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Qualifications Euro 2024 - Avant Italie - Angleterre : Pour la Nazionale et Mancini, le mal des attaquants continue

Guillaume Maillard-Pacini

Mis à jour 23/03/2023 à 14:04 GMT+1

QUALIFICATIONS EURO 2024 - Après avoir manqué le dernier Mondial, l'Italie de Roberto Mancini, championne d'Europe en titre, entame avec crainte le début des qualifications à l'Euro 2024 qui commence ce jeudi soir face à l'Angleterre (20h45) à Naples. Le sélectionneur italien déplore notamment un secteur offensif très pauvre en qualité, privé d'un vrai buteur depuis maintenant trop d'années.

Mario Balotelli (Italie) - mai 2018

Crédit: Getty Images

C'est une question que les Italiens se sont souvent posés ces dernières années. Et à chaque trêve internationale, au moment où la Serie A et les rivalités de clubs se mettent en pause, elle refait toujours surface. La voici pour vous : A quand remonte la dernière fois où la Nazionale a eu un grand attaquant dans ses rangs ? Là, généralement, les noms fusent. Luca Toni ? Christian Vieri ? "Pippo" Inzaghi ? Qu'importe le nom, finalement, le constat étant sans appel : il faut remonter à presque vingt ans pour retrouver un "bomber" digne de ce nom. Depuis, les déconvenues ont été nombreuses et jamais personne n'a vraiment su vraiment le maillot du numéro 9.
De l'autre côté des Alpes, on y a pourtant souvent cru. De Mario Balotelli à Andrea Belotti, d'Antonio Di Natale à Ciro Immobile... Les années passent, les attaquants aussi. Le dernier cité, Soulier d'Or 2019-2020 avec 36 buts en 37 matchs en Serie A, restera comme l'une des plus grandes déceptions tant son rendement a différé entre club et sélection. Que l'on s'entende, le contexte collectif ne lui a pas toujours été favorable, certes, mais le buteur de la Lazio (33 ans, 55 sélections, 15 buts) a également ses torts. Blessé, il n'a pas été convoqué par Roberto Mancini, tout comme Federico Chiesa (également touché) et Lorenzo Insigne, exilé loin de la Nazionale en rejoignant Toronto l'été dernier. Le trio aligné lors de la finale de l'Euro 2021 à Wembley a donc volé en éclats.

Retegui, le nouveau pari

Après le coup raté du Brésilien de naissance Joao Pedro, appelé à la rescousse pour le barrage contre la Macédoine du Nord, Mancini a tenté un nouveau pari en convoquant Mateo Retegui, 23 ans, avant-centre italo-argentin du Club Atlético Tigre, actuellement meilleur buteur du championnat argentin avec six buts lors des sept premières journées et prêté par Boca Juniors. Né en Argentine, il possède un passeport italien en raison des origines siciliennes de son grand-père, a indiqué son paternel à des médias italiens.
Roberto Mancini et Mateo Retegui lors d'un entraînement de la sélection italienne
"On le suit depuis quelques temps, il est titulaire depuis deux ans dans le championnat d'Argentine et il a des qualités qui malheureusement nous manquent en ce moment, s'est justifié le "Mancio" la semaine passée. On pensait qu'il ne souhaitait pas venir, il a au contraire dit oui tout de suite et on l'a convoqué."
Il a aussi rappelé Simone Pafundi, tout juste 17 ans, à qui il avait offert une première sélection contre l'Albanie (3-1) en novembre mais qui n'a depuis joué que neuf minutes en Serie A avec l'Udinese. Wilfried Gnonto (Leeds, 2 buts en Premier League) sera également au rendez-vous. Avec ces choix, le sélectionneur semble jouer la carte de l'enthousiasme, plutôt que de faire appel aux plus expérimentés Nicolo Zaniolo (Galatasaray) ou Moise Kean (Juventus), insuffisamment en forme à ses yeux, ou à Mattia Zaccagni, actuel co-meilleur buteur de la Lazio Rome avec neuf buts. Giacomo Raspadori (23 ans, 17 sélections, 5 buts), tout juste remis de blessure, n'est pas titulaire à Naples, Andrea Belotti (29 ans, 44 sélections, 12 buts) est en difficulté à la Roma et Gianluca Scamacca (24 ans, 9 sélections, aucun but) continue de prendre ses marques à West Ham. Est-il vraiment nécessaire de rappeler que Mancini en était arrivé au point de rappeler un certain Mario Balotelli l'an dernier ?

