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Ce City-là est sur une autre planète

Bruno Constant

Mis à jour 21/12/2017 à 11:00 GMT+1

PREMIER LEAGUE - Le caractère exceptionnel du Manchester City de Guardiola, sans concurrence sur la première partie de saison anglaise, a tendance à occulter les bonnes performances de ses concurrents.

Josep Guardiola lors de Manchester City - Southampton en Premier League le 29 novembre 2017

Crédit: Getty Images

Les chiffres sont éloquents et sans appel : 16 victoires, 0 défaite, 52 points, 11 points d'avance sur son premier poursuivant, 56 buts marqués, 12 encaissés. A ce rythme-là, la formation de Pep Guardiola va battre, pardon… exploser tous les records de l'histoire du championnat d'Angleterre en une seule saison. A ce rythme-là, City achèverait l'exercice avec 109 points, soit quatorze de plus que le Chelsea de Mourinho (95 en 2005-2006) ! A ce rythme-là, City finirait la saison avec 118 buts, quinze de plus que le Chelsea d'Ancelotti (103 en 2009-2010). A ce rythme-là, City serait sacré dès le 17 mars, au soir de la 31e journée…
Et ne me parlez pas d'un manque de concurrence à l'heure où les équipes du Top 6 se sont renforcées comme jamais, à l'heure où elles sont dirigées par certains des meilleurs techniciens au monde (Mourinho, Klopp, Conte, Pochettino, Wenger) et disposent de quelques-uns des meilleurs joueurs du monde du moment (Kane, Hazard, Salah, Coutinho…). Car les coéquipiers de Kevin De Bruyne ont non seulement battu toutes les équipes du Top 6 – 5-0 face à Liverpool, 1-0 à Chelsea, 3-1 contre Arsenal, 2-1 à Manchester United, 4-1 face à Tottenham – mais ils les ont également surclassées dans le jeu, même lorsque le score fut serré, comme à Stamford Bridge ou Old Trafford. Honnêtement, il y avait une classe d'écart. Bon, de là à parler de meilleure équipe de l'histoire… Non. Enfin, pas en décembre.
Kevin De Bruyne après le but de Raheem Sterling pour Manchester City contre Tottenham en Premier League le 16 décembre 2017

"Plus abouti que le Barça de Guardiola"

Lundi, dans le cadre de mon Podcast 100% foot anglais, j'ai rencontré Christophe Lollichon, responsable du département des gardiens à Chelsea, à Londres. Avec les Blues, il a affronté quatre fois le Barça de Pep Guardiola et il l'a observé à de nombreuses reprises en Espagne lorsqu'il suivait Thibault Courtois, prêté alors à l'Atletico Madrid. Et son constat est sans appel : "Le jeu produit par le City de Guardiola est encore plus abouti que celui de son Barcelone. Il continue à chercher des nouvelles pistes de jeu, à surprendre." Pour beaucoup, City est même imprévisible et la préparation de ses adversaires un casse-tête. Guardiola n'aimait pas affronter le West Bromwich de Tony Pulis. "C'est comme aller chez le dentiste", lançait-il en partageant un verre de vin avec ce dernier à la fin des rencontres. "City est l'équipe la plus compliquée à analyser cette saison, selon Ben Garner, l'ancien adjoint de Pulis. Les gens pensent qu'ils jouent de la même façon à tous les matches. Non. Ils changent en fonction de ce que fait l'adversaire. Dès que vous pensez avoir régler un problème, soudainement, ils s'ajustent et en créent un autre ailleurs. Lors du match de Carabao Cup, Delph (latéral gauche) rentrait systématiquement au milieu. Le match suivant, il était scotché à la ligne de touche…"

MU a le rythme d'un champion sacré trois fois en quatre ans

Autre différence, le City de Guardiola n'est pas dépendant d'un joueur comme son Barça l'était et l'est encore malgré tout de Lionel Messi. A City, lorsque Kevin De Bruyne est moins décisif, Guardiola peut compter sur David Silva. Lorsque le petit meneur de jeu espagnol est absent, c'est Gundogan qui prend le relais. Le Catalan peut s'appuyer sur deux avant-centres (Agüero et Jesus), comme en début de saison, ou deux ailiers, comme aujourd'hui avec Sterling et Sané. Ils comptent les trois meilleurs passeurs du championnat. Pas un, ni deux mais trois ! Face à Tottenham, les Citizens ont joué sans trois quarts de leur défense type (Kompany, Stones, Mendy) et cela ne leur a pas posé le moindre problème. "C'est comme s'ils jouaient ensemble depuis des années", me confiait Hugo Lloris, la semaine passée.
Le caractère exceptionnel voire hors norme de ce City a tendance à éclipser les performances de ses concurrents. A commencer par son voisin, Manchester United, dont la moyenne de 2,17 buts marqués par match, pourtant exceptionnelle, est totalement effacée par les 3,11 de moyenne des Sky Blues. Avec le rythme qui est la sienne (41 points en 18 journées), la formation de Jose Mourinho aurait été sacrée championne trois fois lors des quatre dernières saisons. Simplement, la comparaison avec son voisin qui a disposé des mêmes moyens financiers et d'autant de temps pour bâtir son équipe est terrible. Que dire de Chelsea qui reste sur huit victoires lors des dix dernières journées pour une seule défaite ? Une cadence infernale. Certes, les Blues ne sont pas aussi souverains que lors de la première saison d'Antonio Conte mais, finalement, ils tiennent leur rang à trois points de MU.
Hugo Lloris (Tottenham) après le but de Raheem Sterling (Manchester City) en Premier League le 16 décembre 2017

Les "Invincibles" avaient perdu tout le reste

Mais voilà, jusqu'à présent et à presque mi-championnat, ils sont tombés sur une formation hors normes. Conte puis Mourinho ont tour à tour concédé la perte du titre. C'est un peu tôt, je vous l'accorde. Manchester City perdra sans doute des points en route. Mais, dans le même temps, il faudrait que ses poursuivants réalisent un sans-faute, ou presque. A ce rythme-là, City égalerait les "Invincibles" d'Arsenal mais avec un plus grand nombre de points encore que les Gunners (90).
Néanmoins, je ne leur souhaite pas car ceux qui ont suivi la formation d'Arsène Wenger en 2003-2004 savent que les Londoniens, à vouloir s'accrocher à cet incroyable record, avaient fini par perdre les autres compétitions une à une, usés physiquement et épuisés nerveusement. Arsenal s'était incliné en demi-finale de la Cup et de la Coupe de la Ligue ainsi qu'en quart de finale de la Ligue des Champions face au Chelsea de Ranieri (1-2, 1-1). Une compétition qui, selon beaucoup d'observateurs, leur tendait les bras cette année-là (Porto, Monaco et La Corogne dans le dernier carré). Or, cette équipe de Manchester City ne doit pas se contenter d'un seul trophée à la fin de saison et sera forcément attendue au tournant en Ligue des Champions, là où le titre de "meilleure équipe d'Europe" prend réellement tout son sens.
Bruno Constant fut le correspondant de L'Equipe en Angleterre de 2007 à 2016. Il collabore aujourd'hui avec RTL et Rfi en tant que spécialiste du football anglais et vous livre chaque sa semaine sa chronique sur la culture foot de Sa Majesté.
Pour approfondir le sujet, écoutez mon Podcast 100% foot anglais sur l'actualité de la Premier League et du football britannique.
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