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Rudi Garcia à l'AS Roma : ces choses que Rudi Garcia doit savoir

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 12/06/2013 à 17:49 GMT+2

Environnement irrationnel, pression médiatique, vestiaire ingérable, résultats obligatoires : Rudi Garcia s’embarque dans une drôle d’aventure à l’AS Roma.

2013 Ligue 1 Rudy Garcia

Crédit: AFP

Nommé entraîneur de la Roma, plus que probablement, Rudi Garcia va découvrir un univers bien différent de ses expériences françaises, à Dijon, au Mans et à Lille. L'entraîneur français ne se rend peut-être pas encore compte de ce qui l'attend sur les rives du Tibre : pression dingue, environnement complexe, vestiaire compliqué, championnat difficile et obligation de résultat. Le tout, à un moment où le club est au plus mal : deuxième saison sans Coupe d'Europe, défaite en finale de la Coupe d'Italie contre la Lazio, contestation de la part des tifosi, etc. Homme de défi, Rudi Garcia en a peut-être trouvé un à sa taille, en rejoignant une Roma qui n'attend que quelques victoires pour s'embraser à nouveau.
Dolce Vita, tifosi, presse omniprésente : un environnement compliqué
À Rome, il y a de quoi devenir fou. Il y a ce je-ne-sais-quoi dans l'air qui peut vous faire perdre la tête. Fellini a parfaitement dépeint Rome dans La Dolce Vita, un classique du cinéma italien. Rome est une ville spéciale où l’on vit la nuit, où l’on aime profiter du bon temps, où l’on aime élever la voix et s’emporter à la moindre discussion. Voir, être vu et se faire entendre. La vie y est douce et agréable. Le climat est généreux, la mer n’est pas loin et les Romains savent aussi se contenter de ce qu’ils ont, même s’ils aspirent à mieux. Le propre de l’Homme. Ils savent profiter des choses simples que leur offre cette ville. Mais plus qu’une douceur de vivre, cette ville laisse le sentiment d’une douce folie. L’empreinte du passé glorieux n’est jamais très éloignée, les caractères sont affirmés et les rêves nombreux, d’où parfois, une impression de sage mélancolie. Et les joueurs de la Roma sont un mélange de tout cela. Ils baignent dans cette atmosphère toute l’année et plongent chaque jour un peu plus dans l’excès.
J'aime à dire que les supporters de la Roma ont les exigences des plus grands clubs européens alors que leur club n'a gagné que trois Scudetti. L'ambition est immense et forcément démesurée. Dans la capitale italienne plus qu'ailleurs, deux victoires consécutives font de vous un héros et deux défaites vous font retomber sèchement sur le sol pavé de la Rome Antique. Cela vaut pour les supporters, comme pour les joueurs, incapables d'avoir le moindre recul et la moindre fraîcheur mentale pour rester les pieds sur terre. Après une victoire contre le Chievo, Sienne ou Bologne, les joueurs se succèdent devant les micros pour expliquer que la Roma joue le titre ou la troisième place (selon les années), et le match d'après, ils passent littéralement au travers. Le tourbillon de l'enthousiasme, provoqué par les supporters et la presse, balaye tout sur son passage, y compris la santé psychologique des joueurs.
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Garcia : "Il y a plus qu'à attendre..."

