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Clément-Grosjean, le plus grand duel franco-français en Grand Chelem ? Notre Top 10

Laurent Vergne

Mis à jour 26/01/2021 à 17:20 GMT+1

Il y a vingt ans, jour pour jour, Arnaud Clément et Sébastien Grosjean disputaient une épique demi-finale à Melbourne. Ce n'était que la 2e fois dans l'ère Open qu'une demi-finale 100% française survenait chez les hommes en Grand Chelem. Où se situe ce duel dans l'histoire des matches franco-français depuis 1968 sur les plus grandes scènes ? C'est simple. Tout en haut.

Arnaud Clément et Sébastien Grosjean, Open d'Australie 2001.

Crédit: Getty Images

1. CLEMENT-GROSJEAN, LA RÉVOLUTION DE MELBOURNE

Année: 2001
Tournoi: Australie
Tour: Demi-finale
Vainqueur: Clément (5-7, 2-6, 7-6, 7-5, 6-2)
Sébastien Grosjean face à Arnaud Clément est LE match entre Français le plus marquant de l'ère Open. Déjà en raison du stade de la compétition où cette rencontre s’est jouée. Une demi-finale de Grand Chelem opposant deux Tricolores est suffisamment rare pour ne pas être historique. Ensuite à cause d’un scenario digne des plus grands films à suspense. Loin du public français, les deux compères se sont livré une bataille de plus de quatre heures pour savoir qui serait le premier Français depuis Jean Borotra en 1928 à atteindre la finale en Australie.
Nous sommes le 26 janvier 2001. Grosjean et Clément sont dans le Top 20 mondial et les numéros deux et trois nationaux derrière Cédric Pioline. De la même génération, ils se connaissent parfaitement et sont même des amis dans la vie. Tous les deux vivent une trajectoire à peu près similaire sur le circuit ATP après avoir ouvert leur palmarès l'année précédente à Nottingham pour le Marseillais et à Lyon pour l’Aixois. Et en jouant leur première demi-finale de Grand Chelem l’un contre l’autre à Melbourne. Un crève-cœur.
Pour l’anecdote, Grosjean a gagné son billet en éliminant un futur vainqueur au troisième tour, Thomas Johansson, puis Magnus Norman, alors N.4 mondial, en huitième de finale, et Carlos Moya en quart. De son côté, Clément domine un certain Roger Federer au troisième tour, avant de battre Greg Rusedski en huitième et surtout Yevgeny Kafelnikov, alors 5e mondial, en quart. Sous le toit de la Rod Laver Arena en raison de la pluie qui menace, c’est Grosjean qui prend l’avantage en empochant les deux premières manches. Sa victoire se dessine d’autant plus qu’il réussit le break d’entrée de troisième acte. Mais à 5-4, Clément sauve deux balles de match sur le service de son pote et arrache finalement le troisième set au jeu décisif. La rencontre a définitivement tourné.
Dans ce match plein d’émotions, Grosjean devient fébrile au fur et à mesure que Clément lâche de plus en plus ses coups. L'Aixois arrache le 4e set 7-5. Et c’est le moment où le Marseillais voit ce match qui lui tendait les bras lui échapper pour de bon. Il sauvera tout de même à son tour quatre balles de match, avant que son adversaire ne l’emporte sur sa 5e occasion. Clément contient sa joie devant son ami. Rincé, il perdra la finale deux jours plus tard face à Andre Agassi. Grosjean, lui, ratera l’une de ses plus belles occasions de jouer une finale majeure dans ce qui restera la meilleure saison de sa carrière.
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Clément-Grosjean 2001 : les meilleurs moments de la demi-finale

