AS Rome - Lecce | Enzo Le Fée, magie envolée à Rome

Recruté pour plus de vingt millions d'euros l'été dernier, Enzo Le Fée est porté disparu à la Roma. Pas encore utilisé par Claudio Ranieri, débarqué sur le banc il y a trois semaines, l'ancien milieu de terrain du Stade Rennais ne comptabilise pour l'instant "que" 365 minutes de jeu. De quoi déjà remettre en cause son avenir dans la capitale ?

C'est un cas parmi mille autres. Plus qu'à un club, la Roma ressemble plutôt à un bourbier alors qu'on s'approche de la mi-saison. Trois entraîneurs différents depuis le début de saison, des joueurs contestés, une administratrice déléguée menacée et démissionnaire, un directeur sportif (Florian Ghisolfi) au centre des critiques, des tifosi en révolte : actuellement quinzièmes au classement, les Giallorossi jouent le maintien. Et le match face à Lecce (16e avec 13 points également), samedi soir (20h45), ressemblerait presque à une confrontation directe. Dans tout ce marasme, une recrue estivale est portée disparue : Enzo Le Fée. Recruté expressément par Ghisolfi pour 23 millions d'euros lors du dernier mercato, l'ancien milieu de terrain de Lorient et de Rennes ne joue plus. Déjà qu'il ne le faisait pas beaucoup auparavant.

Depuis l'arrivée de Claudio Ranieri sur le banc, il n'a plus joué une seule seconde en deux matches. C'est le seul joueur de l'effectif romain à être dans ce cas, hormis Mario Hermoso (blessé) et le jeune Buba Sangaré. Lorsque Daniele De Rossi était encore là en début de saison, Le Fée avait disputé une soixantaine de minutes contre Cagliari et moins de trente face à Empoli. Apprécié par Ivan Juric, appelé à la rescousse après le départ de "DDR", le joueur de 24 ans avait disputé son premier match plein. Celui face au Torino fin octobre. Sa meilleure performance, au passage. Sans oublier deux titularisations contre le Dinamo Kiev et l'Union St. Gilloise en Ligue Europa. Il enchaînait avec 67 minutes lors de la débâcle à Vérone (3-2), avant d'être sorti et ne plus jamais voir le terrain malgré l'arrivée de Ranieri depuis.

Au total, son compteur affiche donc 365 minutes de jeu. "Pratiquement, la Roma l'a payé pour 65.000 euros par minute", calculait La Gazzetta dello Sport cette semaine, plutôt dubitative sur cette affaire et surtout son prix. "Il a fait voir trop peu de chose pour justifier un prix de 23 millions d'euros", constatait le quotidien aux pages roses, qui le voit encore une fois remplaçant ce samedi.

Interrogé sur le cas Le Fée, Claudio Ranieri n'a pas voulu blâmer son joueur. "Il a de très bonnes qualités, a assuré l'ancien entraîneur de Leicester. Mais dans les matches, j'ai besoin actuellement de joueurs qui parviennent à répondre coup sur coup. Contre l'Atalanta, un joueur de combat comme Niccolò Pisilli m'a manqué." Comprenez mieux : au vu de l'urgence de la situation, l'heure est à la lutte et à la hargne. Pas vraiment à la beauté et la technique. "Pour moi, le duo Manu Koné-Enzo Le Fée a du bon au milieu. C'est une jeune doublette qui a un bel avenir, j'espère qu'ils continueront comme ça", se félicitait Juric lorsqu'il était encore sur le banc romain. Dommage qu'il soit parti depuis.

"Moi, je continue de travailler chaque jour pour aider mes coéquipiers. La période n'a pas été simple, mais je me sens chaque jour un peu mieux dans ce club (...) Cela fait partie de ma mentalité de savoir m'adapter aux deux phases de jeu. J'aime être à la construction, je me sens à l'aise sur le terrain et j'espère continuer comme ça", confiait Le Fée début novembre, s'imaginant alors probablement monter en puissance. Raté. Le tout pendant que Manu Koné, recruté plus ou moins au même prix, est devenu un titulaire dans le onze romain. Deux profils sensiblement différents. Deux trajectoires totalement inverses.

"Enzo a toujours été dans le viseur des grands clubs, a toutefois rappelé l'agent du joueur Sébastien Szwarc à SportItalia. En janvier 2023, il était proche du Borussia Dortmund. L'été suivant, le Bayer Leverkusen le voulait. Il avait décidé de rejoindre Rennes pour le lien particulier avec Bruno Genesio. Même l'AC Milan était intéressé (...) Avant de venir à Rome, Enzo avait eu un appel vidéo avec De Rossi. Il était resté marqué par ce moment. Ce rendez-vous avait renforcé sa décision de rejoindre le club." Sans aucun regret, donc ? "Il est encore dans l'adaptation, a rappelé ce dernier. Enzo doit encore récupérer sa meilleure condition physique. Il peut jouer dans plusieurs positions (...) C'est un joueur qui donne tout pour l'équipe et son entraîneur. Il aime récupérer les ballons, faire des passes décisives et marquer. Ce n'est pas un joueur égoïste, au contraire."

Voulu et protégé par Ghisolfi, le Lorientais de naissance va devoir passer la deuxième s'il ne veut pas voir son expérience romaine se finir prématurément. Son temps est écoulé. Déjà, oui. Comme celui de la plupart de ses coéquipiers. Aujourd'hui, au vu de la situation du club, la patience n'est plus vraiment de rigueur dans la ville éternelle. Et son avenir y est incertain, comme indiqué par le Corriere dello Sport.

"Il n'y a déjà pas de patience en temps normal. Alors maintenant... Ici, il se murmure que Ghisolfi pourrait rapidement faire ses valises. La famille Friedkin (propriétaire de la Roma, ndlr) n'est pas satisfaite des choix faits sur le mercato, qui a été très dépensier. Le Fée en est l'un des symboles, c'est une recrue qui est souvent reprochée au dirigeant", constate un suiveur du club, qui rappelle que Rome et son fameux environnement "peuvent être toxiques" pour tous les nouveaux arrivants, dirigeants comme joueurs. "Surtout si personne ne les prévient en amont...", conclut-il. En cas de départ de Ghisolfi, l'avenir de Le Fée à Rome serait bien loin d'être éternel.