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L'OM se voile la face
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Publié 04/04/2012 à 15:52 GMT+2
Pendant plus d'une heure, vous avez échangé avec notre envoyé spécial à Munich, Maxime Dupuis. S'ils veulent sortir de cette terrible spirale négative, les Marseillais vont devoir regarder la réalité en face. Trop peu ont commencé à le faire.
Marseille's Andre Ayew (L) challenges Bayern Munich's Philipp Lahm during their quarter-final first leg Champions League soccer match at the Velodrome Stadium in Marseille, March 28, 2012.
Crédit: Reuters
Luffy : Après cet enchainement de mauvais résultats et cette élimination, l'OM ne risque-t-il pas de rater complètement sa fin de saison et surtout son rendez-vous face au PSG ?
Maxime Dupuis : Oui, le risque existe. C'est évident. Quand on est au fond du trou, on ne sait jamais comment en ressortir. Le match du Parc sera une sorte de quitte ou double pour les Olympiens. PSG - OM, c'est toujours à part. Une performance accomplie face à un adversaire qui n'est pas non plus dans la forme de sa saison pourrait remettre l'OM d'aplomb. Après, pour ce qui est du championnat, il ne faut plus espérer grand chose. Si Marseille gagne la Coupe de la Ligue, ce sera déjà bien. Cela ne sauvera pas la saison mais, au moins, l'OM aura glané un titre.
Fanderap : Va-t-il être facile de repartir alors que certains discours s'apparentent à mes yeux à de la méthode Coué...
M.D. : Non, ce sera compliqué. Surtout quand on entend certaines déclarations après le match, hier. Il y a une forme de langue de bois, évidemment. Mais on peut aussi avoir l'impression que certains joueurs se voilent la face. Seuls Mandanda et NKoulou ont vraiment fait face. C'est peu.
Eric : La belle façade n'est-elle pas en train de se fissurer après les déclarations de Mandanda et Nkoulou ?
M.D. : Clairement. Et le rendez-vous de Paris sera intéressant à ce niveau-là. Les joueurs vont-ils faire bloc ? On serait tenter de l'imaginer tant ce rendez-vous reste particulier pour l'OM. Mais si jamais les Olympiens se prennent les pieds dans le tapis au Parc et passent complètement au travers... Pour faire simple : Dimanche, ce sera l'implosion ou le rebond.
Fabien : Pensez-vous que le match de Paris puisse avoir le même effet que l'aller et lancer l'OM dans le sprint final ?
M.D. : Lancer vers quel sprint final ? Aujourd'hui, l'OM est neuvième de Ligue 1, à seize points de la troisième place. C'est terminé. Au mieux, les Olympiens relèveront la tête et, qui sait, iront chercher une place d'honneur. Mais même l'Europa League parait illusoire via le championnat. La fin de saison va être, comme l'a dit plusieurs fois Steve Mandanda hier soir, difficile.
Roni : L'OM a eu l'occasion de mener 1-0 lors des deux matches face au Bayern. Pensez-vous que cela aurait pu faire tourner la confrontation en faveur de Marseille ?
M.D. : Il est certain que si l'OM avait mené 1-0 à l'aller, ou marqué en premier au retour, le suspense n'en aurait pas pâti. Mais, honnêtement, il n'y avait pas photo sur la double confrontation. Le Bayern, ce n'est peut-être pas aussi clinquant que Barcelone et compagnie mais c'est le top européen. Le Real Madrid ne va pas rigoler en demi-finale. L'élimination de l'OM n'a rien d'illogique. On savait dès le tirage, OM en forme ou pas, que cela serait plus compliqué. Ce qui est plus embêtant, ce sont les défaites qui s'empilent en Ligue 1 et en Coupe de France face à Quevilly. Le vrai désordre est là.
Jonathan06 : Le match d'hier nous a encore prouvé que l'effectif de l'OM n'était pas assez étoffé pour rivaliser avec les plus grands. Pensez-vous qu'ils pourront attirer de "gros" joueurs la saison prochaine ?
M.D. : L'an prochain, il n'y aura pas de Ligue des Champions. Donc l'OM sera moins attractif et, surtout, n'aura pas les moyens d'investir énormément. L'été dernier a été un aperçu de ce que l'on pourrait avoir en juin, juillet et août prochain. En y ajoutant quelques départs de cadres. José Anigo, qui avait promis une belle équipe la saison prochaine, devra être très malin. A défaut d'être riche...
Yassir : Quand on a perdu à domicile 2-0, n'est-il pas mieux de jouer le tout pour le tout au match retour ? Et mettre un peu de folie ?
M.D. : La folie, la fameuse folie... Didier Deschamps en a parlé lundi en conférence de presse en évacuant le sujet par une petite pirouette. On savait bien que mardi l'OM ne jouerait pas à trois attaquants. Ce n'est pas dans la logique et dans la façon de faire de Didier Deschamps, qui est cartésien. Il a tenté un tout petit coup avec Rémy à droite, Brandao en pointe. Cela n'a pas marché. Point à la ligne.