Crédit: Media365

La presse, justement, est un élément important de l'environnement. Vous ne pouvez imaginer le nombre de médias développés et uniquement centrés sur la Roma. Chaque jour, à Trigoria, une douzaine de reporters de médias locaux, qu'ils soient de la radio ou du web, scrutent les moindres exercices de l'entraînement et font des compte-rendus en direct des séances. Même quand les entraînements sont à huis clos, ils montent sur les murs, dans les arbres, ou sur les toits des voitures entourant le centre de Trigoria, pour apercevoir les moindres faits et gestes des joueurs et de l'entraîneur. Les radios romaines émettent en continu et enchaînent les débats chaque jour. Les auditeurs sont encouragés à se lâcher pour faire de l'audience, chaque joueur est remis en cause, tout comme les choix de l'entraîneur. La pression est énorme et à moins de se couper totalement des médias (Luis Enrique a essayé), il faut vivre avec eux.
Tous les entraîneurs arrivant à Rome expliquent lors de leur première conférence de presse qu'ils n'ont pas peur de la pression et qu'ils l'ont connue ailleurs. Mais ils n'ont besoin que de quelques jours pour se rendre compte que la Roma est un autre monde. La ville respire le foot. L'attente est immense, les espoirs sont grands et la douce folie n'est jamais très loin.
Pour finir sur cet environnement complexe, perturbant et souvent déstabilisant, voici une petite anecdote. Luis Enrique était arrivé à la Roma avec un staff composé d'Espagnols dont l'un, Antonio Llorente, était le "coach mental" du groupe. Son objectif était de préparer psychologiquement les joueurs toute la semaine, les aider à faire la part des choses, les calmer, les responsabiliser, etc. Lors de la saison 2011-2012, Llorente a été expulsé à deux reprises du banc de la Roma pour contestations. Même un coach mental finit par craquer à Rome !
De vraies ressources techniques
Rudi Garcia va pouvoir composer avec un effectif de qualité. Entre la star Francesco Totti en grande forme physique la saison passée, les jeunes attaquants Destro et Lamela, le milieu de terrain technique et toujours en mouvement avec Florenzi, Pjanic, Marquinho et Bradley, ou encore la révélation Marquinhos en défense, l'entraîneur français aura quelques certitudes dans son nouvel effectif.
Les incertitudes entourent Daniele De Rossi, plus vraiment indiscutable à la Roma après plusieurs saisons médiocres, et qui pourrait être vendu afin d'économiser le plus gros salaire du club (6M€/an) et éviter de nombreuses polémiques tout au long de la prochaine saison, comme cela a été le cas avec Zeman en 2012-2013. Autre interrogation, elle concerne le poste de gardien de but. Stekelenburg vendu, la Roma piste Rafael (Santos) et Sorrentino (Palerme). Quelques retouches devraient être apportées en défense, et au milieu si De Rossi part, mais Garcia a un effectif très intéressant à sa portée. Au moins d'un point de vue purement sportif, et technique.
Adepte du 4-3-3 et de sa variante 4-2-3-1, Rudi Garcia va pouvoir compter sur un effectif ayant déjà quelques automatismes dans ces systèmes de jeu prônés par Luis Enrique, Zdenek Zeman, et à un degré moindre par Aurelio Andreazzoli qui a, lui, à peu près tout essayé. L'adaptation tactique sera donc facilitée même si l'entraîneur français apportera évidemment ses principes de jeu à Rome.
Un vestiaire compliqué
Là où Garcia aura du travail, et il ne pourra pas réussir dans cette tâche si ses dirigeants ne le soutiennent pas (l'absence de soutien a été dénoncée, à raison, par Zeman avant son licenciement), c'est sur le comportement des joueurs. Fragilité mentale, nervosité, manque d'implication, les maux sont connus et reconnus. Mais depuis deux ans, rien n'est fait pour combattre cette difficulté. Osvaldo a ainsi pu cumuler une bagarre avec Lamela, des expulsions stupides, un refus d'assister au derby dans les tribunes pour soutenir ses coéquipiers, une absence au stage hivernal aux USA ou encore des insultes à son entraîneur, sans pour autant être sévèrement puni par ses dirigeants. "Il manque des règles claires et strictes pour que les joueurs sachent ce qu'ils ont le droit de faire, et le devoir de ne pas faire", disait Zdenek Zeman courant février. Cette impression est toujours d'actualité et Walter Sabatini va devoir s'y faire.
