Bleus: Trémoulinas y croit

Jeudi matin, sur les coups de 11h30, Benoît Trémoulinas "regardera ça de loin". "Je tomberai peut-être dessus", rigole-t-il. A vrai dire, le latéral gauche de Bordeaux a peu de chances de connaître en direct la première liste du nouveau sélectionneur national : à l'heure où Didier Deschamps égrennera les noms retenus pour France-Uruguay, la séance matinale des Girondins, prévue à 10 heures, au Haillan, sera à peine terminée. Elle risque de s'éterniser. Deux jours avant le coup d'envoi officiel de la saison, sur la pelouse d'Evian-TG, Francis Gillot aura forcément des choses à dire, des retouches à faire. Et Trémoulinas ne s'en plaindra pas : d'une certaine manière, ça l'arrange. Au moins, il n'aura pas le temps de penser aux Bleus. Car jusqu'ici, son histoire internationale s'écrit à l'encre de la frustration. Sous l'ère Blanc, il a souvent été appelé. Sans jamais porter le maillot frappé du coq. L'Euro ? Il n'était pas du voyage. A l'écouter, c'était logique. "Il y a beaucoup de concurrence à mon poste, nous explique-t-il, d'une voix posée. Ils jouent la Ligue des champions tous les ans, avec de très grands clubs. Il ne faut pas se voiler la face : forcément, c'est compliqué pour moi."

Mais à 26 ans, Trémoulinas a quelques raisons de croire qu'il sera appelé jeudi. Les Mancuniens Patrice Evra et Gaël Clichy reprennent la Premier League une semaine après la reprise en Ligue 1. Idem pour le Valencian Jérémy Mathieu. Le Bordelais, lui, aura déjà un match - et une préparation plus avancée - dans les pattes. Alors à demi-mots, il ose espérer que son destin en Bleu épousera une toute autre trajectoire. Mais il ne le crie pas trop fort. "Quand il y a un nouveau coach, c'est souvent une nouvelle ère qui commence, admet-il. Mais je veux d'abord me concentrer sur mon début de saison avec Bordeaux. Ensuite, on verra ce qui se passera."

Si le défenseur girondin "ne (se) focalise pas du tout" sur l'équipe de France, c'est parce que, insiste-t-il, d'autres échéances l'attendent. "Ce qui compte, c'est mon club. On a vraiment envie de commencer notre saison par une victoire, pour marquer les esprits d'entrée. On va essayer de rester sur la dynamique de la saison passée." Les Girondins l'ont terminée en trombe, en décrochant sur le fil un strapotin européen, qui leur semblait inaccessible à mi-parcours. Cette fois, pas question de connaître le même retard à l'allumage. "On sait à quoi s'en tenir. D'un point de vue collectif, on n'a pas envie de revivre un mauvais début de saison. On essaiera de ne pas faire les mêmes erreurs. Mais le contexte est différent. L'an dernier, on restait déjà sur une fin de saison difficile. Il a fallu du temps pour s'en remettre, mais aussi pour que le nouveau staff puisse mettre en place ses idées. On savait que ça ne viendrait pas comme ça."

Aujourd'hui, "après un an de vécu en commun, le groupe se connaît mieux". D'autant plus que, contrainte économique oblige, l'effectif n'a pas bougé. "On repart avec la même ossature. Pour les automatismes, ça aide, positive le natif de Lormont. Cette stabilité va nous faire gagner du temps." Et, cerise sur le gâteau, les Girondins ont désormais "plusieurs cordes à leur arc". 3-5-2 ou 4-4-2 ? Gillot a le choix des armes. Il n'hésitera pas à s'en servir. Trémoulinas assure "n'avoir aucune préférence". Il préfère souligner les bienfaits de cette variété tactique. "Avoir deux systèmes, c'est un réel avantage, souligne celui qui porte la tunique au Scapulaire depuis 2007. On les a bien assimilés. Nos principes de jeu restent les mêmes : on cherche à avoir le ballon, donner du mouvement. La différence, c'est qu'on sait s'adapter à des situations mal embarquées." Au point de nourrir des ambitions européennes ? "Il est trop tôt pour le dire. Chaque chose en son temps." Dans la bouche de Trémoulinas, ces paroles sonnent comme un éternel refrain.