Les marchands de rêves

Beaucoup, dans le sport, et parfois même jusque dans les médias, s'arrogent le droit de s'autoproclamer "Dream Team". On entend souvent cette dénomination. Il est bon de rappeler qu'il n'y a jamais eu et qu'il n'y aura jamais qu'une seule Dream Team. Elle a brillé de mille feux lors des Jeux Olympiques de Barcelone et a changé pour beaucoup le rapport au basketball. Cette équipe, c'était la sélection américaine. Elle était si spéciale que, dans son intégralité, en tant que concept en quelque sorte, elle vient d'être élue au Hall of Fame.

La cuvée 2010 a d'ailleurs mis en valeur les vertus collectives puisque, outre l'équipe de Barcelone, une autre sélection médaillée d'or a fait son entrée au Panthéon du basket américain. Il s'agit de celle sacrée en 1960 à Rome, avec en son sein des joueurs comme Jerry West, Jerry Lucas ou Oscar Robertson. Mais le clou de la soirée fut bien l'intronisation de la Dream Team dans son ensemble. Voir ces 12 joueurs (disons 11 tant il est difficile de placer Chris Laettner sur le même plan que ses 11 compères...) réunis sur une même photo a permis de faire un voyage de 18 années en arrière. Un voyage en pleine rêve.

Jamais une équipe n'avait réuni autant de stars et autant de talents sur un même parquet. Elle réunissait quelques-uns des plus grands joueurs de l'histoire, de Michael Jordan à Larry Bird, de Magic Johnson à Patrick Ewing, de John Stockton à Clyde Drexler en passant par Charles Barkley. Ce dernier a rappelé que jamais il n'avait pris autant de plaisir sur un terrain qu'au cours de cet été 92. Et dire que Bird, dont ce fut les derniers instants en tant que joueur, ne voulait pas venir. "Il a fallu que je lui botte les fesses pour qu'il vienne, rigole Magic. Je lui ai dit qu'on devait faire ce tournoi ensemble. Après avoir été si longtemps rivaux, je rêvais de le voir sur le terrain à côté de moi." Un rêve communicatif. Et voilà comme la légende des Lakers et celle des Celtics se retrouvèrent à donner du rêve en compagnie de Jordan et les autres.

Outre cette intronisation collective, deux membres de cette équipe ont fait leur entrée à titre individuelle au Hall of Fame. Il s'agit de Karl Malone et Scottie Pippen. Des sanglots dans la voix, Malone a remercié sa mère, décédée il y a sept ans. "Je suis ici grâce à elle", a-t-il confié. Il a également eu un mot pour Larry Miller, l'ancien propriétaire du Utah Jazz, qui a "toujours cru" en lui. Deux fois MVP de la Ligue et deuxième meilleur marqueur de l'histoire de la NBA, Malone a été intronisé quelques minutes après Scottie Pippen. L'inégalable lieutenant de Michael Jordan n'a jamais été MVP, mais il a conquis six titres avec les Bulls entre 1991 et 1998. S'il n'aurait jamais eu ce palmarès sans MJ, l'inverse est tout aussi vrai. Mais Pippen a évidemment rendu hommage à Jordan dans son discours. "Michael a touché la vie de beaucoup de gens, mais il a surtout changé la mienne, a-t-il dit. Qui aurait dit que ce numéro 23 serait là aujourd'hui pour assister à mon entrée au Hall of Fame, 23 ans après le début de ma carrière?"

Avec les entrées de Malone et Pippen, ce sont désormais 10 des 12 membres de la Dream team de 1992 qui sont au Hall of Fame. "Je crois que ça doit vouloir dire que nous étions une bonne petite équipe", sourit Charles Barkley. On va dire ça comme ça, Sir Charles.

LA DREAM TEAM DE 1992
Meneurs: Magic Johnson (LA Lakers), John Stockton (Utah)
Arrières: Michael Jordan (Chicago), Clyde Drexler (Portland)
Ailiers: Larry Bird (Boston), Scottie Pippen (Chicago), Chris Mullin (Golden State)
Ailiers-forts: Karl Malone (Utah), Charles Barkley (Phoenix), Christian Laettner (Duke)
Pivots: David Robinson (San Antonio), Patrick Ewing (New York)

Entraineurs: Chuck Daly, Mike Krzyzewski, Lenny Wilkens, PJ Carlesimo

LE PARCOURS DE LA DREAM TEAM
Etats-Unis-Angola: 116-48
Etats-Unis-Croatie: 103-70
Etats-Unis-Allemagne: 111-68
Etats-Unis-Brésil: 127-83
Etats-Unis-Espagne: 122-81
Etats-Unis-Porto Rico: 115-77 (Quarts de finale)
Etats-Unis-Lituanie: 127-76 (Demi-finale)
Etats-Unis-Croatie: 117-85 (Finale)