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Chloé Trespeuch, globe de l'abnégation du snowboard cross : "Quand on est l'heureuse élue, c'est quelque chose de fort"

Fabien Esvan

Mis à jour 26/03/2024 à 19:27 GMT+1

Ce qui compte, ce n'est pas l'arrivée, c'est la quête. Tête d'affiche du snowboard cross mondial depuis dix ans, double médaillée olympique, Chloé Trespeuch a enfin mis la main sur le graal en remportant la Coupe du monde. La récompense d'un travail acharné qu'elle veut encore bonifier, comme elle le confie dans un long entretien accordé à Eurosport.

Trespeuch : "Ces mots ont fait que j'ai retrouvé le feu"

Chloé, vous nous aviez confié en décembre que le "globe de cristal était quasiment à égalité avec une médaille olympique". Comment les comparer maintenant que vous avez goûté aux deux ?
Chloé Trespeuch : C’est difficile de choisir, mais le globe de cristal, c’est vraiment une grande valeur sportive. Il faut être polyvalent, savoir s’adapter à tous les parcours, gérer sa fatigue, son mental sur une longue période. C'est un grand défi du quotidien d’avoir cette même agressivité, cette combativité sur chaque étape, prendre tous les risques d’aller jouer la victoire, mais aussi de perdre des points. Le globe de cristal me donne une énergie folle pour progresser toutes les saisons et essayer de travailler pour être une athlète complète. La médaille olympique, on représente vraiment la France, c’est beaucoup plus médiatisé, on met en avant notre sport. Ce globe, c’est aussi l’investissement de toute l’équipe, de tout le staff sur toute la saison. C’était une espèce de grosse machine qui fonctionnait ensemble.
Ce dossard de leader de la Coupe du monde est quand même lourd à porter.
Le globe, c'est le but ultime de tout athlète de sports d'hiver. Qu'est-ce qu'il a de si mythique ?
C. T. : C’est le meilleur athlète de tout l’hiver qui ramène le globe de cristal. La concurrence est énorme, tout le monde le veut et se bat pour l'avoir. On sait qu’on peut le perdre à tout moment : une mauvaise chute, un accrochage, une blessure, une perte mentale où on peut être dépassé par l’enjeu. Ce dossard de leader de la Coupe du monde est quand même lourd à porter. Tout ça, c’est là-dedans (elle montre son globe). Quand on est l'heureuse élue, ça fait quelque chose de fort.
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Trespeuch a douté : "Je me suis prouvé que j'étais capable de gagner"

Est-ce qu’il y a une forme de soulagement après des années à courir après le graal ?
C. T. : Oui, ce globe m’a demandé beaucoup de travail, de patience car ça fait quelques années que je suis proche de l’avoir. Il m’a toujours manqué ce petit truc, aller chercher quelques victoires dans la saison. C’était un peu de frustration, mais ce sont aussi à la fois des axes de progression donc c’est chouette. Il a une énorme valeur car ça fait des années que j’y pense, que je le loupe aussi. Là, il est avec moi et je savoure vraiment ce moment.
A force de ne pas gagner, j’avais l’impression que c’était quelque chose qui était ancré en moi : est-ce que je suis encore capable de gagner ?
ll y avait l’objectif du globe, mais surtout… celui des victoires. Vous avez coché de nombreuses cases cette saison…
C. T. : C'était le double objectif de la saison. Dans ma carrière, j’ai fait énormément de podium, mais mes stats de victoires sont très mauvaises. A force de ne pas gagner, j’avais l’impression que c’était quelque chose qui était ancré en moi : est-ce que je suis encore capable de gagner ? Le doute dépasse parfois la confiance. Je suis vraiment hyper contente d’avoir réussi à faire trois victoires cette saison et de m’être prouvée que j’étais capable de gagner. C’est ce qui m’a aidée à faire un pas de plus vers le globe.
Si vous deviez retenir une de ces trois victoires (Les Deux-Alpes, Gudauri et Montafon), ce serait laquelle ?
C. T. : La victoire aux Deux-Alpes a été la plus marquante. C’était la première. Elle est toujours un peu stressante car on n'a pas été en concurrence avec les autres nations depuis de long mois. On ne connaît pas vraiment la valeur de notre préparation. Arriver et gagner directement à la maison avec un public en feu sur une piste qui était vraiment agréable et joueuse, un niveau où tout le monde était en forme… Ça a lancé la saison et la dynamique et validé la préparation.
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Trespeuch, vainqueur aux Deux Alpes : "Je suis au paradis"