2. LECONTE - NOAH, ROYAL DUEL D'ATTAQUANTS

Année : 1985
Tournoi : Roland-Garros
Tour : Huitième de finale
Vainqueur: Leconte (6-3, 6-4, 6-7, 4-6, 6-2)
Le duel tricolore le plus prenant de l'ère Open à Roland-Garros. Nous sommes deux ans après la victoire de Yannick Noah, lequel compte toujours parmi les prétendants au titre. Depuis le tirage au sort, qui programme leur rendez-vous en huitièmes de finale, tout Paris attend son duel face à Henri Leconte qui, à moins de 22 ans, explose en cette saison 1985. Par un dimanche inondé de soleil, le public du Central, forcément partagé, va vibrer pendant cinq sets.
Leconte réussit une entame de match tonitruante. Son jeu d'attaquant fait mouche mais, surtout, il surprend Noah par la qualité de son jeu de retour. Il remporte les deux premiers sets et Noah est au bord de la rupture. Mais il hausse son niveau de jeu pour arracher la 3e manche au tie-break. Sur la balle de set, magnifique, Leconte finit le nez dans la poussière. En début de 4e set, Leconte écope d'un point de pénalité pour avoir pris trop de temps au service. Il se met en colère. Noah, lui, est consterné. Il demande à l'arbitre de revenir sur sa décision. Celui-ci refuse. Alors Yannick laisse passer la première balle de Leconte. Entre ces deux-là, pas question d'embrouille.
A l'énergie, Noah recolle à deux sets partout mais Leconte, plus frais, fait main basse sur le dernier set avec un double break. Leconte raconte : "Je mène deux sets à rien, il revient à deux sets partout. Je le vois venir au filet serrer le poing en criant "Come on", avec des yeux comme s'il allait me tuer ! C'est humain, c'est normal, mais je me souviens de ce moment là qui est fort. Mais j'ai "re-accéléré" et gagné au 5e."
Leconte signe sa première victoire sur Noah en quatre confrontations, et atteint pour la première fois les quarts en Grand Chelem. Il s'inclinera en quatre sets contre Wilander. Noah, lui, est absent des quarts à Paris pour la première fois depuis 1980. Reste l'image d'un formidable duel d'attaquants, comme la terre battue parisienne n'en a plus connu beaucoup par la suite. Surtout à ce niveau.

3. SANTORO - CLEMENT, LE JOUR LE PLUS LONG

Année: 2004
Tournoi: Roland-Garros
Tour: 1er tour
Vainqueur: Santoro (6-4, 6-3, 6-7, 3-6, 16-14)
393 minutes ou 6h33. Voici le marathon dans lequel se sont embarqués Arnaud Clément et Fabrice Santoro au premier tour de Roland-Garros ce 25 mai 2004. Enfin le 25 et le 26 car cette rencontre a été tellement longue, que celle-ci n’a pu se finir que le lendemain.
Ce match est resté pendant six ans le match le plus long de l’histoire du tennis, ce qui ne rendait pas peu fier son vainqueur, Fabrice Santoro, avant que Isner-Mahut ne détrône ce match à l’été 2010. Pour le plus grand soulagement d'Arnaud Clément, lassé qu'on lui rappelle son implication dans ce match alors historique par sa durée : "Le record, je m'en fous. C'est sur deux jours, ça ne compte pas. Et puis, on gagne, quoi, une médaille ?" Avant eux, il fallait remonter à un duel entre McEnroe et Wilander en 1982 en Coupe Davis (9-7, 6-2, 15-17, 3-6, 8-6) pour assister à un match aussi long.
Clément et Santoro s'apprécient modérément.Contrairement au Clément-Grosjean qui a ouvert ce Top 10, ce match-là se joue dans une froide ambiance, teintée de Coupe Davis, où les deux joueurs mènent une autre guerre pour être sélectionné en simple avec Sébastien Grosjean afin de disputer une demi-finale face à l’Espagne.
Le début de partie annonce une domination de Santoro qui remporte les deux premiers sets. Son adversaire se lance alors dans la bataille pour arracher un 5e set qui ne se conclura que le lendemain 16 sets à 14 ! L’atmosphère devient irrespirable après deux balles de match gâchées par Santoro. Clément débreake une fois à 12-12 tandis que Santoro servait pour le match, avant de lâcher son service une seconde fois à 14-15. La fois de trop.

