M'Vila a bien grandi

Le costume de taulier n'est pas trop grand lui. Au contraire : il est taillé sur mesure pour Yann M'Vila. Il n'a que 21 ans, mais déjà cent matches pros et douze sélections au compteur. Vendredi, en Albanie (1-2), il s'est offert son premier but sous le maillot frappé du coq. Le premier d'un joueur du Stade Rennais en Bleu depuis quarante-neuf ans . "Je suis vraiment très heureux, a lâché M'Vila, sourire aux lèvres. Ça fait très plaisir, surtout en équipe de France, car c'est rare que je marque."

Les statistiques ne disent pas le contraire. Le but inscrit en Albanie n'était que le cinquième de sa carrière. Mais il vaut à lui seul toutes les analyses du monde : M'Vila l'a lui-même initié en récupérant la balle dans les pieds adverses, avant de lancer Benzema dans la profondeur et de décocher une frappe limpide dans le petit filet. Le natif d'Amiens aurait de quoi s'enflammer. Pas son genre. Lorsqu'il se présente face aux médias, il parle d'une voix posée. Lorsque les plus grands d'Europe lui font les yeux doux, il préfère "rester sereinement" à Rennes, parce qu'il "pense à l'Euro 2012" et qu'il "n'a pas envie de se griller". Pierre Dréossi, le directeur sportif du club breton, y décèle une forme de "maturité".

Il est comme ça, M'Vila : la tête sur les épaules. A Tirana, il a pourtant été au four et au moulin. Alou Diarra et Samir Nasri étaient dans un jour sans. M'Vila a donc suppléé le Marseillais dans les tâches ingrates et le Citizen dans l'orientation du jeu. Le 10 août, face au Chili (1-1), il était le seul véritable récupérateur. A Tirana, le milieu rennais a joué les pompiers de service en ratissant un nombre incalculable de ballons. Il les a tous ressortis avec une propreté et une justesse saisissantes. Le premier aiguilleur des Bleus, c'est lui. M'Vila joue souvent dans la verticalité. Oriente, créé le décalage.

Dans l'esprit de Laurent Blanc, il est devenu la plaque tournante de son entrejeu. Le sélectionneur l'avait lancé en Norvège (1-2) dès sa prise de fonction, il y a un an. Depuis, M'Vila s'est installé. "Quel que soit le système, il est présent et légitime, affirme Pierre Dréossi. On sent un joueur sûr de ce qu'il va faire. Il est serein dans son jeu alors que beaucoup sont perturbés." Il y a un mois, l'intéressé disait "venir en Bleu pour apprendre et recevoir l’enseignement de certains joueurs d’ici". Aujourd'hui, il pourrait donner la leçon.