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Le Portugal perd le Nord

Nicolas Vilas

Publié 19/05/2014 à 15:46 GMT+2

Les clubs du nord du Portugal viennent de traverser une saison aussi éprouvante que décevante. De Porto à Paços en passant par Braga, la région la plus peuplée du pays ne s’était pas noyée ainsi depuis plus de vingt ans. Au final, seul le Rio Ave surnage.

Varela (FC Porto)

Crédit: Panoramic

Nous en sommes tous témoins voire acteurs. Les aspirations régionalistes, indépendantistes ou nationalistes n’ont jamais été aussi prononcées que depuis que nous sommes plongés dans la fameuse "mondialisation". Longtemps condamnée à l’autarcie, la péninsule ibérique n’a pas attendu d’être englobée pour cultiver ses régionalismes. Le football y a contribué. Ainsi est né le clubisme, mélangeant sport et politique. Au Portugal, le nord industriel (s’)est souvent opposé au sud, plus proche de la luxueuse capitale. Pour lui, le foot était devenu une arme de lutte. La saison 2013-2014 vient de s’achever. Et voilà que les nordistes piquent du nez. Une seule équipe sur le podium de la Liga, le FC Porto, troisième. Aucune Coupe ne pointe vers le nord.
Pour trouver pire, il faut remonter à la saison 1981-1982. Même trio de tête (Benfica, Sporting et FC Porto) et un Braga battu en finale de la Taça par le Sporting (0-4). Pinto da Costa venait tout juste d’être élu pour la première fois. Le Portugal n’était pas encore membre de l’Union Européenne et son PIB dégringolait, la faute à la crise des pays en voie de développement. Et ce n’était pas juste le hasard. Une trentaine d’années plus tard, le pays traverse une crise plus profonde encore. Le taux de chômage dépasse les 15% et le "Norte" est particulièrement touché (plus de 17% de taux de chômage). Les usines ferment, fuient vers l’Est, lâchent du lest et les clubs locaux se retrouvent à l’ouest. Le tissu local s’effrite et les clubs, déboussolés, en sont aussi victimes. Sans oublier que le pouvoir d’achat des supporters diminue. Les socios peinent à honorer leurs cotisations et préfèrent mater les matches à télé. Et cette saison voilà ce qu’on vu les nordistes :
FC Porto préfère penser à demain
Après s’être enfilé trois titres de champion d’affilée, le FC Porto ferme le podium de la Liga. Le Dragon a traversé de rudes épreuves : une élimination en quarts de C3 contre Séville (1-0, 1-4), ajoutée à celles subies en coupes nationales face au Benfica. Nommé en début de saison, le jeune Paulo Fonseca a craqué sous la pression. Luis Castro, entraîneur de l’équipe B, s’est chargé d’assurer l’intérim. Pinto da Costa n’avait plus changé de technicien en cours de route depuis près de dix ans (2004-2005, Victor Fernandez avait été remplacé par José Couceiro). Avec 61 points conquis en championnat, le FCP réalise son plus faible ratio (2,03 points par match) dans la compétition depuis cette même saison 2004-2005 (1,82 point par match).
Du coup, certains socios ont manifesté leur mécontentement. Les insultes et autres tags injurieux ont laissé place à l’indifférence. Voilà qu’ils boudent leur équipe. Le classico de la dernière journée n’a réuni que 25 121 spectateurs au Dragon. La plus faible affluence en Liga pour un Porto – Benfica. PdC s’est empressé de réagir en confiant l’équipe à l’Espagnol Julen Lopetegui. L’ancien sélectionneur de la Rojita cherche déjà à colmater les départs des joueurs les plus bankables (Mangala, Fernando, Defour, Jackson…). Le FCP pourrait miser sur la carte jeune, en interne mais aussi en rameutant quelques "craques" en devenir.
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Mangala devrait quitter Porto cet été

