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Super Saturday, Graf-Seles, Sampras... Les 5 moments qui ont fait la légende du Louis-Armstrong

Laurent Vergne

Mis à jour 22/11/2016 à 15:24 GMT+1

US OPEN - Le court Louis-Armstrong n'est plus. Démoli et bientôt remplacé par un nouveau stade tout neuf, celui qui fut jadis le plus grand court du monde laisse derrière lui quelques extraordinaires moments de tennis. En voici cinq, parmi d'autres.

Le court Louis-Armstrong

Crédit: Panoramic

5. Sampras, vomissements et victoire

Ce n'est qu'un quart de finale. Mais il a fait beaucoup pour la perception du public de ce champion hors normes qu'était Pete Sampras mais auquel on a parfois reproché son côté un peu trop lisse. Ce match, c'est une double victoire : sur un Alex Corretja immense, mais peut-être plus encore sur lui-même, tant il a su repousser son propre seuil de tolérance à la souffrance. A cette époque, Corretja est d'abord, et même presque exclusivement, un joueur de terre battue. Avant cet US Open, l'Espagnol n'avait d'ailleurs jamais passé le deuxième tour ailleurs qu'à Roland-Garros. Mais Corretja est transfiguré. Il livre le match de sa vie, hissant son niveau de jeu à la hauteur de son prestigieux adversaire et parfois même au-dessus.
Dans le 5e set, à 1-1, Sampras erre au fond du court. D'un seul coup, il se met à vomir. Plusieurs fois. Pendant une trentaine de secondes. Pendant ce temps, Corretja ajuste son cordage, se demandant sans doute si son adversaire va abandonner. Mais non, le match reprend, presque comme si de rien n'était. A partir de là, à chaque point, Sampras, agonisant, se plie en deux, les mains sur les genoux. Il s'imposera finalement 9 points à 7 dans le tie-break décisif, avec deux derniers points aussi terribles qu'inoubliables : un ace sur deuxième balle de Sampras à 7-7, puis une double faute de Corretja sur la balle de match…

4. Graf-Seles, les retrouvailles

Il y a des matches de légende qui viennent de loin. Et qui vous transportent plus loin encore. Lorsque Steffi Graf et Monica Seles se retrouvent en finale de l'US Open en septembre 1995, c'est bien plus qu'un match de tennis qu'elles s'apprêtent à disputer. Monica Seles, absente des courts pendant 28 mois après le coup de poignard reçu à Hambourg au printemps 1993, vient de reprendre la compétition. Graf, elle, doit gérer une autre forme de difficulté : Peter, son père, qui est aussi son manager, est en prison à Mannheim. On le soupçonne de fraude fiscale et les rumeurs les plus folles ont circulé sur une possible implication de sa championne de fille. Elle est soudain assise sur un empire de 125 millions de dollars qui menace de s'effondrer.
Parce qu'il ne peut en être autrement, la finale va tenir ses promesses. Graf n'a perdu qu'un seul match sur 41 au cours de l'année 1995. Seles, elle, n'a pas perdu un set en 11 matches depuis son retour. La première manche, magnifique, s'achève au tie-break, en faveur de l'Allemande. Alors que Graf connait un gros coup de moins bien, Seles lui inflige un 6-0 dans le deuxième set. Mais l'Allemande, en immense championne, va survivre à cet affront. Un break dans le quatrième jeu du dernier set lui donne un ascendant décisif. Après 1h52 de combat, elle remporte le match le plus attendu de la décennie. Mais ce soir-là, il n'y a que des gagnantes. Car comment considérer la défaite de Seles comme un échec ? Son tournoi, et plus encore son match contre Graf, lui donnent raison. "Je sais maintenant que j'ai fait le bon choix en revenant, estime-t-elle. Je fais à nouveau ce que j'aime et je peux regarder devant moi." Quatre mois plus tard, elle remportera l'Open d'Australie.

3. 1991 : Happy birthday Jimbo !

