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Antoine Ghibaudo : 14 ans, l'âge des rêves et des possibles

Laurent Vergne

Mis à jour 10/01/2020 à 11:06 GMT+1

A Cannes, les membres du programme "Les Petits Crocos", mis en place par Lacoste et Tecnifibre, de jeunes espoirs ont eu la chance de travailler avec Daniil Medvedev. Parmi eux, Antoine Ghibaudo. A 14 ans, le Français s'engage dans les méandres du circuit ITF Juniors. Un long chemin, entre rêves, ambitions et embûches.

Daniil Medvedev avec à ses côtés le jeune Français Antoine Ghibaudo. (Photo : Sindy Thomas)

Crédit: From Official Website

A Cannes, le Père Noël est passé avec quelques jours d'avance le mois dernier. Au Elite Tennis Center, le Centre créé et dirigé par Jean-René Lisnard, s'entraine notamment un certain Daniil Medvedev. Installé ici depuis 2014, le Russe y parfait sa préparation hivernale auprès de son entraîneur, Gilles Cervara. Mais le 17 décembre, le menu de l'entraînement du finaliste du dernier US Open était un peu particulier, avec des sparrings de 10 à 15 ans, les yeux un peu écarquillés de taper la balle avec un Top 5 mondial.
Medvedev était, il est vrai, le Père Noël idéal pour un tel cadeau. Les jeunes en question font partie des "Petits Crocos", le programme mis en place en 2018 par Lacoste et Tecnifibre, deux marques dont le Russe est devenu un porte-étendard. Il regroupe une dizaine de jeunes talents issus de différents pays européens. L'idée est d'accompagner ces espoirs sur la durée, en espérant dénicher, pourquoi pas, le nouveau Djokovic ou le prochain Medvedev. Comme ce dernier, matériel et vêtements leu sont fournis, mais ils bénéficient aussi des conseils d'Arnaud Di Pasquale, parrain de l'opération et, à l'occasion, peuvent croiser un Medvedev.
Parmi ces jeunes pousses figure le Français Antoine Ghibaudo. A 14 ans, il est classé 0. Ceux qui pratiquent le tennis pourront mesurer le niveau du (très) jeune homme. Classement qui n'aura bientôt plus grand sens pour lui puisqu'il évolue désormais sur le circuit ITF Juniors. A Cannes, Antoine a eu le privilège d'une séance de travail particulière avec Daniil Medvedev. Une demi-heure d'exercices sur mesure mis en place par Gilles Cervara, l'entraîneur du numéro 5 mondial.
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Antoine Ghibaudo avec Daniil Medvedev après leur séance d'entraînement. (Photo : Sindy Thomas)

Crédit: From Official Website

A 14 ans, je ne frappais pas la balle comme ça
Ce qui impressionne, c'est la facilité avec laquelle il tient la cadence à l'échange, sans forcer. Certes, ce n'est qu'une séance d'entraînement, sans l'intensité d'un match, mais dans ses frappes de balle, Medvedev ne se retient pas vraiment. "J'ai joué comme avec un sparring adulte parce que, pour moi, c'était une vraie séance de travail, confie le Russe. Puis, si j'avais été à leur place, je n'aurais pas aimé qu'on me fasse de cadeaux. C'est bien pour eux de voir ce que ça représente de jouer avec un pro."
"La cadence, j'aime bien, glisse de son côté Antoine. Quand il y a du rythme, ça me convient bien. Quand j'avais tapé avec Tsonga il y a quelque temps, j'avais été impressionné par sa puissance, sa vitesse de balle. Là, avec Daniil, ce qui m'a marqué, c'est sa précision, sa solidité. Il ne rate pas une balle."
A la sortie de cette demi-heure, le Moscovite, dans un français parfait, lance en guise de compliment au coach de son sparring d'un jour : "A 14 ans, je ne frappais pas la balle comme ça". Expérience inestimable, en tout cas, que celle de pouvoir bosser "comme un pro", avec un pro, et pas n'importe lequel. Même pour quelques dizaines de minutes. Possible avant-goût d'une vie future. Car pour tous ces jeunes, le rêve, voire l'objectif, est bien d'embrasser à terme une carrière professionnelle pour transformer une passion d'enfance en métier.

