Le mystère Valverde

Aux deux tiers de cette campagne ardennaise, Alejandro Valverde est sans doute le grand perdant du printemps vallonné. Sur ce terrain où il a conquis quelques-unes des plus belles lignes de son enviable palmarès, le Murcien peine à peser sur les débats. Passe encore sa prestation moyenne sur l'Amstel Gold Race, dimanche dernier (22e). La course néerlandaise n'a jamais été celle où il s'exprime le mieux. En revanche, on l'attendait aux avant-postes dans le Mur de Huy mercredi. Mais Valverde, distancé dans la bosse finale, a fini cette Flèche Wallonne au-delà de la 40e place. Loin, très loin du vainqueur, Joaquim Rodriguez.

Rodriguez, son ancien lieutenant du temps de la Caisse d'Epargne, parti voler de ses propres ailes chez Katusha afin de sortir de l'ombre imposante de Valverde. Purito avait déçu lui aussi lors de l'Amstel, mais en remportant la Flèche Wallonne mercredi, il a rectifié le tir. Il ne reste plus que Liège-Bastogne-Liège à Valverde pour en faire de même. Le leader de Movistar a toujours adoré la Doyenne. C'est sa course. Vainqueur en 2006 et 2008, deuxième en 2007, il avait également fini troisième en 2010 avant de perdre le bénéfice de ce résultat à cause de sa suspension rétroactive. La question est de savoir s'il peut s'approcher de ses résultats passés à Liège, sachant que, pour l'instant, il vit ses pires ardennaises depuis son éclosion au plus haut niveau. Il n'avait ainsi jamais été en dehors du Top 10 dans l'Amstel et la Flèche la même année depuis sa première victoire majeure sur ce terrain, en 2006.

Chez Movistar, on refuse de tirer la sonnette d'alarme. "Il sera beaucoup mieux à Liège", avait assuré le staff de la formation espagnole après l'Amstel. Mais depuis, son piteux Mur de Huy a renforcé le doute à son sujet. Le plus intrigant, c'est qu'il est difficile de trouver des explications à ce coup de moins bien. Après un début de saison tonitruant, El Imbatido faisait presque figure d'épouvantail pour les Ardennaises. Certes, il a connu quelques soucis le mois dernier, avec une grippe à la sortie de Paris-Nice et cette chute sur le Tour de Catalogne. Des contretemps qui ont pesé sur sa préparation. Mais lors de sa dernière sortie avant les Ardennaises, sur la Klasika Primavera, Valverde avait rassuré en prenant la deuxième place. Il paraissait prêt pour frapper un grand coup.

Alors, chacun cherche LA raison. Valverde n'a plus l'habitude des courses de plus de 250 kilomètres, avancent certains. Briller sur le Tour Down Under et l'Amstel, ce n'est pas la même chose. Vrai, mais la Flèche est d'un format nettement plus réduit (moins de 200 kilomètres) et il n'a pas été davantage présent. D'autres évoquent une question de motivation profonde. Valverde lorgnerait le Tour, pas les classiques. Difficile à croire. "Ces classiques ont toujours été un objectif pour moi", avait-il d'ailleurs confié avant l'Amstel. Il est possible en revanche qu'il ait mal géré ses pics de forme. Au top dès la fin janvier, Valverde a voulu briller dès son retour, et cela se comprend. Peut-être le paie-t-il aujourd'hui.

Reste la question de son punch. Valverde aurait-il perdu l'essentiel de son jump lors de ses 18 mois passés loin du peloton? C'est une explication possible. Mais dans ce cas, Liège-Bastogne-Liège devrait mieux lui convenir. C'est moins une course de côtes que l'Amstel ou la Flèche, où tout se joue en force dans le Cauberg et le Mur de Huy. "Mes jambes ne tournent pas encore aussi bien que je le voudrais mais j'espère que ça ira mieux à Liège", a-t-il commenté sur Twitter. Lui-même ne semble pas trop savoir à quoi s'en tenir. La Doyenne de dimanche lui permettra d'être fixé pour de bon. Et nous avec lui.