À chaque changement d'entraîneur à la Roma, certains, très majoritairement en France, expliquent que le nouvel entraîneur devra composer avec Francesco Totti, comme s'il était caractériel et difficile à gérer. Tout juste si on ne présente pas "Er Pupone" comme une énorme caricature d'un syndicaliste revendicatif et fort en gueule. C'est en fait tout le contraire : Totti parle peu et ne crée plus de problèmes depuis longtemps. Il le répète à longueur d'interview : s'il devient un problème pour la Roma, il s'effacera. Luis Enrique l'avait titillé en début de saison 2011-2012 avant de se rendre compte rapidement de son erreur tant Totti était indispensable sur le terrain. Totti est la Roma, Totti fait venir les joueurs à la Roma sur sa seule présence et il représente Rome. Mais surtout, il est le meilleur joueur de la Roma depuis deux ans, et à bientôt 37 ans, il affiche une forme physique incroyable.
Non, Rudi Garcia devra composer avec d'autres joueurs autrement plus difficilement gérables. En première ligne, et pour reprendre une expression de Berlusconi, la "pomme pourrie" du vestiaire, Osvaldo, tout simplement ingérable, mais aussi Capitan Futuro, Daniele De Rossi, qui a créé bien des problèmes à Zeman. Est-ce un hasard si aujourd'hui ces deux joueurs sont sur le départ ? Pas vraiment. Il est temps de faire un grand nettoyage dans ce vestiaire, et si Osvaldo et De Rossi partent, Garcia aura plus de facilité à dompter le groupe.
Garcia, déjà pisté en 2011
Déjà sur la short-list des dirigeants romains en 2011 lorsque la Roma avait finalement nommé Luis Enrique, Rudi Garcia arrive à un moment nettement plus compliqué aujourd'hui. La Roma sort de deux saisons catastrophiques avec une septième place suivie d'une sixième cette saison. Avec 26 défaites en deux ans, les joueurs ont lâché de nombreux points à leur portée. Pire, le club romain a conclu la saison dernière par une défaite en finale de la Coupe d'Italie contre la Lazio, dans un match où les Giallorossi n'ont rien montré de bon, ni jeu ni caractère. Cette défaite a été vécue comme un affront par les tifosi de la Roma qui ont alors manifesté leur colère pendant plusieurs jours au centre d'entraînement. La situation est toujours tendue à Rome, et même s'il n'y a plus de manifestations, les supporters en colère s'expriment encore largement sur les radios locales ou les sites spécialisés. Parmi les personnes les plus contestées, certains joueurs mais aussi les dirigeants et propriétaires du club.
Quelques jours après cette finale perdue, le directeur général Franco Baldini a démissionné. Il ne devrait pas être remplacé et les pouvoirs de Walter Sabatini seront alors étendus, alors que lui-aussi est fortement contesté pour ses choix de recrutement. En effet, depuis son arrivée en juin 2011, sept joueurs majeurs recrutés sont déjà repartis : Borini, Heinze, Bojan, Gago, Kjaer, Goicoechea et Stekelenburg. D'autres pourraient suivre cet été, de Piris à Balzaretti en passant par Marquinho et Osvaldo. Avouez que l'on a déjà vu mieux en terme de stabilité.
L'instabilité du pouvoir, maladie chronique de la Roma
Sans rentrer dans la complexité du conseil d'administration où les changements ont été nombreux en deux ans, plusieurs autres postes stratégiques ont changé de main. Le président Thomas Di Benedetto a ainsi laissé sa place au bout d'un an à James Pallotta, le nouvel homme fort de la Roma. Le poste de CEO a vu aussi plusieurs changements, le dernier arrivé, Italo Zanzi, prenant la suite de Mark Pannes, toujours présent dans le comité exécutif. Le directeur général Franco Baldini a lui démissionné au bout de deux ans, tandis que l'on s'interroge sur les véritables fonctions de plusieurs personnes, à commencer par Claudio Fenucci. La liste des conseillers "à l'américaine" du président Pallotta est très longue et on s'y perd un peu, d'où l'impression que les actionnaires ont empilé des personnes à des postes peu importants.
À la Roma, Rudi Garcia devra redorer le blason du club sur le plan sportif, mais également tenir compte et gérer des éléments compliqués : la pression, le scepticisme à son égard (les tifosi attendaient un nom synonyme de certitude comme Mazzarri, Allegri ou Mancini), un vestiaire pas toujours sain et le mental friable de ces joueurs. Le moins qu’on puisse écrire, c’est que c’est un sacré défi !
Johann CROCHET : Créateur de footballtagcloud.com, pigiste, Johann Crochet a l'habitude de dire qu'une bonne journée commence par une revue de presse italienne et qu'une bonne année se mesure au nombre de matches de Serie A vus dans les stades. Par goût, il suit aussi le foot néerlandais et les championnats scandinaves.
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