L'embryon des Petits As

Une ambition qu'il convient d'accompagner, sereinement, calmement, mais sans l'étouffer. "Quand j'étais DTN, nous avait expliqué Arnaud Di Pasquale au lancement du projet, je me suis battu auprès de certains entraîneurs sur ces sujets. J'avais peur qu'on freine les jeunes sur leur discours. Un moment, il faut être ambitieux. Si à 13 ans tu ne rêves pas, tu n'y arriveras jamais. Ce n'est pas possible. C'est trop dur, il y a trop de concurrence et de travail à fournir. Ensuite, il faut faire les choses étape par étape bien sûr, et le rêve doit se transformer en désir, puis en objectif."
Pour Antoine Ghibaudo comme pour les autres, le rêve est clairement identifié. Parmi les meilleurs de sa catégorie en U14, il a notamment été demi-finaliste aux Petits As, à Tarbes, en 2019. Une expérience précieuse. "Au niveau des 14 ans, explique-t-il, c'est le championnat du monde, comme un Grand Chelem chez les pros. C'est le rendez-vous qu'on attend tous, on ne veut pas trop se rater. Ce n'était pas un tournoi facile, c'est assez stressant, il y a beaucoup de monde, des journalistes aussi. Et on sait que c'est le gros tournoi."
Les Petits As offrent un embryon de ce qui les attend plus tard : la gestion des attentes, le regard extérieur, celui du public, des médias. Même à une petite échelle, ce vécu-là est enrichissant. "Si un gamin est inhibé par tout ça à 14 ans, ça risque d'être problématique pour le haut-niveau", rappelle Jean-René Lisnard. Aux Petits As, plus que le résultat brut (certains ex-vainqueurs n'ont jamais percé, d'autres qui ont perdu au premier tour ont effectué des carrières formidables), c'est cet apprentissage qui est intéressant. Pour le reste, il doit être vécu comme une simple étape.
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Antoine Ghibaudo. (Photo : Sindy Thomas)

Crédit: From Official Website

Un super gamin, le temps passe vite avec lui
A 14 ans, Antoine Ghibaudo les franchit les unes après les autres. Il mène déjà presque une vie de mini-pro. Depuis l'été dernier, il s'est lancé sur le circuit ITF Juniors, celui des 15-18 ans, qu'il a donc abordé précocement. "Pour l'instant, il n'a pas de frustration, explique son jeune coach (26 ans,) Julien Demois, car il avance très bien, très vite. On lui fixe des objectifs, il les atteints. Par exemple, début 2019, on s'était dit ' ce serait bien de gagner un Grade 5 en ITF Juniors' et il l'a fait." Cette année, il passé aux "Grade 4", le cran au-dessus. Dès ce mois de janvier, il bourlingue dans les Emirats pour y disputer deux tournois.
En 2020, le jeune Francilien aimerait disputer les qualifications de Roland-Garros juniors. "Ce serait une belle expérience", dit-il. "A 14 ans, c'est un objectif très fort, je ne sais pas comment ça se passera mais il faut essayer, oui", ajoute son entraîneur, avec qui il entame sa deuxième saison. Entre eux, le courant est passé tout de suite. "Antoine, c'est un timide, raconte Julien Demois, qui avait atteint la 600e place à l'ATP avant de se tourner vers le coaching, sa vraie vocation. Il peut paraitre un peu brut, mais il faut le connaitre pour qu'il s'ouvre. Après, ça reste un enfant. Il a 14 ans, c'est un super gamin, bien élevé, et c'est un travailleur. Le temps passe vite avec lui."

En construction dans son jeu, son corps, sa tête

A terme, son gros axe de travail tient à la dimension physique. Il a énormément grandi ces derniers mois. Si vite que sa taille précise devient compliquée à suivre. "Il doit être à 1,85m si je ne me trompe pas", avance son entraîneur. "Je crois que je dois faire 1,83", souffle, pas trop convaincu non plus, l'intéressé. Une chose est sûre, pour son âge, il est grand.
Avec son côté grande gigue, très grand très sec, il ressemble d'ailleurs un peu au Medvedev sorti de l'adolescence. "Mais, reprend son coach, il est sous les 60 kilos, donc il a un vrai déficit de musculature. Niveau tennis, il est, entre guillemets, hors normes, mais physiquement, il a besoin de temps. On fait beaucoup de préventions, de renforcements, on ne cherche pas à en faire une bête et à 14 ans, il faut faire attention. On ne lui met pas des barres de 100 kilos. Il faut qu'il s'étoffe sans se blesser."
Comme tous les joueurs de son âge, Antoine Ghibaudo est en pleine construction. Dans son jeu, dans son corps, dans sa tête. Rien de ce qu'il accomplit aujourd'hui ne constitue la moindre garantie pour l'avenir. Mais le désir est un préalable indispensable, à défaut d'être toujours suffisant. Aujourd'hui, celui qui s'avoue très inspiré par le jeu de Novak Djokovic, parce qu'il est celui dont il se rapproche tennistiquement le plus, a un rêve. Croiser, un jour, des Medvedev, autrement que pour taper la balle dans une séance d'entraînement.
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