Serena Williams, patronne de la WTA malgré tout

Serena Williams a marqué la saison 2012 de son empreinte. A tel point que l'Américaine a été désignée la joueuse de l'année pour la WTA et l'ITF. Et pourtant, elle n'est que troisième mondiale. Comme Petra Kvitova l'an passé, récompensée elle aussi par la Fédération Internationale sans être au top du classement WTA, la cadette des soeurs Williams a tout emporté sur son passage entre Wimbledon et le Masters, glanant deux nouveaux trophées du Grand Chelem, le titre olympique et les WTA Championships. Pourtant trônent devant elle Victoria Azarenka et Maria Sharapova. La Bélarusse, vainqueur à l'Open d'Australie, termine la saison au sommet du classement WTA pour la première fois de sa carrière, devant la lauréate de Roland-Garros, et donc Serena Williams. Une incohérence selon Patrick Mouratoglou, l'entraîneur de l'Américaine depuis cet été.

"Objectivement, c’est difficile de dire qu’elle n’est pas la meilleure joueuse de la saison avec les trophées qu'elle a remportés cette année, souligne son coach. La WTA et l’ITF ne s’y sont pas trompées. Face aux numéros un et deux mondiales, elle est restée invaincue cette saison : elle a joué cinq fois contre Azarenka avec cinq victoires à la clé ettrois fois face à Maria Sharapova pour autant de succès. Il est juste regrettable que le classement WTA ne reflète pas cette domination." Il est tout de même à noter que Serena réalise la plus belle progression du Top 10 féminin en passant de la douzième place mondiale fin 2011 à la troisième un an plus tard.

Ceci dit, avec un tel palmarès sur une saison, comment se fait-il que Serena Williams ne siège pas officiellement au sommet de la hiérarchie mondiale ? En 2012, l'Américaine a connu deux périodes. Une quasi-parfaite de juillet à octobre avec 31 victoires en 32 matches. Et une autre moins reluisante de janvier à juin, avec tout de même 23 succès en 28 matches (hors Fed Cup) mais deux défaites en Grand Chelem en huitième de finale à Melbourne et surtout au premier tour de Roland-Garros. Deux revers qui, au final, lui coûtent cher, plus que ses sept titres remportés en 2012, soit un de plus qu'Azarenka (6) et quatre de plus que Sharapova (3). "Incontestablement, les six premiers mois de la saison n’ont pas été bons, juge Mouratoglou, elle a raté les deux premiers rendez-vous du Grand Chelem. Et, de plus, elle a manqué le rendez-vous de Stuttgart sur la première partie de l'année. Mais en bilan de fin de saison, c’est elle qui gagne le plus grand nombre de titres majeurs."

Le barème de points WTA au classement récompense les joueuses régulières du circuit. C’est une réalité depuis longtemps. C’est comme cela que Caroline Wozniacki, vainqueur de tournois secondaires mais jamais de majeurs, est devenue numéro un mondiale, comme Dinara Safina ou encore Jelena Jankovic avant elle, à ceci près que la Danoise a fini 2010 et 2011 au top du classement féminin. "Il faut reconnaître qu’Azarenka a fait une énorme saison, relativise Mouratoglou. Elle a été régulière toute l’année. Elle a énormément progressé et a couronné cela par le gain de son premier titre du Grand Chelem en début de saison. 2012 a aussi été la saison de la Bélarusse."

C'est non seulement sa régularité sur l'année, mais également sa progression en Grand Chelem qui ont été récompensées. Azarenka a été bien meilleure en 2012 qu’en 2011 : elle a remporté l'Open d'Australie, après avoir chuté en huitième de finale en 2011, et au-delà des cinq titres qu'elle remporte en 2012, elle s'est hissée en finale de l'US Open, après avoir été éliminée dès le troisième tour l'an passé. "La question que l'on peut se poser serait la suivante, argumente encore Mouratoglou : quelle est la différence entre une joueuse qui fait demie ou finale d’un majeur et celle qui remporte le titre ? Trop peu de points au final (900 points sont accordés pour une demi-finale majeure, 1400 en finale et 2000 pour la vainqueur, NDLR). C’est sur ce point précis que je conteste le calcul de points du classement WTA. Quand on remporte un titre du Grand Chelem, on marque l’histoire, donc on devrait avoir beaucoup plus de points que les autres joueuses qui ne vont pas au bout."

Sur le circuit depuis septembre 1995, Serena Williams a déjà occupé la place de numéro un mondiale pendant 123 semaines (non consécutives depuis le 8 juillet 2002), ce qui fait d'elle la sixième joueuse de l'histoire à ce degré de longévité. Ce n'est plus un objectif à proprement parler, comme cela pourrait l'être pour ses jeunes adversaires. "Serena a 31 ans, ce n’est plus une fin en soi, confirme son coach. Son objectif principal est surtout de remporter des titres majeurs. La place de numéro un récompensera cela. Si elle brille en 2013 dans les six premiers mois de l’année, Serena le redeviendra. Si Azarenka fait mieux, elle le restera et cela montrera un peu plus qu’elle est légitime à ce poste."

La différence se faisant finalement sur les petits tournois, sera-t-elle présente sur des tournois plus mineurs ? La réponse ne peut être que négative. "En 2013, elle fera comme en 2012. Elle a joué quinze tournois, c’est moins que d’autres assurément, mais elle n’a plus besoin de jouer de tournois de moindre importance pour développer son tennis. A 31 ans, on ne voit plus le circuit comme celles qui ont 22-23 ans.Sa priorité étant de briller sur les tournois les plus importants, elle devra rester en bonne santé et garder sa motivation intacte..." Et de confirmer que tant qu'elle sera sur le circuit, c'est bien elle la patronne, et personne d'autre.