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"On ne va pas se mentir, personne ne misait sur moi au début… et même après"

Laurent Vergne

Publié 13/08/2016 à 03:03 GMT+2

JO RIO 2016 – Emilie Andéol a été la divine surprise de la journée vendredi au dojo olympique. A l'instar de Teddy Riner chez les hommes, elle a décroché l'or chez les lourds. Une consécration à laquelle avait du mal à croire la double championne d'Europe, dont la confiance en elle n'a jamais été le point fort.

Emilie Andéol

Crédit: Panoramic

Emilie Andéol aurait pu ne jamais partir. Elle aurait voulu ne jamais descendre de ce podium. Devant les journalistes, intarissable, elle aurait pu parler pendant des heures. Puis Lucie Décosse est arrivée. Et les deux championnes olympiques ont commencé à discuter. Surtout la plus récente des deux. Et là encore, ça aurait pu durer des plombes. Aussi généreuse dans la parole qu'elle ne l'avait été dans son judo plus tôt dans la journée...
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Emilie Andéol - Judo JO Rio 2016

Crédit: AFP

C'était son moment, alors elle avait envie de le prolonger. Une joie à la mesure de la surprise. Car à l'exact inverse de Teddy Riner, ce titre olympique, personne ne l'a vraiment vu venir. Pas même elle. "Au début de la journée, je n'aurais jamais pensé être championne olympique, confie-t-elle à Lucie Décosse. Le podium, oui, j'y croyais. L'or, c'était peut-être dans un coin de ma tête. Mais je pensais surtout au podium. Pour moi, n'importe quelle médaille aurait été de l'or."

Traditionnel remontage de bretelles

S'il y a bien une chose qui caractérise la Bordelaise, c'est son manque de confiance. Une constance chez elle. Elle ne s'en cache d'ailleurs pas. "On ne va pas se mentir, personne ne misait sur moi au début quand je suis arrivée à l'INSEP il y a 10 ans… et même après, raconte-t-elle. Personne ne croyait en moi. Je suis passée par toutes les phases de doute, il y a eu beaucoup de remises en question et j'ai été au fond du trou plus d'une fois. Il a fallu que je prouve aux autres et peut-être encore plus à moi-même que j'étais capable de réussir."
Et elle a réussi. Double championne d'Europe, médaillée de bronze aux Mondiaux en 2015, elle s'est frayée un chemin jusqu'aux Jeux de Rio, ses premiers, à 28 ans. Ultra-émotive, capable de fondre en larmes avant, après et même pendant un combat, Emilie Andéol a encore dû lutter contre elle-même. En amont de cette journée de vendredi d'abord. "Quand je suis arrivée, j'étais bien, je profitais de ma famille, je suis venue encourager Automne (Pavia), je ne pensais pas trop au judo. C'est quand Audrey est partie à la pesée que je me suis dit 'attends, demain soir, ce sera ton tour' et là j'ai réalisé où j'étais et pourquoi j'étais là. Et le stress est monté, et bien monté". Constamment, elle a besoin d'être rassurée. De se persuader que oui, elle est à sa place.
Vendredi, ce fut pareil. Comme à son habitude, Andéol a démarré poussivement. "C'est toujours compliqué de m'y mettre pour moi, admet-elle. Le premier combat est toujours le plus difficile." Question de mise en route physique ? Non. La tête, toujours : "Je me mets tellement de pression, je veux tellement bien faire que je me bloque". C'est là que son entraîneur, Christophe Messina, entre généralement en scène. "Il a trouvé les mots pour me booster, reprend la désormais championne olympique. Il m'a remonté les bretelles, comme au Tournoi de Paris. A croire que j'aime bien ça."
J'espère que ce titre va me donner un peu plus confiance en moi
Ce n'est qu'une fois arrivée en demi-finale qu'Emilie Andéol est sortie de sa carapace. Là, pour la première fois, peut-être, de sa vie, elle a effectué sa mue. L'agnelle est devenue louve. Face à elle, Yu Song, la Chinoise, championne du monde en titre, en demi-finale. Puis la Cubaine Ortiz, championne olympique et double championne du monde. La Française aurait dû se faire toute petite, se ratatiner. Mais non. Cette fois, elle les a mangées. Elle raconte : "Christophe m'a dit 'tu n'as rien à perdre, alors lâche les chevaux maintenant, c'est elles qui vont douter si tu fais durer le combat". Bien vu.
La psychologie est une drôle d'affaire car Emilie Andéol, qui a passé sa vie à douter, s'est vue alors portée par une certitude bien ancrée : elle allait devenir championne olympique. "Une fois en demies, j'ai senti que j'irais au bout". Des mots qui, dans sa bouche, prennent un sens bien particulier. "En finale, dit-elle encore, plus ça allait, même si j'étais fatiguée, je sentais qu'elle aussi elle n'était pas au top. Elle commençait à fléchir." Au golden score, c'est bien elle qui a fini par immobiliser la tenante du titre.
La carrière et la vie d'Emilie Andéol ont basculé définitivement à 17h10, à Rio. "J'espère que ce titre va me donner un peu plus confiance en moi", souffle-t-elle, comme si elle n'en était pas encore convaincue. On ne se refait pas… D'ailleurs, quand quelqu'un lui a suggéré que, désormais, elle serait la fille que les autres veulent battre, elle a ouvert de grands yeux et dit, un peu affolée : "Ouh la, ça ne me plait pas trop, ça ".
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Emilie Andeol - Judo JO Rio 2016

Crédit: AFP

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