Ski alpin - Les protège-tibias en carbone de Cyprien Sarrazin : vrai danger mais faux coupable de sa chute à Bormio
ParEmile Pawlik
Mis à jour 10/01/2025 à 11:29 GMT+1
La grave chute de Cyprien Sarrazin à Bormio a relancé des débats sur la réglementation du matériel des skieurs, dont la FIS a dénoncé "l'agressivité". Au cœur de la tempête, les protège-tibias en carbone que le Français et Marco Odermatt portent, entre autres. Un faux débat pour notre consultant Johan Clarey. Explications.
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Comme souvent la Stelvio de Bormio a été impitoyable en concassant les skieurs, plus ou moins gravement. Malheureusement pour le clan tricolore et pour lui, Cyprien Sarrazin a fait les frais de cette piste si dangereuse. Tombé à très haute vitesse, le descendeur français avait été hélitreuillé et opéré d'un hématome sous-dural. Il est depuis à l'hôpital de Lyon, au service neurochirurgie, avant d'entamer sa rééducation. Projeté sur un mouvement de terrain piégeux, sa chute avait relancé les débats sur la préparation d'une piste toujours difficile et sujette à débats.
Rapidement, les médias se sont emparés du sujet des protège-tibias que le skieur du Dévoluy et Marco Odermatt portent. Ces dispositifs permettent de solidifier des blessures antérieures. Ainsi, le Français s'est en effet fracturé le plateau tibial droit en 2018 tandis que la fusée suisse vit avec des inflammations en bas de la jambe comme il le racontait au média helvétique Blick. "J'avais tellement mal au tibia à cause d'une inflammation que cela me faisait hurler", revenait Odermatt au sujet de blessures apparues lorsqu'il est entré sur le circuit de la Coupe du monde en 2016. À l'époque, à la recherche de solutions, le Suisse entend parler de ces protections par du bouche à oreille.
C'était beaucoup trop agressif et dangereux
Ces dispositifs s'apparentent à une languette qui vient jusqu'en-dessous du genou et permet au skieur d'être beaucoup plus direct dans ses trajectoires. Un équipement toujours plus dans le sens de la performance, moins pour la sécurité des athlètes qui se mettent en danger. Notre consultant Johan Clarey, vice-champion olympique de descente à Pékin 2022, avait utilisé des équipements similaires en 2017-2018. "J'ai essayé une fois des languettes qui venaient juste en dessous du genou. Elles n'étaient pas en carbone, c'était vraiment une languette traditionnelle qui était beaucoup plus longue, détaille-t-il. Rien que ça, ça a énormément changé le comportement de ma chaussure et l'agressivité de mon ski. Je me suis rendu compte par la suite que c'était beaucoup trop agressif et que ça devenait dangereux."
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Surtout qu'à l'époque, il ne ressent pas de bénéfices sur ses performances. "C'était délétère sur les portions faciles et j'ai arrêté de les utiliser", indique le skieur retraité de 44 ans. Depuis, le matériel a évolué et séduit même des skieurs qui n'ont pas forcément de douleurs au niveau des jambes, ce qui fait écho aux déclarations de Markus Waldner, directeur des compétitions masculines de la FIS. "On a dépassé la limite, le matériel est devenu trop agressif", avait alors indiqué l'Autrichien en réaction aux critiques des athlètes et des suiveurs sur la qualité de la piste. Si le dispositif pose vraiment question, difficile de dire si le coupable de la grave chute de Cyprien Sarrazin est celui-ci.
Sarrazin y était habitué
"Trois skieurs sont tombés au même endroit, c'était un passage très dangereux avec un changement de neige", détaille Clarey, qui rappelle que l'équipement de Sarrazin n'était pas nouveau pour le double vainqueur de Kitzbühel la saison dernière. "Il avait l'habitude de skier avec depuis deux ou trois ans, je ne pense pas que ce soit quelque chose qui l'a surpris. Il a l'habitude des réactions que ça peut provoquer. En aucun cas, ce n'est la cause de son accident", opine-t-il, convaincu de la responsabilité de la piste dans le grave accident qui a mis fin à la saison de la star du ski français.
Le sujet n'est pas nouveau pour la FIS qui a déjà réfléchi au printemps dernier à "limiter l'usage" de ces protections chez les jeunes. Johan Clarey, lui, se montre beaucoup plus prudent et mesuré. "Il y a toujours beaucoup de polémiques sur les équipements. Il faut avoir des arguments pour pouvoir dire que c'est dangereux ou non, jusqu'à preuve du contraire, il n'y a rien qui le prouve", rappelle-t-il, alors qu'en Autriche et en Suisse, on s'est très vite emparé du sujet. Peut-être un peu trop vite...
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