A Sierra Nevada, je me fais quand même mal, j’ai le visage qui double de volume, j’ai peur de me blesser. Je me dis que ça aurait pu s’arrêter là…
Qu’est-ce qui a changé ces derniers mois et qui vous a permis de faire la différence ?
C. T. : Mentalement, j’ai essayé d’aborder cette saison en remettant tout à zéro, en me débarrassant de toutes ces croyances selon lesquelles j’étais quelqu’un qui faisait des podiums et qui ne gagnait pas. Mes coaches m’ont beaucoup aidée avec leurs mots, leur coaching, le fait qu’ils croient réellement et qu’ils me fassent comprendre que j’étais capable de gagner. Ça aide beaucoup.
Est-ce qu'il y a un tournant particulier dans cette folle saison ?
C. T. : Il y a eu plusieurs tournants. Le début de saison a été excellent, j’étais vraiment sur une bonne dynamique. A Sierra Nevada, il y a cet accrochage avec Charlotte (Bankes) qui est un peu difficile à digérer. J’étais vraiment sur la bonne voie pour gagner. Je me fais quand même mal, j’ai le visage qui double de volume, j’ai peur de me blesser. Je me dis que ça aurait pu s’arrêter là…
Comment se remobilise-t-on après une telle frayeur, un événement comme celui-là qui aurait pu bouleverser toute la saison ?
C. T. : A Cortina et à Montafon, je fais deux courses qui sont moyennes. J’ai un peu moins d’agressivité, de combativité. Je ne sais pas d’où ça vient sur le moment. J’ai ce moment avec les coaches où ils me disent : ‘Chloé, il faut que tu retrouves cette agressivité que tu avais au début de saison, il faut que tu joues les victoires et que tu arrêtes de penser à ce classement par points.’ Ce sont ces mots qui font que j’ai retrouvé le feu dès le lendemain et que je vais chercher cette victoire à Montafon. Ça me relance pour cette dernière ligne droite.
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Cette saison, "l’assurance tous risques" comme vous appelle le staff a été de sortie. L'étiquette vous sied à merveille, non ?
C. T. : (rires) Quand on regarde les stats, ça me convient. Après, j’ai envie de ne pas les décevoir car ils sont tellement impliqués dans cette quête de globe de cristal et de performance que j’ai envie de continuer d’assurer ce rôle. Ça rajoute une petite pression supplémentaire, mais elle est positive.
Vous succédez à celle qui est votre coach et votre amie Nelly Moenne-Loccoz, neuf ans après. Ça a une saveur particulière ?
C. T. : On a pleuré après ce globe. Ça part d’une vraie belle complicité en tant qu’athlètes. Ça a été vraiment une guide pour moi quand je suis arrivée sur la Coupe du monde. Elle m’a beaucoup inspirée, elle m’a montré la voie, elle est beaucoup dans l’échange. En tant que coach, elle me connaît par cœur, elle sait quoi me dire et à quel moment. C’est ce dont j’ai besoin pour exploiter mon plein potentiel. Kevin (Strucl) et Nelly, c'est cette paire de coachs qui me permet de progresser chaque saison.
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Aller chercher un autre globe de cristal, c’est évidemment déjà dans un coin de ma tête.
Les deux millésimes qui arrivent sont très riches avec les Mondiaux 2025 en Suisse et les Jeux Olympiques 2026 de Milan-Cortina (à suivre en intégralité sur Eurosport)…
C. T. : Les Jeux Olympiques de 2026, ça reste évidemment l’objectif sur le plus long terme. Après on verra, parce que les Jeux en 2030 (en France ?), ça motive, mais on fera un point plus tard. Le plan de route, c’est la recherche de la performance, je ne m’en lasse pas. Aller chercher des médailles sur les championnats du monde, ça me motive. Aller chercher un autre globe de cristal, c’est évidemment déjà dans un coin de ma tête. C’est quelque chose de tellement fort qu’on ne s’en lasse pas. Quand on voit Pierre Vaultier (ndlr, vainqueur du globe à six reprises), on se rend compte qu’on n’en veut toujours plus, et que ce sont des moments vraiment incroyables.
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L'entretien avec Chloé Trespeuch en intégralité

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