"Il va être incroyable"

Mark SPITZ : Sur la base de son expérience d'Athènes et sur ce que j'ai vu de lui, je dirais qu'il a une grande chance de le faire. Je dirais même une meilleure chance.

M.S. : C'est juste une spéculation de ma part. Mais il a maintenant plus d'expérience que moi lorsque j'ai réussi cela. A Athènes, il a gagné 6 médailles d'or. J'en avais gagné seulement deux les JO précédents ceux de Munich (Mexico-1968). Et puis (lors des sélections d'Omaha début juillet), il a dit qu'il était fatigué après la première course, ce qui veut dire qu'il n'était pas encore au top. Or il gagne (cinq épreuves individuelles) et bat des records (deux records du monde). Je m'attends donc à le voir gagner avec une certaine marge et avec des temps qu'il n'a jamais réussis auparavant. Ses adversaires savent que même s'ils battent leur record personnel ou les anciens records du monde de Phelps, ils vont quand même ne voir que ses talons. Il les démoralise. Il va être incroyable.

M.S. : La première difficulté est évidemment de remporter la première épreuve. Il débute avec le 400 m 4 nages, qui ne sera pas une partie de plaisir. Ensuite, il n'a aucun contrôle sur ses équipiers lors des relais. Il n'est pas à l'abri d'un faux-départ, voire d'une élimination en série, course qu'il ne disputera même pas. Et puis, il y a le 100 m papillon, distance sur laquelle il ne possède pas le record du monde. Il a gagné à Athènes et aux Mondiaux-2007 par un centième, je crois. Cela se joue à peu. Cette course promet d'être très chaude.

M.S. : Ce n'est pas difficile pour lui. Comme cela n'était pas difficile pour moi. Nous sommes entraînés pour cela. Le problème est de rester concentré huit jours. Mais je suis certain que Michael va prendre toutes les courses une par une et au jour le jour. Honnêtement, il m'est arrivé de me présenter pour une finale olympique et de me demander si c'était le 100 m papillon ou le 200 m libre. Bien sr, il y a les écrans qui indiquent l'épreuve, mais aussi étrange que cela puisse paraître, cela m'est arrivé. Et puis, il a une difficulté à surmonter que je n'avais pas. Je ne chassais pas 7 médailles comme lui. Je chassais 4 titres. Et le programme avait pratiquement été bâti pour moi.

M.S. : Je pense que c'est le moment. Je serais heureux de passer le relais à quelqu'un que j'ai inspiré, je suis sûr. Donc je me dis: les records sont faits pour être battus, même le mien. Cela fait 36 ans, c'est long ! Mais s'il ne le fait pas, c'est que c'était écrit et cela n'enlèvera rien à son talent.

M.S. : En 2000 au moment des JO de Sydney, il y a eu des tests sur les combinaisons longues et celles d'aujourd'hui sont relativement identiques même si elles ont une meilleure flottaison et une meilleure glisse. Or, l'étude a prouvé qu'il fallait une vitesse de 6,5 miles par heure (10,5 km/h) pour profiter des avantages. Or cela correspondait à la vitesse atteinte par environ 10 nageurs du 50 m libre... Donc je pense que Michael Phelps qui portait la version "jambes" de la combinaison lorsqu'il a battu le record du monde du 400 m 4 nages (aux sélections américaines en juillet) aurait battu ce record même sans s'épiler. Je ne crois pas que ce soit les combinaisons qui fassent la différence.

M.S. : Ils auraient été battus quand même. L'année avant les JO et les années olympiques, les nageurs sont concentrés au maximum sur leur objectif sportif. Et plus les Jeux approchent plus l'athlète est concentré et veut faire de meilleures performances que ses précédentes. C'est donc une progression naturelle.