UEC : La rébellion des "petits" du football européen se précise (sans les clubs de Ligue 1)
Lundi, près de 150 clubs européens représentant trente-trois nations affiliées à l'UEFA se sont réunis pour répondre à l'appel des fondateurs de l'Union of European Clubs. L'UEC est une association bâtie pour défendre les intérêts des petits du Vieux Continent face à la toute puissance de l'élite représentée par une poignée de clubs. La France, elle, n'avait pas fait le déplacement…
L'Union Saint-Gilloise en 2023
Crédit: Getty Images
Ils étaient venus de vingt-cinq pays différents. Ils représentaient quarante clubs européens et avaient fait le voyage de Bruxelles en personne. 103 autres s'étaient mis en ligne pour suivre les débats sur Zoom, portant à trente-trois le nombre de nations membres de l'UEFA dont au moins un club avait répondu à l'appel des fondateurs de l'Union of European Clubs, ou UEC, qui vit officiellement le jour en ce 24 avril dans un hôtel tout proche du Parlement européen. La France n'était pas de ceux-là. On y reviendra.
"Aujourd'hui est un jour très important pour le football européen", dit l'un des invités d'honneur de l'événement, le président de la Liga Javier Tebas, dont on sait qu'il ne porte pas beaucoup d'instances et d'institutions dans son cœur. Mais celle-ci se veut différente. Elle entend donner une voix à ces clubs qu'on n'invite à parler que pour qu'ils disent "oui", quand bien même ils soient la base sans laquelle la pyramide du football européen ne saurait exister.
Jusqu'à présent, ils ne pouvaient compter que sur un seul représentant officiel auprès de l'UEFA et des autres corps constitués du football : l'ECA, la European Club Association présidée par Nasser Al Khelaifi, laquelle se soucie autant du sort de ses membres associés que la Premier League s'inquiète de celui des membres de la National League en Angleterre.
Bien des clubs, d'ailleurs, ne satisfont pas les critères d'admission de l'ECA. Un exemple en est la Royale Union Saint-Gilloise, ce club de Bruxelles acquis par le propriétaire de Brighton Tony Bloom en 2018 et qui, un an après sa promotion en D1 belge en 2021, finit la Jupiler League à la deuxième place et atteignit les quarts de finale de l'Europa League cette saison. Son président Alex Muzio était là.
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Javier Tebas durant la réunion inaugurale de l'UEC
Crédit: DR
Mais si Saint-Gilles peut se qualifier pour l'Europe, Saint-Gilles ne peut se qualifier pour l'ECA, à l'instar de la grande majorité des clubs professionnels de première et seconde division du continent européen.
S'ils le pouvaient, d'ailleurs, cela ne ferait pas nécessairement grande différence. En digne héritière du G14, club très privé des locomotives d'alors du football européen, l'ECA est le porte-voix des géants d'aujourd'hui. Le problème est que, quand il s'agit de prendre des décisions qui affecteront bien tous les clubs européens sans exception, l'ECA défendra les intérêts de la super-élite, et ceux-là seulement.
Or, jusqu'à présent, il n'existait aucune alternative à l'ECA, à qui un protocole d'entente avec l'UEFA - qui vient d'expirer - attribuait le droit exclusif de représenter les clubs européens dans les discussions sur, par exemple, l'évolution du format de la Ligue des Champions et la répartition de ses revenus. On imagine aisément quelle attention les délégués d'un Bayern, d'un PSG ou d'un Manchester United pouvaient porter aux intérêts de ces clubs qui, eux, ne disputeraient jamais, ou presque, de compétitions européennes, bien qu'on parle là de plus des neuf dixièmes des clubs aujourd'hui en activité sur le continent.
Où est passée la Ligue 1 ?
A ceux-là, l'ECA ne propose au bout du compte que la soumission aux desiderata d'une vingtaine de puissants - au grand maximum - en échange de vagues promesses, de beaux discours et de "paiements de solidarité" qui sont bien trop modestes pour menacer l'ordre établi.
L'UEC entend présenter une alternative à cet état de fait. L'initiative est née il y a deux ans et demi de cela, lorsque des membres de la "Plateforme de conseil des clubs" mise en place par European Leagues, une association qui regroupe vingt-neuf ligues professionnelles européennes (*) décidèrent que le temps était venu d'oser aller plus loin et de défier l'emprise quasi-totale de l'ECA sur le football européen de club. Leur discours officiel se veut conciliant. "Nous ne recherchons pas le conflit", entendit-on tout au long de cette après-midi.
Personne n'est dupe pour autant : le conflit est inévitable. L'ECA ne peut accepter sans réagir la présence d'une organisation qui diluerait automatiquement son influence auprès de l'UEFA.
Si leurs noms ne diront pas grand-chose au grand public, les figures publiques de l'UEC sont bien connues dans le microcosme. Katarina Pijetlovic est une avocate qui a exercé dans les mondes du tennis et du football et a enseigné à Liverpool et Manchester avant de s'installer à Lisbonne. Alex Muzio est, donc, le président de la Royale Union Saint-Gilloise. Gareth Farrelly, lui aussi un avocat, est un ancien international irlandais. Dennis Gudasic est le directeur exécutif de l'un des plus grands clubs de Croatie, NK Lokomotiva Zagreb.
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Nasser Al-Khelaifi, le président du PSG, devant la déroute face au Bayern Munich
Crédit: Imago
L'identité des "petits" clubs représentés à la réunion de Bruxelles est aussi révélatrice des ambitions de la toute nouvelle association et de l'intérêt qu'elle suscite, même si l'identité de ses premiers membres officiels n'a pas été rendue publique. Aston Villa, Brighton et Crystal Palace étaient représentés, tout comme Séville, Valence et le Borussia Mönchengladbach. La Commission Européenne dépêcha son vice-président Margaritis Schinas, fan d'Aris Salonique (autre club présent à la réunion de Bruxelles), pour assurer l'UEC de son soutien. Quoi qu'on pense de cette initiative, elle n'est pas le fait de fantaisistes ou d'illuminés.
On peut donc légitimement se demander comment il se fait que la Ligue 1 soit le seul des grands championnats européens à n'avoir pas envoyé quelque délégué de quelque club que ce soit au lancement de l'UEC. Tous furent contactés. Tous décidèrent de rester à la maison.
Cette absence fut remarquée, et l'hypothèse fut émise par plus d'un observateur présent, que, au vu de l'identité du président de l'ECA, qui est aussi celui du PSG (Nasser Al-Khelaifi), les autres clubs français avaient décidé de se tenir en retrait d'une initiative qui représente un défi direct à l'autorité de l'homme le plus puissant et le plus influent de leur football.
Peut-être que leur attitude évoluera au fil des mois, dans l'attente de la première Assemblée Générale de la nouvelle "Union", qui devrait se tenir à la fin de l'année. Le député de la Convention Pierre Victurnien Vergniaud s'était écrié : "les tyrans ne nous paraissent grands que parce que nous sommes à genoux". En France, l'heure du lever n'a visiblement pas encore sonné. Ailleurs, si.
(*) Vingt-huit à compter de la fin du mois de juin 2023, l'Espagne ayant décidé de s'en retirer alors, estimant que l'organisation avait échoué dans sa mission.
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Openda doit-il être nommé parmi les meilleurs joueurs de la saison ?
Video credit: Eurosport
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