Des statistiques alarmantes

Forcément, en Italie, au pays des divers Silvio Piola, Paolo Rossi, Giuseppe Meazza ou encore Gigi Riva, meilleur buteur de la sélection avec 35 buts, on s'interroge. Est-ce un passage à vide ? Un creux générationnel qui s'étend sur plusieurs années ? Ou un problème de formation ? "Les étrangers ont ruiné la sélection, a estimé Riva au quotidien Il Messaggero, mercredi. Il y en a trop dans notre foot. Et il n'y a plus un joueur italien qui a la possibilité de se faire repérer. Dans toutes les équipes de haut de tableau, il n'y a presque que des attaquants étrangers." Au total, 65% des minutes jouées en Serie A le sont par des joueurs étrangers. Une conséquence directe du fameux "decreto crescita", qui permet aux Italiens ou aux étrangers qui s'installent dans la Botte après au moins deux ans passés à l'étranger et qui s'engagent à y rester au moins deux ans de bénéficier, pendant cinq ans maximum, de conditions fiscales très avantageuses.
Le Napoli du Nigérian Victor Osimhen, l'Inter Milan de l'Argentin Lautaro Martinez et l'AC Milan du Français Olivier Giroud, "ont sept ou huit joueurs italiens au total, c'est la réalité...", a soupiré Mancini lundi, refusant de voir une "renaissance" dans ce tir groupé en C1 avec ces trois clubs qualifiés en quarts de finale. Voici les attaquants concernés dans les effectifs des clubs italiens toujours en lice en Europe (C1, C3 et C4) :
  • AC Milan : aucun attaquant italien
  • Inter : aucun attaquant italien
  • Napoli : Politano (1 but), Raspadori (4 buts), Zerbin (0 but)
  • Roma : Belotti (3 buts), El Shaarawy (1 but)
  • Juventus : Chiesa (1 but), Kean (1 but)
  • Fiorentina : Sottil (1 but)
Les statistiques des attaquants transalpins sont alarmantes. Par exemple, sur l'année 2022, seuls trois joueurs italiens ont marqué plus de dix buts dans les cinq grands championnats, dont deux attaquants. Soit à des années lumières de la France et ses 21 joueurs à plus de dix buts sur l'année, dont... 17 attaquants. Si l'on totalise les buts des éditions 2021-2022 de la Ligue des champions et Ligue Europa, ainsi que ceux de la première phase 2022-2023, on en totalise 34 pour les joueurs italiens, contre 114 pour la France, 81 pour l'Espagne et 17 pour l'Allemagne et l'Angleterre. Du côté de la Youth League, cinq joueurs italiens (dont deux attaquants) étaient à plus de 3 buts la saison dernière, et quatre (dont deux attaquants) le sont actuellement pour l'exercice actuel.
En Serie A, Ciro Immobile est actuellement le joueur transalpin qui compte le plus de réalisations (9) en compagnie de son coéquipier Mattia Zaccagni, devant Riccardo Orsolini (Bologne, 7 buts), Domenico Berardi (Sassuolo, 6 buts), Manolo Gabbiadini (Sampdoria, 6 buts) et Davide Frattesi (Sassuolo, 6 buts).
Le top 5 des attaquants italiens et leur utilisation en 2022-2023 :
  • 1) Francesco Caputo (Empoli) : 2.002 minutes
  • 2) Gianluca Caprari (Monza) : 1.775 minutes
  • 3) Patrick Ciurria (Monza) : 1.713 minutes
  • 4) Riccardo Orsolini (Bologne) : 1.617 minutes
  • 5) Ciro Immobile (Lazio) : 1.559 minutes
Pas une question de talent
Interrogé dans les colonnes de La Stampa, Maurizio Viscidi, coordinateur des sélections jeunes de l'Italie, a assuré qu'il ne s'agissait pas d'un problème de talent. "Iln'a pas disparu, a-t-il prévenu. On ne peut pas parler non plus de creux générationnel. Ce qui doit être corrigé, c'est la méthodologie d'entraînement à l'âge où le joueur ressort. A 15, 16 ans, on voit des joueurs qui sont de belles promesses mais, après, c'est comme si leur parcours s'arrêtait par manque de connaissances : les milieux arrivent toujours à s'en sortir, mais c'est plus compliqué pour les attaquants. Les techniciens des jeunes entraînent les soixante premiers mètres, pas les derniers trente. Ils pensent au travail d'équipe, pas la spécificité du rôle. J'entends des 'on joue en 3-5-2' ou 'non, le 4-3-3 est mieux' mais, à cet âge, il faut entraîner le joueur."
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Mais pourquoi Conte fait-il encore tout pour se faire virer ?

Pour Viscidi, il s'agirait donc d'un problème qui se situe à la racine. "On qualifie les attaquants soit de 'murs', soit de 'pivot', poursuit-il. On demande à ce qu'ils jouent avec leurs coéquipiers en venant vers le ballon. Et la profondeur ? La perception de ce qu'il se passe, ou ce qu'il peut se passer quelques secondes avant de toucher le ballon ? Nos analyses montrent également que les jeunes attaquants ont peur de se faire mal. Ils ne frappent plus de force, ne se font plus plaisir, le pied est faible, le coup de tête inexistant et ils ont un problème spatio-temporel dans les volées. La semaine, on donne trop de temps à la possession de balle qui favorise la progression des milieux au détriment des attaquants. Attaquer la profondeur est devenu trop rare. Les entraîneurs hurlent à leurs joueurs de jouer simple, de ne pas oser, de regarder le coéquipier le plus proche."
Bilan des courses ? "Nos attaquants sont comme des automobilistes en contresens pour les mouvements qu'ils font, regrette celui qui a assisté au match entre les U19 de l'Italie et l'Allemagne, mercredi à Brême. Ailleurs, on sait valoriser le talent et l'enrichir. L'Europe va dans la bonne direction. Il fut un temps où l'on jouait dans la rue, on y apprenait l'art du dribble et on y cultivait la vertu de chercher le but. Nous, nous n'avons pas été capables de donner une réponse à un changement socio-économique. En dehors de la rue, nous nous sommes perdus dans la tactique non spécifique." Pour Roberto Mancini, le problème de l'attaquant "est sérieux" et risque malheureusement "de durer", puisque presque "aucun n'est actuellement titulaire dans son club". "On est vraiment en mauvaise posture", résumait-il au Messaggero début mars.
(Avec AFP)
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