4. FORGET - LECONTE, UN MOIS APRÈS LYON

Année : 1992
Tournoi : Australie
Tour : 1er tour
Vainqueur : Forget (2-6, 6-4, 6-7, 6-4, 6-3)
Le duel le plus émouvant. Le plus cruel, aussi. Un mois plus tôt, Guy Forget et Henri Leconte ont vécu une exceptionnelle aventure collective en remportant la finale de la Coupe Davis, à Lyon, contre les Etats-Unis. Le plus grand moment de leur carrière. Sportivement mais, plus encore, émotionnellement. Lorsqu'ils repartent en campagne en janvier 1992, ils n'imaginent pas que le sort va leur jouer un drôle de tour en les mettant face à face dès le premier tour de l'Open d'Australie. Guy et Henri n'en croient pas leurs yeux.
Leconte, même s'il a joué comme un dieu à Lyon, navigue toujours largement au-delà de la 100e place à l'ATP. Il s'exposait à un tirage difficile. Il a fallu que ça tombe sur Forget. Eux, adversaires, si tôt, si vite après Lyon? C'est probablement la dernière chose dont ils ont envie. Bien sûr, en Grand Chelem, il faut savoir mettre l'amitié de côté. Mais les émotions de Lyon sont encore trop présentes. Ce match, ils vont le jouer, mais à contre-cœur.
Sous le cagnard australien, on se demande si Leconte saura prolonger la magie de Gerland, où il marchait sur l'eau ou si, sorti du contexte si spécial de la Coupe Davis, Forget va faire prévaloir son statut, celui d'un joueur solidement ancré dans les dix premiers mondiaux. Ils offrent en tout cas un match de qualité. Leconte mène un set à rien, puis deux manches à une. Mais Forget va l'avoir à l'usure.
Henri n'a plus joué de match en cinq sets depuis plusieurs mois. Dans la dernière manche, après quasiment quatre heures de match, il peine à masquer son épuisement sous sa casquette vissée à l'envers. Sur la balle de match, Forget esquisse un sourire mais ne manifeste pas vraiment sa joie, qui n'en est d'ailleurs pas une. Leconte, qui a déjà passé le filet, l'attend pour l'accolade, évidemment chaleureuse. Drôle de premier tour qu'ils avaient joué là. Drôle de tour que leur avait joué Melbourne.

5. FORGET-NOAH, LA FIN DU COMPLEXE DE GUY

Année : 1987
Tournoi : Wimbledon
Tour : 2e tour
Vainqueur : Forget (3-6, 7-6, 4-6, 6-4, 9-7)
Yannick Noah a toujours détesté Wimbledon. Drôle de paradoxe. Lui l'attaquant, le serveur-volleyeur, porté naturellement vers l'avant, aurait dû s'épanouir sur herbe. Mais il n'a jamais réussi à y mettre un pied devant l'autre. Durant sa carrière, en sept participations, il n'aura jamais dépassé le 3e tour. Pourtant, en cet été 1987, après un Roland-Garros qui l'a rassuré (il a atteint les quarts de finale), Noah a décidé de tout mettre en œuvre pour bien figurer à Wimbledon.
Au 2e tour, il est opposé à Guy Forget. Les deux hommes se connaissent pas cœur. Ils sont d'ailleurs partenaires de double à cette époque. Forget, 22 ans, peine à laisser éclore son talent. Numéro un mondial en double, il navigue autour de la 50e place en simple. Difficile pour lui d'émerger dans l'ombre des deux stars que sont Noah et Leconte, aux CV imposants et aux personnalités si charismatiques. Forget le discret n'a pas encore le cuir assez trempé pour taper du poing sur la table et se faire une place.
Ce match, Noah va longtemps le maitriser. Il remporte le 1er set et sert pour mener deux manches à rien. Il s'offre deux balles de set mais Forget s'accroche, revient et remporte la deuxième manche au tie-break. Le vrai match débute. Forget va le remporter, 9-7 au 5e set. Un moment important dans la carrière des deux hommes. Cette victoire, c'est la fin d'un complexe pour Forget. Le début d'un processus qui le mènera jusqu'à la quatrième place mondiale en 1991.
Pour Noah, c'est la certitude que, décidément, Wimbledon ne lui vaut rien. "Pourtant, explique-t-il, j'avais vraiment envie de faire un truc. C'était l'année ou jamais pour moi ici". Ce sera jamais. "Je n'ai pas perdu contre un pote ou contre mon partenaire de double. J'ai perdu contre un super joueur qui s'appelle Guy Forget", dit Noah. Une belle façon d'adouber son jeune bourreau, lassé de jouer les victimes.

6. NOAH - ROGER-VASSELIN, LE CRÈVE-COEUR

Année : 1983
Tournoi : Roland-Garros
Tour : Demi-finale
Vainqueur : Noah (6-3, 6-0, 6-0)
En lui-même, ce match ne présente guère d'intérêt. De match, il n'y a d'ailleurs pas eu. Rarement une demi-finale majeure aura été aussi disproportionnée. Tétanisé, Roger-Vasselin, tombeur de Connors au tour précédent (juste avant que Noah ne batte Lendl dans une des journées les plus glorieuses du tennis français à Roland-Garros), ne parvient pas à offrir une vraie réplique à un Noah lancé comme une fusée vers le rêve de sa vie. Si ce match a toute sa place ici, c'est pour sa portée historique. Un match 100% tricolore avec au bout un ticket pour la finale à Paris, c'était du jamais vu depuis les Mousquetaires.