Crédit: AFP

Braga, le coup d’arrêt
La saison avait mal débuté pour le Sporting de Braga. Sorti l’été dernier en playoff de la Ligue Europa par les Roumains de Pandurii, Braga, neuvième de Liga, sera complètement absent des compétitions européennes la saison prochaine. La pire performance depuis onze ans et l’arrivée du président Antonio Salvador. Même l’équipe B, antépénultième de D2, est à la peine. Le résident du stade Axa a perdu en assurance. Le retour de Jesualdo aux commandes fut un échec. Salvador qui n’avait plus viré de coach depuis sept ans, l’a remplacé en février par Jorge Paixão. Un pari osé et loupé. L’ex-technicien du Farense (D2) n’est pas parvenu à redresser le SCB. Ni à calmer la passion des supporters. Des scènes d’une inhabituelle violence se sont déroulées dans la cité des archevêques.
Les larmes d’Eduardo - qui lutte pour une place au Brésil - après l’élimination en demi-finale de Coupe du Portugal contre le Rio Ave traduisent la gravité de ce naufrage.  Paixão qui affirmait "avoir les conditions pour poursuivre" a été sacrifié. Le nom de Nuno Espirito Santo (Rio Ave) revient, avec insistance. Et beaucoup de départs sont annoncés. Sans Europe, Braga se prive de précieux millions. Rafa, Aderlan Santos ou Eder devraient être vendus. Le projet du Sporting Clube de Braga qui devait reposer sur un beau projet de centre de formation est à l’arrêt. Mais Salvador maintient l’espoir et les Espoirs. Les juniors ont remporté leur premier championnat national depuis 37 ans.
Guimarães, le nouveau projet de Vitoria
Guimarães n’a pas fait mieux qu’une anonyme place de dixième en championnat. Il y a un an, le Vitoria terminait déjà dans le ventre mou de la Liga. La crise économique est passée par là et Rui Vitoria a dû composer avec de nombreux jeunes et une équipe B reléguée en D3. Mais le succès historique en Coupe du Portugal 2013 avait fait illusion. "Nous payons le succès de la saison dernière", confesse le président Julio Mendes. Et l’euphorie est bien retombée. Les très chauds supporters de Guimarães bouillonnent. Ils ont récemment bombardé le bus de leurs idoles aux fumigènes, après la défaite contre Arouca (2-3).
Les joueurs ont appelé au calme alors qu’ils pataugeaient sur une série de dix rencontres sans victoire. Ils sauveront l’honneur en concluant leur saison par un succès lors du derby, contre Braga (1-0). L’avenir de Vitoria – qui arrivait en fin de contrat – a été tranché : il a signé pour trois ans de plus avec des pouvoirs élargis. "Un contrat pionnier", explique l’intéressé. Le futur du club, lui, suscite pas mal d’interrogations : le président Mendes a annoncé qu’il se tâtait à partir pour se porter candidat à la Ligue et il en appelle à la générosité de son actionnaire Mario Ferreira pour 2014-2015. Et les rumeurs annonçant l’arrivée d’un nouvel investisseur (anglais ?) reviennent…  
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L'entraîneur de Guimarães, Rui Vitoria

