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Le rose et le noir

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 10/05/2011 à 09:26 GMT+2

Parce qu'il a endossé le maillot rose en cette journée tragique, David Millar tiendra une place particulière lorsque le Giro repartira. Touché et touchant, il a eu des mots simples mais émouvants lundi soir après la mort de Wouter Weylandt. La couleur de son maillot lui semble bien dérisoire.

David Millar

Crédit: Imago

Pour lui, cela aurait dû être une journée magnifique. Même devancé sur la ligne d'arrivée par Angel Vicioso pour le gain de l'étape, David Millar a récupéré à Rapallo le maillot rose. Il avait déjà eu le jaune sur le Tour et l'or sur la Vuelta. Voilà qui complétait sa collection. Il aurait dû monter sur le podium, recevoir la bise des hôtesses, déboucher le champagne. Tout ce petit rituel qui fait le bonheur, parfois, des champions cyclistes. Mais rien de tout cela n'a plus de sens pour le Britannique, après la mort de Wouter Weylandt. Il n'y a pas eu de cérémonie protocolaire. Il n'y a pas eu de champagne, de bise. Pas de joie non plus. Juste la tristesse, l'amertume et la colère, celle d'avoir perdu un des siens.
A vrai dire, le maillot rose était le cadet de ses soucis lundi soir. David Millar est touché par la tragique disparition de Weylandt. Pour des raisons évidentes. Et d'autres, plus personnelles. D'abord parce que, au sein de son équipe, Garmin-Cervelo, se trouve un des amis les plus proches du Belge, Tyler Farrar. Lorsqu'il réside en Europe, le sprinter américain est basé à Gand, la ville natale de Weylandt. Les deux hommes s'entrainaient souvent ensemble. "Il était très proche de Wouter, explique l'Ecossais. Ils étaient presque comme des frères. C'était son frère européen. C'est horrible. Je suis un peu inquiet pour lui car il est encore jeune et très émotif." Lorsqu'il a appris la nouvelle de l'accident, juste après avoir franchi la ligne d'arrivée, Farrar, de rage, a balancé son vélo avant de partir.
"Que je porte le maillot ou pas, ça ne change rien pour moi"
Si David Millar est si fortement marqué, c'est aussi parce que la femme de Wouter Weylandt attend leur premier enfant. Or la femme de Millar, elle aussi, attend un heureux évènement. "Je l'ai eue au téléphone après la course, raconte l'ancien coureur de Cofidis. Elle était en larmes. Elle imaginait que ça aurait pu être moi à sa place. Je ne lui ai pas encore dit que, comme elle, la femme de Wouter est enceinte de cinq mois." Il ne peut s'empêcher, à son tour, de se mettre à la place de ceux qui, aujourd'hui, souffrent devant l'injustice qui leur a été faite. "J'essaie d'imaginer ce que je pourrais ressentir si la personne que j'aime le plus au monde partait dans de telles circonstances. J'essaie, mais je n'y arrive pas et, à vrai dire, je n'en ai pas envie. Ça a dû être affreux pour la famille de Wouter."
Avec une infinie délicatesse, il reste en retrait dans le registre de la douleur. "Pour nous, coureurs, dit-il, les prochains jours vont être très difficiles, parce qu'il est difficile de repartir après un tel drame. Mais pour la famille de Wouter, pour ses amis, c'est une perte pour l'éternité." Comme tous ses collègues, David Millar a pris lundi une gigantesque baffe en pleine figure. Elle fait très mal. "J'aime le cyclisme et j'ai toujours été enchanté par son côté épique, explique Millar. C'est pour ça que je suis tombé amoureux de ce sport quand j'étais gamin. Mais la mort de Wouter dépasse tout ce que notre sport est supposé être. En tant que sportifs, nous ne pensons pas à une telle extrémité. Nous vivons tous les jours avec ce danger, mais en réalité, nous n'en sommes pas du tout conscients. Ceci est un triste rappel pour nous, des risques que nous prenons et ce que la vie que nous menons."
Il n'a maintenant qu'une obsession. Rendre hommage à celui qui, lundi matin à Reggio Emilia, était encore là, bien vivant, avec eux. Mais il ne décidera pas seul. "Je vais discuter avec Tyler, avec les membres de l'équipe Leopard Trek et avec la famille de Wouter pour savoir ce qui est le mieux. Si je porte le maillot rose, ce sera pour lui rendre hommage. Il n'y a pas de célébration ou de joie, juste de la tristesse. Que je porte le maillot ou pas, ça ne change rien pour moi." A Rapallo, ce maillot lui a été remis dans l'aire d'arrivée, à la va-vite, en catimini. "Je l'ai essayé rapidement puis je l'ai enlevé et donné à quelqu'un de mon équipe." Pour David Millar, le rose s'est teinté de noir. La fête a tourné au deuil. Un homme est mort. Le reste n'a plus d'importance.
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