Ibrahim : Mandanda a dit hier que le groupe n'était "pas solidaire", les joueurs ont-il des envies d'ailleurs ?
M.D. : En effet, Mandanda a semblé très touché, tout comme NKoulou, qui a parlé de honte. Leur discours tranchait avec certains autres qui tentaient de faire bonne figure. Sur le terrain aussi, au coup de sifflet final, certains ont semblé touchés. Notamment Mathieu Valbuena qui est resté de longues minutes le regard perdu. Comme s'il venait de perdre une finale... L'accumulation des défaites commence à être lourd et pèse sur les épaules des Olympiens. On sent qu'une partie des joueurs accuse le coup. Si la saison pouvait se terminer demain, ils signeraient des deux mains.
Quentin : Deschamps a-t-il un avenir à Marseille, vu ses résultats en L1 et en C1 ?
M.D. : Difficile à dire. Lundi, avant le match, il semblait lassé et a tenu à répéter qu'il allait disputer son 24e match de C1 de suite avec le club. Il l'a même martelé. Quand vous en êtes à devoir rappeler de telles choses, pour que les gens se rendent compte du travail accompli, c'est que la sortie n'est jamais très loin. Les batailles intestines le fatiguent.
Je voudrais aussi rebondir sur une partie de votre question, le "vu ses résultats en C1". Ses résultats en C1, c'est un 8e de finale l'an dernier, un quart cette saison. L'OM n'avait plus atteint ce niveau depuis 1993. On peut au moins laisser ça au crédit de Didier Deschamps. Etre en quart de finale de finale de la Ligue des Champions n'a rien d'infamant. Ce qui l'est, c'est d'être 9e en Ligue 1.
Gil : Tout le monde encensait Deschamps durant la période faste de l'OM mais on s'aperçoit qu'il est un bon entraîneur quand il a d'excellents joueurs...
M.D. : Je ne suis pas d'accord. J'ai croisé des supporters marseillais à Munich qui mettait les maux de l'OM sur le dos de DD. C'est un peu facile. Ok, on ne rêve pas tous les jours avec Deschamps aux manettes mais l'ancien capitaine de l'équipe de France fait gagner des titres. Qu'on le veuille ou non. Maintenant, Deschamps va peut-être quitter l'OM en fin de saison. Une partie des supporters aura peut-être gain de cause. Mais pour mettre qui à la place ? On sait ce qu'on perd, on ne sait pas ce que l'on retrouve.
Tybz : Sur les deux confrontations, peut-on parler de manque de qualité technique et créative au niveau du football français ? Est-ce un souci de formation ou culturel ?
M.D. : Il ne faut pas oublier que c'était le Bayern en face. Et le Bayern Munich est une institution européenne. Loin devant n'importe quel club français. Il y a un problème structurel au niveau du football hexagonal, doublé d'un souci conjoncturel touchant particulièrement l'OM à ce moment de la saison. Tout cela réuni, il n'y avait rien à faire. Le Bayern Munich était largement au-dessus. Après, le tirage, je pensais que le club allemand était le pire adversaire pour Marseille, hormis le Real ou le Barça. J'en suis plus que jamais convaincu.
Leky : Comment expliquer l'impuissance des clubs français ? Sans évoquer l'argument financier...
M.D. : C'est impossible. L'argent ne fait pas le bonheur, certes. Mais il y contribue grandement. Mettez les joueurs du Bayern à Marseille et vous verrez une drôle de différence. Après, certains pays, tel le Portugal, réussissent sans moyens exorbitants. Il faut sans doute y voir une compétence supérieure à celle des clubs français, tout simplement.
Alain Lombard : Ne fait-on pas trop la part belle aux petites équipes en France ?
M.D. : Je vois où vous voulez en venir. Il est vrai que la France se targue d'avoir un championnat dont le niveau moyen est - ou serait - supérieur à celui de ses voisins européens. Personnellement, je préférerais avoir deux locomotives surpuissantes que dix clubs de bon niveau. Il faut être un peu élitiste pour cela. Et, pourquoi pas, revenir à 18 clubs en L1. Resserrer l'élite pour relever le niveau. Cela ne réglerait pas tous les problèmes mais, au moins, on irait dans le bon sens.
Guest : Côté UEFA, la France passe derrière le Portugal. Est-ce préjudiciable ?
M.D. En Ligue des Champions, il va falloir passer un tour préliminaire supplémentaire dès 2013/2014. Mais, franchement, c'est tout à fait logique de retrouver les Portugais devant les Français. Une stat résume tout : Lors des dix dernières années, le Portugal a remporté une C1 et deux C3. Soit plus de coupes d'Europe que la France en un demi-siècle. Circulez, il n'y a plus rien à voir.
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