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Pozzato a changé

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 06/04/2012 à 15:43 GMT+2

Au fond du trou l'an dernier, Filippo Pozzato (Farnese Vini) revient au premier plan en cette saison 2012. Une résurrection qui puise sa source dans le changement de mentalité du coureur italien. Au prix d'une sévère autocritique, Pippo a décidé de tourner le dos à ses errements passés.

2012 Tour du Qatar Filippo Pozzato

Crédit: AFP

Quel est le premier mot qui vient à l'esprit à l'évocation de Filippo Pozzato? Sans doute, dans le lot, trouverait-t-on du "doué", "talentueux", "dilettante", playboy", voire "suceur de roue". Autant d'images d'Epinal de l'enfant terrible du cyclisme italien, à mi-chemin entre idées reçues et réalité. Oui, il y a du vrai dans tout ça. En bien comme en mal. Oui, Pippo a été gâté par la nature. Et oui, il ne l'a sans doute pas pleinement exploité. Il est le premier à le reconnaitre. "J'ai gâché mon talent pendant trop longtemps", concède-t-il. D'une certaine façon, son talent aura été son principal ennemi en même temps que son meilleur atout.
Dans un entretien accordé à Cyclingnews, Pozzato est revenu sur sa carrière. D'incontestables succès, comme cette victoire dans Milan-Sanremo en 2006, la plus marquante. Pozzato, c'est aussi un titre de champion d'Italie, une Hew Cyclassics et des étapes gagnées sur les trois grands tours. Sans parler d'une kyrielle de places d'honneur dans des grandes courses. Un palmarès appréciable. Mais le Vénétien est toujours resté en retrait de son potentiel. C'est le lot des enfants doués. On attend d'eux qu'ils offrent ce qu'ils sont capables de donner. "Quand vous êtes jeune, gagner, c'est facile, explique-t-il dans cet entretien. Dans votre tête, vous êtes meilleur que les autres, et vous ne travaillez pas assez dur. Il vaut mieux être moins doué physiquement et plus fort mentalement. C'est mieux que d'être un phénomène et d'avoir 'la classe', comme on dit. C'était mon problème."
"Le cyclisme me donnait la nausée"
Si Filippo Pozzato évoque aussi lucidement de ce qu'il a été, c'est parce que ce Pippo-là appartient au passé. A 30 ans, le dilettantisme, c'est fini. Pour tourner cette page, il a fallu qu'il touche le fond, l'an dernier. 2011, annus horribilis pour Pozzato. Lassés, les dirigeants de Katusha lui indiquent gentiment la sortie. "Ça m'a pris beaucoup de temps, beaucoup trop, pour réaliser que j'avais fait beaucoup de choses de travers. Sans aucun doute. J'étais toujours devant dans les courses, mais je n'avais pas ce petit plus qui vous permet de les gagner." En fin de saison dernière, il est arrivé au point où il ne lui restait plus que deux options: s'arrêter ou changer. "Je me suis demandé si je voulais abandonner. Le cyclisme me donnait la nausée. Je ne prenais plus aucun plaisir." Face à ce dilemme, il a décidé de repartir de l'avant. Et de travailler, probablement plus qu'il ne l'avait jamais fait. Avant Milan-Sanremo, il s'est ainsi imposé des séances colossales dont il n'était pas coutumier. Le nouveau Pippo, c'est ça. Bosseur et déterminé.
Symbole de cette nouvelle volonté de fer, il a surmonté sa fracture de la clavicule au Tour du Qatar en... huit jours. Blessé le 10 février, il a repris la compétition le 18 au Trophée Laigueglia. Quitte à passer pour un malade mental. "Le docteur m'avait dit de rester au repos au moins un mois, raconte-t-il. Mais il n'en était pas question. Je suis rentré du Qatar le vendredi soir. Je suis allé à l'hôpital le samedi matin. J'ai demandé à être opéré sur le champ. Il m'a dit que je devrais attendre dix heures. Je lui ai répondu que ça ne pouvait pas attendre dix heures, que je devais être sur pied dans trois jours pour reprendre la compétition le week-end suivant. Il m'a demandé si j'étais dingue. Ma copine m'a dit aussi que j'étais fou. Même Luca Scinto (le directeur sportif de son équipe, Farnese Vini, qui a couru avec lui chez les pros à ses débuts), ne voulait pas que je reprenne si vite."
"J'ai mis mes couilles sur la table"
Mais Pozzato n'en démord pas. Il est convaincu qu'un arrêt prolongé risque de briser son élan, encore fragile. "Je ne voulais rien perdre, reprend-t-il, même psychologiquement." La peur de replonger dans ses errements. "J'ai mis mes couilles sur la table et je lui ai dit que c'était ma décision." Quatre jours après l'opération, il pédale à nouveau. "Je crois que j'ai pris la bonne décision", estime-t-il. A en juger parce qu'il a montré depuis un mois et demi, aucun doute. Sixième de Milan-Sanremo et d'A travers les Flandres, neuvième de Gand-Wevelgem, il a surtout sorti un magnifique Tour des Flandres, où il ne lui a presque rien manqué pour coiffer Tom Boonen dimanche.
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2012 Pozzato Tour del Qatar

Crédit: Twitter

Mais cette deuxième place porte en elle plus de promesses que de frustrations. "J'ai montré à tous les journalistes qui continuent à me critiquer gratuitement que quand une équipe me fait confiance, je donne tout." Dimanche, il sera un des principaux candidats à la victoire sur Paris-Roubaix. Là où aucun Italien n'a triomphé depuis douze ans. Là où il était passé tout près du sacre, en 2009. Seul Boonen l'avait devancé, déjà. Mais plus rien ne semble impossible à ce Pippo là. Toujours playboy. Toujours surdoué. Mais délesté de ses défauts de jeunesse qui lui ont si longtemps collés à la peau. "Deviens ce que tu es", disait Nietschze. Pour Pozzato, il n'est peut-être pas trop tard pour devenir le très grand champion qu'il aurait dû être.
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