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Le Barça en L1 en cas d'indépendance de la Catalogne ? Un joli casse-tête

Glenn Ceillier

Mis à jour 06/10/2017 à 13:01 GMT+2

Des hommes politiques catalans ont évoqué la possibilité de voir le FC Barcelone évoluer en L1 en cas d'indépendance de la Catalogne. Une hypothèse qui s'avère très compliquée à imaginer, notamment sur le plan juridique. Avec Erwann Mingam, avocat en droit du sport, on s'est amusé à se pencher sur cette fiction.

Le FC Barcelone à Paris - 2017

Crédit: Getty Images

Imaginez un PSG-Barça... mais pas sur la scène européenne : en championnat ! Impossible ? Sûrement. Pourtant, certains ne l'excluent pas. "En cas d'indépendance, les équipes catalanes devront décider où elles veulent évoluer. En Liga ou ailleurs : en Italie, en L1 ou en Premier League", a lancé Gerard Figueras dans une interview accordée à la Gazzetta dello Sport. Le secrétaire général du sport en Catalogne a mis le feu aux poudres en répondant à Javier Tebas. "Les clubs catalans ne pourront pas jouer en Liga si l'indépendance est prononcée", avait de son côté expliqué le président de la Liga dans El Pais. Depuis, la question se pose : le FC Barcelone peut-il jouer en L1 ?
Ce n'est pas la première fois que ce sujet vient sur la table. Quand le thème de l’indépendance de la Catalogne refait surface, l'idée de voir le FC Barcelone quitter la Liga et évoluer dans le championnat de France revient dans le paysage sportif et politique. Toujours sulfureux sur les sujets sensibles, Javier Tebas rappelle en effet régulièrement que la loi espagnole n’autorise pas les formations d’États étrangers à participer aux compétitions espagnoles même s'il y a des exceptions puisque les équipes de la Principauté d’Andorre y sont autorisées.
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Le Camp Nou vide

Crédit: Getty Images

Le principe de la territorialité poserait problème

Alors, le Barça en L1 en cas d'indépendance ? Ne vous emballez pas. Cela relève de l'utopie. Surtout si on se penche sur les questions juridiques que cela inclut. "Le passionné de foot que je suis rêverait de voir le Barça intégrer la L1. Le juriste que je suis estime que cette hypothèse est très peu envisageable", avoue Erwann Mingam, avocat associé du cabinet WM Law à Rennes en droit du sport et qui a accepté de se prêter au jeu de cette fiction. D'un point de vue juridique, les obstacles seraient en effet légion.
Le premier est le principe de la territorialité. Il y a quelques années, l'UEFA a rappelé que "l’organisation du football sur une base nationale territoriale constitue un principe fondamental et une caractéristique bien établie du sport". L'instance européenne avait alors refusé au club d'Evian Thonon Gaillard le droit de disputer ses matches à domicile au stade de Genève. Il lui fallait une enceinte sur le territoire français. Le FC Barcelone serait confronté au même souci.

Monaco et l'arrêt du conseil d'Etat ont-ils ouvert une brèche ?

Bien sûr, il y a des exceptions, aptes à inspirer le Barça. Le FC Vaduz, capitale du Liechtenstein, évolue ainsi dans le… championnat suisse. "C'est l'exemple d'un club d'un état souverain autorisé à jouer dans le championnat d'un autre état souverain sous l'égide de l'UEFA", souligne Erwann Mingam. Et en L1, il y a Monaco. Cependant, la situation de l'ASM est particulière. "Monaco s'appuie sur des accords diplomatiques très anciens, ce qui ne serait pas le cas du Barça", rappelle encore notre expert. Le club monégasque évolue en effet dans les Championnats de France depuis sa création en 1924.
En 2015, une décision du conseil d'état a toutefois créé une petite brèche. Contrainte de se pencher sur le dossier du transfert du siège social du club de la Principauté sur le territoire français, l'autorité suprême du droit public en France avait noté la particularité monégasque et "considéré qu'on ne peut pas imposer au club d'avoir le siège de leur direction effective en France". Depuis, la LFP a changé ses règlements. "Il n'y fait plus état de l'exception de Monaco. Mais surtout, il n’y fait plus état du principe imposant aux clubs d'avoir leur siège effectif en France", souligne Maître Mingam. Le Barça pourrait invoquer cette jurisprudence pour obtenir une dérogation. Mais le chemin sera long.
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Josep Maria Bartomeu, le président du Barça

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La DNCG, un frein majeur

Jouer en L1, cela inclut aussi de répondre aux règles imposées par la LFP. Notamment sur le plan financier. Et là, cela pourrait également coincer. Si la FC Barcelone passe entre les mailles du fair-play financier, il en serait bien différent avec la DNCG, le gendarme financier du football français. Sa dette de près de 250 millions d'euros poserait de sérieux problèmes. "Si on devait appliquer au Barça les règles de la DNCG dans toute leur rigueur, le Barça encourrait une rétrogradation ou l'encadrement de sa masse salariale, explique Erwann Mingam. Bien sûr, tout ceci peut s'amender. Et la DNCG peut assouplir ses règles. Mais elle ne pourrait pas le faire uniquement avec le Barça… Toute la rigueur de la DNCG serait alors remise en clause".
Autre obstacle pour voir le Barça intégrer la L1 : la question des droits sportifs. Les dirigeants catalans évoquent à chaque fois la première division quand ils parlent de cette hypothèse. Evidemment : comment le FC Barcelone pourrait se retrouver dans des divisions inférieures en France ? Cela semble ubuesque. Et pourtant, pour jouer dans l'élite, il faut débuter par le bas de l'échelle et obtenir le droit d'arriver au plus haut niveau avec des montées. C'est la base. Le Barça pourrait-il avoir un passe droit ? "Cela ne me semble pas inenvisageable, répond cependant Erwann Mingam. Bien sûr, il faudrait alors déroger à un certain nombre de règles qui existent aujourd'hui. Cependant, cela ne me semble pas être l'obstacle le plus rédhibitoire".

Quid des autres clubs catalans ?

Si les acteurs politiques et du sport en ont le désir, certaines barrières pourraient sauter. "Si on a levé tous les autres obstacles qui sont importants et qu'il y a une volonté forte des instances du football d'accueillir le Barça, on trouvera une dérogation pour ne pas les faire débuter en National", ajoute Maître Mingam, qui pose cependant une question clef : "Mais où mettrions-nous les autres clubs ?" Le FC Barcelone n'est en effet pas le seul club professionnel en Catalogne. A l'image de l'Espanyol et Gérone, douze équipes catalanes évoluent entre la Liga et la troisième division espagnole…
Si un jour leur envie d'évoluer en L1 devient réelle, le FC Barcelone et les autres clubs catalans auraient donc de nombreuses batailles à mener pour atteindre leur but. Cette fiction, amenée sur la scène politique comme moyen de pression dans ce contexte tendu, n'est de toute manière pas près d'arriver. La Liga pourrait en effet difficilement se passer du Barça tant pour sa compétitivité que pour sa puissance marketing. Et ferait sûrement tout pour garder ce statu quo.
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