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Jeannot de Marseille

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ParEurosport

Mis à jour 16/01/2011 à 12:59 GMT+1

S'il a effectué l'essentiel de sa carrière à Bordeaux, Jean Tigana l'a achevée à Marseille, où il revient dimanche avec les Girondins lors du choc de la 20e journée. Mais s'il a rejoint l'OM trop tardivement pour qu'il soit vraiment son club, entre 1989 et 1991, Marseille a été et reste sa ville.

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Crédit: Eurosport

Dans la mémoire collective du football français, Jean Tigana est à jamais associé aux Girondins de Bordeaux. Normal. L'ancien milieu de terrain des Bleus y a passé huit années. Huit ans de gloire, dans les années 80, celles de la suprématie bordelaise. Quand il a succédé à Laurent Blanc l'été dernier sur le banc bordelais, pour beaucoup, ce fut donc un retour au bercail. Professionnellement, il n'y a rien de plus vrai. Pourtant, ce n'est pas à Bordeaux que Tigana avait choisi d'achever sa brillante carrière, mais à Marseille. En toute logique, si l'on peut dire.
Car Tigana est un vrai Marseillais dans l'âme. C'est là que ses parents ont débarqué lorsqu'il avait trois ans, en provenance du Mali. Jean est devenu Jeannot et le natif de Bamako est devenu l'enfant des Caillols. Il y a acquis son caractère de battant et cet accent qui, un demi-siècle plus tard, ne l'a pas quitté. Il y a surtout découvert le football. De dix à vingt ans, il a écumé les clubs du coin, à l'ASPTT Marseille, aux Caillols ou à Cassis. Alors, comme tout minot, il a rêvé de jouer à l'OM. Son destin l'a conduit à Toulon, Lyon et, surtout, Bordeaux. Il devra attendre d'avoir 34 ans pour boucler la boucle et revenir sur les terres de son enfance. "J'ai toujours gardé dans un coin de ma tête l'idée de venir à l'OM, racontait-il en 1989 dans France Football, juste après avoir rejoint la Canebière. Maisles années passaient et, c'est vrai, je commençais à me dire que ça n'arriverait jamais."
Une fin en eau de boudin
Il faudra toute la détermination de Bernard Tapie pour que Tigana délaisse la Gironde pour la Provence. En 1986, c'est déjà lui que le président star de l'OM voulait, plus encore que Giresse. Il l'approche juste avant la finale de Coupe de France... face à Bordeaux. Une façon de faire qui met en pétard Claude Bez, lequel traite Tapie "d'escroc" et de "charlatan." Finalement, c'est Gigi, pas Jeannot, qui va quitter Bordeaux. Personne, en Gironde, ne pardonnera le petit meneur de jeu. En 1989, le départ de Tigana ne provoquera pas la même émotion. Peut-être, justement, du fait de ses racines marseillaises. "Je dois beaucoup, presque tout, à Bordeaux, explique-t-il alors. Mais j'avais envie de venir ici. Envie, et presque besoin."
Comme il le souhaitait, Tigana va donc achever sa carrière sous le maillot blanc. Sa période marseillaise reste pourtant mitigée. Deux saisons, l'une remarquable, l'autre frustrante. Lors de sa première campagne, il est incontournable. Gérard Gili en fait son point d'équilibre. L'OM remporte le titre de champion et atteint les demi-finales de la Coupe des champions. Il se sent chez lui. Son passé et sa personnalité lui confèrent un statut particulier auprès du boss. Tigana est le seul joueur que le Tapie aura vouvoyé en huit années de présidence. Parce que monsieur Tigana impose le respect, on ne lui parle comme à n'importe qui. Tapie a beau tout contrôler et tout savoir, il consulte beaucoup l'ancien Bordelais. On raconte qu'une nuit, à 4 heures du matin, le téléphone sonne chez Tigana.  C'est Tapie. "Je ne vous réveille pas?", demande ce dernier. "Non, président, j'attendais votre coup de fil", répond Jeannot. Anecdote aussi savoureuse qu'invérifiable. Mais elle traduit bien la place que Tigana avait prise à l'OM.
Malheureusement, l'histoire d'amour va mal finir. Jeannot a pourtant toujours le niveau, mais l'arrivée de Raymond Goethals à la tête de l'équipe, en janvier 1991, le relègue sur le banc. Le Belge à la Belga s'appuie sur Pardo, Fournier et Germain. Tigana joue les utilités, devient douzième homme. A bientôt 36 ans, il a passé l'âge. La veille de la finale de Bari, il pose ses conditions: titulaire ou rien. Ce sera rien. Goethals le laisse sur le banc jusqu'au bout contre l'Etoile Rouge et l'OM, battu aux tirs au but, n'a que ses yeux pour pleurer. Dire que Tigana, des pupilles à Bari, n'avait jamais perdu une finale... Goethals ne le savait pas. Superstitieux comme il était, il aurait peut-être titularisé son vétéran s'il avait eu vent de cette drôle de statistique. Une si petite sortie pour une si grande carrière. Tigana méritait autre chose. Le joueur rêvait d'une autre fin avec son OM. Mais l'homme reste profondément attaché à sa ville. Dimanche, il revient à la maison. "Oui, c'est spécial, dit-il. C'est chez moi. J'y vivrais ma retraite, dans les vignes, à Cassis." Parce que, Bordeaux ou pas Bordeaux, Tigana restera avant tout Jeannot de Marseille.
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