Crédit: Panoramic

Paços, le calvaire
Paços de Ferreira était l’équipe sensation de 2013. La gestion saine et sérieuse de ses dirigeants avait finalement été récompensée par une troisième place en Liga et une qualification européenne. Mais trop de choses avaient changé, durant l’été. Une trentaine de mouvements dont le départ de Paulo Fonseca à Porto. Le jeune entraîneur pourrait presque incarner à lui seul le spleen des "Nortenhos" de cette saison. Il s’est brûlé les ailes au Dragon et ses successeurs sont tombés, les uns après les autres, à la Mata Real. Jorge Mendes avait placé Costinha et Maniche. Henrique Calisto leur a succédé avant que Jorge Costa ne tente de secourir l’équipe d’une relégation. Les sympathiques Castors sont aux abois et espèrent passer aux barrages contre Aves. Insulté, conspué par les supporters le président Barbosa a craqué. Victime de problème de santé, il a menacé à plusieurs reprises de démissionner. Et s’il venait à s’exécuter, les candidats seraient peu nombreux. Y compris chez les plus critiques.
Rio Ave, la surprise
Au premier coup d’œil et à en croire sa place au classement (11e), la saison du Rio Ave pourrait paraitre banale. Elle est pourtant historique. La formation de Vila do Conde a atteint la finale des deux coupes nationales. Deux défaites face au Benfica (0-2 en Coupe de la Ligue et 0-1 en Coupe du Portugal). Aux commandes du club depuis deux ans, Nuno Espirito Santo devrait effectuer un bond cet été. Son président Antonio Silva Campos s’en fait une raison : "Il sera très difficile de le garder". L’ami et client de Jorge Mendes devrait poursuivre à Braga. A seulement 40 ans, l’ancien gardien de but  pourrait emmener avec lui quelques éléments prometteurs. La Gestifute ne va pas chômer cet été.
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Andre "Ukra" Monteiro (Rio Ave) à la lutte avec Luisao (Benfica) lors de la finale de Coupe du Portugal

Crédit: AFP

Gil Vicente, le mirage
"De Deus est forcément supérieur à Jesus". En début d’exercice, le président Fiuza s’amusait du nom biblique de son nouveau coach. Et l’entame du Gil Vicente semblait lui donner raison : 11 points conquis en sept journées, du jamais vu. João de Deus était sur un nuage. Mais les neuf matches sans défaite (de septembre à novembre 2013) ont été suivis par cinq mois d’abstinence (soit 16 matches) ! L’entraîneur prévenait déjà : "Nous n’avons pas la capacité de jouer la Ligue Europa". 
Ses prédictions étaient vraies. Avec trois succès en 2014, les Coqs n’ont pas de quoi jouer les fiers. L’annonce du fameux partenariat signé avec Manchester City n’est, pour l’instant, pas suivi d’effets. Les comptes sont dans le rouge, le stade sonne creux et personne n’ose prendre la place de Fiuza qui a été réélu pour un nouveau mandat de trois ans, en mars dernier. Le Gil aura célébré ses 90 ans juste devant la zone des condamnés. Cet été devrait encore être mouvementé à Barcelos.
Moreirense et Penafiel sont de retour, le Boavista aussi
A défaut de s’être vu attribuer les premiers rôles dans l’élite, les nordistes étaient en haut de l’affiche de la D2. Les quatre premières places leur reviennent. Le Moreirense n’aura passé qu’une année au purgatoire avant de remonter, avec le titre de champion. Il est accompagné du FC Penafiel. Situé dans le district de Porto, l’autre FCP est de retour après huit ans d’absence. Et son entraîneur, Miguel Leal, qui vient d’être nommé au Moreirense sera remplacé par Chéu (ex-Videu). Aves qui a terminé sur le podium – devant l’équipe B du FC Porto – dispute le barrage pour la montée face à Paços. Et puis il y a le Boavista. Le champion de 2001 va basculer de la D3 à la Liga. Une promotion administrative qui annule, pour vice de procédure, la rétrogradation votée en 2008. En conséquence, et si le club aux damiers présente les conditions nécessaires pour pouvoir être inscrit dans l’élite, la Liga passera de 16 à 18 équipes.

Classement de la Liga depuis cinq saisons (en gras, les clubs du nord) :

PremierDeuxièmeTroisième
2013-2014BenficaSportingFC Porto
2012-2013FC PortoBenficaP. Ferreira
2011-2012FC PortoBenficaBraga
2010-2011FC PortoBenficaSporting
2009-2010BenficaBragaFC Porto
2008-2009FC PortoSportingBenfica
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