7. MONFILS - POUILLE, LE DERNIER "CHOC"

Année : 2016
Tournoi: US Open
Tour : Quart de finale
Vainqueur : Monfils (6-4, 6-3, 6-3)
Dans l'ère Open, il n'y a eu que quatre duels franco-français à partir des quarts de finale en Grand Chelem. Deux en demi-finales, deux autres en quarts. C'est extrêmement peu. A titre de comparaison, il y en a eu plus de trente entre Espagnols, rien que sur les vingt dernières années. Ces moments-là sont donc suffisamment rare pour que de tels chocs constituent un évènement à l'échelle du tennis tricolore.
La dernière fois, c'était à l'US Open, en 2016. Gaël Monfils vit sa meilleure saison, qu'il achèvera à la 6e place mondiale. A Flushing, il tient son rang. Lucas Pouille, lui, émerge. Quart de finaliste à Wimbledon, il remet ça à New York avec, en huitièmes, ce qui reste la plus grande victoire de sa carrière : un duel épique remporté 7-6 au 5e set contre Rafael Nadal. Mais face à Monfils, le jeune Pouille n'a plus rien à donner, ni dans les jambes ni dans la tête. Le match n'en est pas vraiment un et l'issue ne fait jamais de doute. Pouille fait illusion un demi-set puis, à 3-3, cède pour la première fois son service. Il ne s'en remettra jamais vraiment.

8. GOVEN - JAUFFRET, LES PIONNIERS

Année: 1970
Tournoi: Roland-Garros
Tour: Quart de finale
Vainqueur: Goven (8-6, 6-8, 6-2, 6-1)
Le premier grand duel français de l'ère Open. Georges Goven et François Jauffret sont donc en quelque sorte des pionniers, qui n'ont pas connu beaucoup de successeurs. En 1970, ils s'affrontent en quarts de finale sur le central de Roland-Garros. Goven 22 ans, la valeur montante. Jauffret est son ainé de six ans. Entre eux, le combat est d'abord acharné, puis à sens unique. Il n'y a pas encore de tie-break à l'époque et les deux premiers sets s'achèvent sur le score de 8-6. Ensuite, Goven déroule pour s'envoler dans les deux dernières manches. Il ratera la chance de sa vie dans ce tournoi. En demi-finales, il s'incline contre Jan Kodes, futur vainqueur, en cinq sets.

9. SIMON - MONFILS, L'INCROYABLE MARATHON

Année : 2013
Tournoi : Open d’Australie
Tour : Troisième tour
Vainqueur : Simon (6-4, 6-4, 4-6, 1-6, 8-6)
Ce ne fut pas leur plus belle confrontation, mais certainement la plus éreintante. Gilles Simon et Gaël Monfils ont été au bout d’eux-mêmes lors de ce huitième de finale. Un match de plus de 4h40 avec une victoire de Simon incapable d’assurer sa conférence de presse d’après-match et raccompagné tard dans la nuit par les pompiers australiens.
Touchés tous les deux physiquement, les compères se lancent dans de longs rallyes, dont un atteint les 71 coups (vidéo ci-dessous) ! Si le niveau n’est pas exceptionnel, le combat est exemplaire. Dans les cordes, Monfils parvient tout de même à remonter deux sets de retard pour emmener le Niçois dans un 5e set qui se conclura 8-6 et dans les bras l’un de l’autre.

10. PAIRE - HERBERT

Année : 2019
Tournoi : Roland-Garros
Tour : 2e tour
Vainqueur : Paire (6-2, 6-2, 5-7, 6-7, 11-9)
4h33. 11-9 au 5e set. Une balle de match à la nuit tombante. Voilà comment on pourrait résumer ce 2e tour entre Benoît Paire et Pierre-Hugues Herbert en 2019. Sur le court Suzanne-Lenglen, Paire aurait pourtant pu et dû s'imposer beaucoup plus tranquillement après avoir compté deux sets et un break d'avance face à un adversaire visiblement diminué physiquement.
Puis, au moment de servir pour le match à 5-4, l’Avignonnais coince : deux fautes en coup droit, une double faute, un smash raté. "Pendant deux sets, je joue l'un des meilleurs tennis de ma vie. C'est mon pote, je le vois un peu diminué, c'est là que ma concentration saute un petit peu", dira Paire.
Le début d'un nouveau match, éreintant à jouer et même à regarder, mais haletant jusqu'au bout. Pierre-Hugues Herbert sauve une balle de match dans le tie-break du 4e set. Puis il a par deux fois un break d'avance dans la dernière manche. Dans ce set final ("un set de malades", dixit P2H), le spectacle est délirant. Des points d'anthologie, des crampes, des amorties dans tous les sens, des montées à contre-temps. Benoît Paire finit par s'en sortir. Mais les deux ont des souvenirs pour la vie sur ce match.
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