Mourey puissance 5

"J'avais un plus gros développement", a expliqué le Franc-Comtois de la Française des Jeux pour expliquer sa nette supériorité au sprint face à Chainel, pourtant l'un des bons spécialistes français dans ce domaine sur la route. "Il est le seul à pouvoir utiliser un plateau de 50 (dents)", a reconnu le Lorrain. "Moi, je n'ai pas la force nécessaire à l'arrivée d'un cyclo-cross. Même les Belges n'ont pas un 50. C'est Francis le numéro un pour ça".

Chainel a rendu hommage à la qualité de son rival, avec lequel il entretient les meilleurs rapports une fois l'épreuve terminée. Le Lorrain a d'ailleurs été consolé par Mourey, qui a eu à Liévin le grand mérite de réviser sa stratégie par la faute d'une crevaison à la roue avant subie peu après la mi-course. En prenant l'option de partir vite, sur un circuit piégeux car gelé en bonne partie, le champion de France s'est vite retrouvé nanti de 25 secondes d'avance après deux tours seulement. Chainel, retardé par un changement de vélo, a dû attendre pendant plusieurs tours avant de s'extirper du premier groupe de chasse en compagnie du Picard Nicolas Bazin (médaillé de bronze pour finir).

"Ma crevaison a tout remis en cause", a expliqué ensuite Mourey, qui a gardé son sang-froid pour éviter le pire. S'il a perdu l'intégralité de son avance, il a pu repartir du poste matériel dans le sillage de ses deux poursuivants. Il s'est contenté ensuite de tester Chainel, le seul à garder le contact. Le futur vainqueur a préféré miser sur le sprint, un exercice certes aléatoire mais qu'il a abordé avec confiance: "Je me souvenais de 2005 quand j'avais gagné ici. La ligne droite est courte (250 m) et, si j'abordais en tête le dernier virage, je savais que ce serait difficile pour Steve de me reprendre."

Le scénario s'est déroulé comme Mourey l'avait imaginé. Chainel, "les jambes autour du cou" selon son expression, a dû se rasseoir sur sa selle et se contenter d'une nouvelle médaille d'argent, un an après celle acquis à Pontchâteau (Loire-Atlantique) où il avait vu son rival et ami le dépasser dans les cinquante derniers mètres. A 29 ans, le quintuple champion de France -déjà vainqueur en 2005, 2007, 2008 et 2009- a rejoint Dominique Arnould au palmarès national. Il lui reste à l'imiter à l'échelon supérieur, puisque le Lorrain est le dernier Français à avoir endossé au plus haut niveau le maillot arc-en-ciel (1993).

"Cela fait quatre-cinq ans que je suis convaincu que je peux être champion du monde", a estimé Mourey, incontestable chef de file du cyclo-cross français à qui il donne aussi un exemple d'humilité quand il se compare aux trois meilleurs mondiaux actuels (Nys, Albert, Stybar): "Je pense qu'ils sont un peu plus doués que moi. A moi de travailler encore plus sérieusement pour essayer de les battre!"