Juventus Turin 2013 - Inter Milan 2010, même destin ?

L'Inter sortait de trois Scudetti consécutifs et ses ambitions ne pouvaient plus être contenues et satisfaites par des victoires nationales. Pour viser plus haut et briller sur la scène européenne, Massimo Moratti, en accord avec son entraîneur José Mourinho, mettait en place un effectif cinq étoiles composé en majorité de joueurs affirmés, ayant faim de victoires, quitte à laisser partir une partie des éléments ayant permis au club d'enregistrer ses trois victoires consécutives en Série A.

Le mercato de l'Inter était particulièrement agité. Du côté des recrues, Mourinho se concentrait sur trois points : l'expérience, la valeur sportive et un caractère poussant les joueurs à se surpasser et à se mettre au service du collectif. Ainsi, en défense, Lucio venait apporter son expérience européenne et sa grinta. Au milieu, Thiago Motta, relancé par son excellente saison au Genoa et joueur de devoir par excellence, et Wesley Sneijder débarquaient à Milan. Enfin, en attaque, Moratti offrait à son entraîneur portugais un duo grand luxe : Samuel Eto'o et Diego Milito, chargés de faire oublier le soliste Zlatan Ibrahimovic. L'Inter avait pris la décision de sacrifier son meilleur joueur et se servir de l'argent récupéré sur le transfert du Suédois pour améliorer l'équipe dans tous les secteurs de jeu, avec des éléments confirmés, âgés de 25 ans (pour la plus jeune recrue, Wesley Sneijder) à 31 ans (pour la plus âgée, Lucio).

Du côté des départs, l'Inter cédait de bons joueurs mais pas assez bons pour avoir une place dans l'effectif "haute qualité" de l'Inter : Burdisso à la Roma, Maxwell au Barça tandis que Dacourt, Crespo et Cruz, tous actifs dans la moisson de trophées de l'Inter période 2006-2009, n'étaient pas renouvelés. Avec Mourinho, comme souvent, pas de place pour les sentiments et le romantisme : ceux qui n'étaient plus assez bons, quelles qu'aient été leurs places dans l'Histoire récente du club, devaient partir.

Mourinho avait pour mission principale de bien figurer en Ligue des Champions lors de l'édition 2009-2010. Si possible, il fallait gagner cette compétition, quitte à perdre quelques points en championnat. Quelques mois plus tard, le pari était réussi. Mieux, l'Inter remportait la Ligue des champions après la Série A et la coupe d'Italie. Un triplé historique pour le club milanais.

Après avoir remporté les deux derniers championnats d'Italie, la Juve ne veut plus se contenter de bien figurer à l'échelle nationale. Elle retrouve son ambition, son intransigeance et son arrogance, quitte à faire grincer quelques dents de l'autre côté des Alpes. Lors de ce mercato estival, la Juve a décidé d'améliorer un peu plus son effectif, tant en qualité qu'en quantité, en plus de la "refondation" de son secteur offensif. Sur ce dernier point, la Juventus a enfin trouvé son grand attaquant, après deux années d'échec sur ce dossier. Carlos Tevez est arrivé à Turin pour une somme "modique" (9M€ et quelques bonus) tandis que Fernando Llorente a permis à Conte d'ajouter un profil un peu différent à un effectif déjà bien garni. La troisième grande recrue de la Juve se nomme Angelo Ogbonna, l'une des valeurs sûres de Série A, débauché au Torino contre 15M€ et amené à … être le premier remplaçant en cas d'absence d'un élément du trio défensif titulaire. Aujourd'hui, selon les matches, le banc de la Juve pourrait ressembler à ceci : Storari, Ogbonna (international italien), Peluso (international italien), Caceres (international uruguayen), Paul Pogba (international français), Simone Padoin, Fernando Llorente (international espagnol), Sebastian Giovinco (international italien). J'exclus volontairement de la liste Isla, Matri et Quagliarella, trois bons joueurs du championnat italien qui pourraient être vendus cette semaine. En cas de départ de ces trois éléments, Conte souhaite recruter un autre joueur, a priori un milieu offensif capable de jouer sur le côté.

Car c'est l'autre facette de cette "nouvelle" Juventus : le club peut se permettre de lâcher de bons joueurs, peut-être même à des concurrents (Matri est courtisé par Milan, Naples et la Roma ; Isla par l'Inter), quitte à les renforcer, car ils n'ont plus leur place dans un effectif "haute qualité", taillé pour la Coupe d'Europe. La Juve ne veut plus que la crème de la crème et doit se séparer de ceux qui ne sont pas à la hauteur des ambitions du club, même si, pour Matri et Quagliarella, ils ont inscrit 25% des buts de la Juventus toutes compétitions confondues la saison passée.

Cette Juventus veut à nouveau faire peur sur la scène européenne. La saison passée, le club turinois a retrouvé un certain standing mais s'est arrêté net en quarts de finale de la Ligue des champions contre le Bayern, comme l'Inter l'avait été contre Manchester United, en 8e de l'édition 2008-2009. Dans sa soif d'Europe, la Juve perdra certainement quelques points en championnat mais les dirigeants ont voulu limiter cette conséquence en doublant tous les postes. La soif de victoires de la Juve passe par l'Europe tout en conservant sa suprématie nationale. Un challenge délicat mais qui ne fait pas peur à Antonio Conte et ses hommes, avec, en point de mire, l'exceptionnel triplé de l'Inter en 2010 qu'ils tenteront de reproduire.

PS : un remerciement particulier à @Alexis7511 avec qui une discussion sur la stratégie actuelle de la Juve, sur Twitter, a donné vie à ce sujet.