Equipe de France - Prolonger Didier Deschamps, c'est logique ; le prolonger 4 ans, c'est risqué

Quatorze ans. Voilà la durée du bail de Didier Deschamps à la tête de l'équipe de France si, toutefois, il va au bout du mandat qu'il vient de renouveler. C'est gigantesque et c'est unique chez les Bleus. Mais le sélectionneur n'a rien volé à personne. S'il continue l'aventure, c'est d'abord parce qu'il a rempli les objectifs à savoir atteindre la demi-finale de la Coupe du monde 2022. Et si on est tout à fait honnête, cette prolongation récompense aussi la folle continuité de ses résultats depuis sa prise de pouvoir.

En cinq grands tournois internationaux, son bilan est exceptionnel : un 8e de finale (Euro 2021), un quart (Coupe du monde 2014), deux finales (Euro 2016 et Coupe du monde 2022) et un titre (Coupe du monde 2018). Depuis 2012, l'équipe de France est, derrière l'Argentine, la meilleure nation du monde, la plus régulière au très haut niveau. Sous les ordres de leur ancien capitaine, les Bleus n'ont connu qu'un seul gros gadin : la défaite en 8e de finale de l'Euro face à la Suisse. Au Qatar, l'équipe de France a brisé la malédiction du tenant du titre, destiné depuis 2010 à échouer en phase de poule, pour se hisser jusqu'en finale malgré des forfaits en pagaille.

Comment ne pas récompenser l'architecte de ses succès en dépit d'une finale mal maîtrisée ? Avec Didier Deschamps, les Bleus ne charment pas toujours mais ils gagnent très souvent. Oui, le bail peut paraître long, très long, mais la FFF ne peut prendre le risque de mettre en péril une telle constance au plus haut niveau même si Zinedine Zidane a des arguments et un CV gigantesque. La curiosité autour de l'ancien coach du Real Madrid est tout à fait légitime. Mais le contrat semble juste et tacite : tant que Deschamps gagne, pourquoi s'en priver après tout ? Sous prétexte que sans lui, ces Bleus joueraient mieux ? Qui peut aujourd'hui en avoir la certitude absolue ?

Deschamps ne privatise rien du tout, il n'a ni blanc-seing ni assurance vie sur le banc. Jouer trois finales en six ans lui donne simplement le droit, assez logique, de continuer. Ce n'est pas parce que les Bleus nous ont habitués à aller loin qu'il faut banaliser ce qui reste un gigantesque exploit dans des compétitions aussi concurrentielles. D'autant que ni le sélectionneur ni ses hommes ne semblent touchés par l'usure d'un pouvoir qui ne cesse de s'étendre.

Deschamps a prouvé qu'il savait se remettre en question en rappelant d'anciens parias, en renouvelant profondément son effectif et en ouvrant largement la porte aux nouvelles générations. Il n'a jamais semblé campé sur des positions qui fragiliseraient la sélection. Poursuivre l'aventure relève donc du bon sens. La durée, quatre ans, pose en revanche un problème.

Parce qu'elle suggère que, peu importe le résultat de l'Euro en Allemagne, la confiance lui est maintenue jusqu'à la prochaine Coupe du monde. Or, la fonction de sélectionneur doit être remise en cause à chaque tournoi car telle est la règle du haut niveau pour les plus grandes nations. Quitterait-il de lui-même le poste en cas d'énorme gadin en 2024 ? Aujourd'hui, il est légitime d'en douter car la France s'était ratée dans les grandes largeurs en 2021 mais Deschamps a persisté. Le Qatar lui a donné raison. Alors, le prolonger, évidemment. Pour quatre ans, en revanche, c'est un risque que la FFF se devait d'éviter.