tête violent dans le torse du défenseur italien. Pourquoi ? On le saura un jour, peut-être. "Si vous avez vu Zizou, il y a eu quelque chose, a expliqué Gallas. On connaît Zizou. Que ce soit lui ou un autre joueur, on ne réagit pas comme ça. Il a été provoqué". Insulté laissera même entendre Lilian Thuram.
"Stupide et inutile"
Non, Zidane n'est pas un Dieu. Il est tout simplement humain. En finale, peut-être au plus mauvais moment, il a été rattrapé par ses vieux démons. Poussé à bout, il est tombé dans le panneau. Son 12e carton rouge en carrière (3 à Bordeaux, 5 avec la Juventus de Turin, 2 avec le Real Madrid et 2 avec l'équipe de France). D'un naturel réservé, il n'est pourtant pas à son premier fait d'armes. Tout le monde a gardé en mémoire son expulsion face à l'Arabie Saoudite en 1998 après s'être essuyé les crampons sur un défenseur adverse. Peu se souviennent en revanche de son crochet du droit au menton de Marcel Desailly en 1993 lors d'un Marseille-Bordeaux (3-1) alors qu'il portait les couleurs des Girondins. Finalement, Zidane aura été Zidane jusqu'au bout...
Après la rencontre, Raymond Domenech a eu des mots assez durs pour son meneur de jeu. "Zidane va nous manquer mais il nous a déjà manqué dix minutes ce soir. Cette expulsion est stupide, inutile, accusait-il. Mais c'est comme ça. (...) Il est meurtri. C'est lourd à porter et ce sera encore lourd à porter pour lui pendant longtemps car il n'aura pas l'occasion de se racheter". Mais le sélectionneur sait qu'il ne faut pas jeter la pierre à celui grâce à qui les Bleus sont arrivés jusqu'à Berlin. "Le faire finir de cette manière, c'est triste. Il a fait une grande carrière, une grande Coupe du monde. Quand on prend comme lui pendant 1h20 et que l'arbitre laisse gentiment faire, on comprend. On n'excuse pas mais on comprend", avouait tout de même le sélectionneur.
Seul au vestiaire
Ses coéquipiers, eux, ne lui en veulent pas. Au contraire. Tous se sont présentés pour prendre sa défense. "Ziz peut sortir la tête haute, a déclaré Trezeguet. L'autre (NDLR: Materazzi), même s'il gagne le Mondial, il ne peut pas. Car il n'y a pas que le football dans la vie". William Gallas est allé encore plus loin : "Quand vous avez des joueurs comme ça, vous avez envie de lui péter la gueule. C'est de la triche mais ce sont les Italiens". En quittant la scène de la sorte, l'artiste n'a-t-il pas tout de même écorné son image ? Non répond du tac-au-tac Malouda qui reconnaît tout juste du bout des lèvres que son expulsion a pu "influer sur les tirs au but". "Il a tellement donné au football français et son talent est tellement immense. C'est souvent comme ça. Les grands joueurs se font provoquer en permanence et il y a forcément des réactions, explique le Lyonnais. Mais je peux vous dire que personne ne lui en veut. Ça reste un grand monsieur du football".
Rentré au vestiaire sans jeter un coup d'oeil à la Coupe tant convoitée qu'il avait déjà soulevée en 1998 et qui se tenait devant lui, Zinédine Zidane n'est pas revenu chercher sa médaille. "Un joueur expulsé n'a pas le droit de monter sur le podium. Le règlement a changé depuis 1998", expliquera Domenech en référence à la présence de Desailly en 1998 lors de la remise du Graal. Pas sûr qu'il l'ait fait même s'il en avait eu le droit. Même Marcello Lippi, qui l'a eu sous ses ordres à la Juventus, regrettait que Zizou n'ait pas mieux soigné sa sortie. "Je suis déçu pour Zidane parce que je l'ai en en grande estime. Je le lui ai dit avant le match. J'espère qu'il n'arrêtera pas, je pense qu'il devrait y repenser. C'est dommage qu'il s'en aille là-dessus", déplorait le sélectionneur italien. Car s'il restera sans aucun doute l'un des joueurs ayant le plus marqué le football mondial, son dernier geste jette un voile terne sur la fin de son histoire. "Je dis merci à Zidane, Thuram et Makelele pour ce qu'ils ont fait. Maintenant on va essayer de se débrouiller sans eux", lui rendait hommage Sagnol. Aux Bleus en effet de vivre désormais sans lui, cette fois pour de bon.
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