Quelle épopée que cet US Open 1991 de Jimmy Connors. Papy Jimbo, retombé aux oubliettes du classement ATP, jugé bon pour la casse par beaucoup du fait de ses problèmes physiques à répétition, vit un tournoi d'anthologie qui le mènera jusqu'en demi-finales. "Ce sont les onze meilleurs jours de ma carrière, assure l'ancien numéro un mondial. Meilleurs que mes titres. Il n'y a même pas photo. Je n'échangerais pas une seule seconde ce que j'ai vécu dans ce tournoi contre tous les titres du monde."
Miraculé au premier tour contre Patrick McEnroe, le frère de John (qui a mené deux sets à rien, 3-0 et 0-40 sur le service de Connors), l'idole de Flushing livre surtout un combat épique en huitièmes contre Aaron Krickstein. Ce 2 septembre 1991, Connors fête ses 39 ans et le public du Louis-Armstrong va le porter comme jamais dans ce duel 100% américain où Krickstein est pourtant traité comme un étranger. Ce match, c'est un roman, tumultueux, cruel et magnifique. L'altercation de Connors avec l'arbitre (plus jeune que lui) à la fin du deuxième set, est passée à la postérité. Le cinquième set aussi.
Mené 5-2, Connors revient, tel un lion, pour achever sa proie dans le tie-break. "J'étais le gibier, il était le chasseur", dira Krickstein, qui ne se relèvera jamais tout à fait de cette terrible épreuve. Vainqueur après 4h42 de combat, Jimbo le héros reçoit l'ovation de la foule en délire qui entonne un vibrant "Happy birthday". Pour saisir tout le sel de ce moment, il faut revoir le documentaire d'ESPN, intitulé "This is what they want" (C'est ce qu'ils veulent), soit la phrase lâchée par Connors, face caméra, juste avant le dernier jeu décisif. Oui, c'est cela qu'ils (les spectateurs) voulaient. Un show à la Jimbo. Et Jimbo leur a donné. Jusqu'au bout.

2. 1980 : McEnroe-Connors, l'inégalable rivalité

Personne n'a mieux incarné l'esprit de Flushing Meadows que John McEnroe et Jimmy Connors. Mac, le pur new-yorkais, pourtant jamais vraiment adopté par la foule de l'US Open. Jimbo, le natif de l'Illinois, devenu la vraie superstar et le vrai chouchou de la foule de Big Apple. Leurs quatre duels à Flushing (1978, 1979, 1980, 1984), quatre demi-finales, ont donné son âme au nouveau théâtre de l'US Open, qui s'était installé à Flushing Meadows en 1978. Leur troisième affrontement, en 1980, demeure le plus célèbre. Le plus époustouflant, aussi, sans doute, avec son scénario à rebondissements multiples.
John McEnroe, parti fort, obtient une balle de deux sets à rien, avant de voir la foudre Connors lui tomber dessus : 11 jeux de suite pour l'ainé des deux gauchers. A la fin de sa folle cavalcade, Jimbo mène deux manches à une et 2-0 dans le quatrième, puis 3-1. Mais là, c'est McEnroe qui va trouver les ressources pour revenir dans la partie, jusqu'à se retrouver à deux points de la finale sur son service, à 5-4, dans le cinquième et dernier set. Un dernier rush de Connors va lui permettre de débreaker et, comme tant de matches immenses à Flushing, c'est au tie-break que cette affaire se règle.
Dans une ambiance proche du délire sur le Louis-Armstrong, Mac, pourtant tiraillé par des crampes, gère mieux ce tout dernier acte. La poignée de mains entre les deux champions est aussi froide que leur affrontement a été bouillant. Il y a eu beaucoup de rivalités mémorables à Flushing, de Navratilova-Evert à Sampras-Agassi, de Borg-McEnroe à Lendl-Wilander, et bien d'autres encore. Mais aucune n'a jamais atteint l'intensité des quatre matches joués sur le court Louis-Armstrong par Connors et McEnroe.

1. 1984 : Super Saturday, le jour le plus long

Si le duel McEnroe-Connors de 1980 reste sans doute le match le plus marquant de tous, l'intensité émotionnelle et qualitative du "Super Saturday" de 1984 demeure inégalable. Trois matches. Trois monuments. Une journée débutée à 11h07 le matin, avec en guise de préambule la finale du tournoi Seniors entre John Newcombe et Stan Smith, qui s'achèvera à... 23h16. Deux demi-finales masculines en cinq sets et sous haute tension, qui verront notamment Ivan Lendl et Pat Cash à deux doigts d'en venir aux mains avant la victoire du Tchécoslovaque (7-6 au dernier set), non sans avoir sauvé une balle de match d'un lob improbable et écœurant pour le jeune Australien. Cash écopera de 2000 dollars d'amende pour avoir jeté sa raquette de rage dans le public après le match.
John McEnroe, lui, viendra à bout de son meilleur ennemi Jimmy Connors, alors double tenant du titre, également au bout du suspense (6-4, 4-6, 7-5, 4-6, 6-3). Entre ces deux joutes viriles, une finale dames époustouflante entre les deux reines, Martina Navratilova et Chris Evert. Leur 61e affrontement. Navratilova, en route pour sa plus extraordinaire saison, signe sa 13e victoire de suite contre Chrissie, non sans mal (4-6, 6-4, 6-4). Mais Evert n'a jamais oublié la standing ovation du public du Louis-Armstrong à la fin du premier set, qu'elle venait de remporter après avoir compté un break de retard. Un des nombreux temps forts d'une journée hors normes non seulement dans l'histoire du tournoi, mais aussi celle du tennis.
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