Espagne - France : Karim Benzema a des statistiques insuffisantes

"Le problème, c'est tout sauf Benzema. Karim a déjà prouvé en sélection et en club qu’il pouvait être efficace". Les chiffres ne vont pas vraiment dans le sens de Didier Deschamps. Au moment de retrouver l'Espagne - un pays où il a pris l'habitude de briller avec le Real Madrid, et qui se méfie de lui comme de la peste -, Karim Benzema traîne des chiffres indignes de son statut avec l'équipe de France. Son dernier but en Bleu remonte au mois de juin contre l'Estonie (4-0) en préparation de l'Euro – le seul match où il a marqué lors de ses 13 dernières apparitions en Bleu. Un bilan incomparable avec son rendement sous le maillot du Real Madrid, son talent et l'attente qu'il suscite. Dans l'histoire de l'équipe de France et par rapport aux autres grands attaquants européens, ses chiffres sont au mieux ordinaires, au pire très insuffisants.

Pour s’en rendre compte, il suffit de regarder le rendement des anciens attaquants des Bleus. Si les époques sont difficilement comparables, Benzema ne joue pas dans la même catégorie que la plupart de ses illustres prédécesseurs. Avec 15 réalisations en 53 sélections, il présente un ratio but par match de 0.28 (soit 1 but toutes les 3.5 rencontres). Sans surprise, Just Fontaine est intouchable (1.42 en ratio). Certes, ce n'est pas la même époque. Mais l'ancien Lyonnais est aussi très loin du rendement de Michel Platini (0.57), Jean-Pierre Papin (0.55), Eric Cantona (0.42) ou encore Thierry Henry (0.41) et David Trezeguet (0.47).   

Souvent moins efficace que les anciens buteurs de renom français, Karim Benzema n’est pas le plus mauvais élève de la classe tricolore non plus. Si Youri Djorkaeff n'était pas beaucoup plus productif (0.34), il affiche par exemple des moyennes plus ronflantes que Nicolas Anelka (0.20)-  avec qu'il partage la même tendance à décrocher -, Sylvain Wiltord (0.24) et Didier Six (0.25). Comme un symbole, il présente toutefois le même ratio qu'un certain Zinedine Zidane. Mais Zizou était - faut-il le rappeler ?- un meneur de jeu alors que Benzema se considère lui-même comme un "vrai avant-centre"…

Sa jeunesse (24 ans) et son expérience relative jusque là au niveau international pourraient être des circonstances atténuantes. Il faut du temps pour prendre le pouls du niveau international, rappelle régulièrement Didier Deschamps pour expliquer les soucis de ses troupes. La théorie se tient, sauf que les derniers grands attaquants des Bleus disposent de meilleurs bilans lors de leurs 53 premières sélections. Thierry Henry avait marqué 23 buts avec la France, au même nombre de capes que Benzema. Trezeguet était, lui, à 29 réalisations. Les deux anciens Monégasques étaient cependant plus âgés quand ils sont arrivés à ce stade que l'actuel buteur des Bleus (26 pour Henry, 27 pour Trezeguet contre 24 pour Benzema). Ils étaient peut-être aussi mieux entourés. Mais ce retard ne se limite pas aux internationaux tricolores.

En se penchant sur le cas des autres buteurs actuels des grandes sélections européennes, on s’aperçoit que Benzema n'est pas non plus à son avantage. A 53 sélections, Wayne Rooney avait déjà marqué 25 buts et il n'avait que 23 ans... Robin van Persie (20 buts), Klaas-Jan Huntelaar (31), Mario Gomez (23), David Villa (33) ou encore Zlatan Ibrahimovic (20) avaient aussi tous fait trembler les filets plus souvent que l'attaquant du Real avec leur sélection. Seul, Fernando Torres avait presque le même bilan (16) alors que Cristiano Ronaldo, qui n'est pas un vrai 9 et était souvent critiqué avec le Portugal, avait déjà planté 20 buts.

L'autre point d’interrogation du bilan de Benzema avec la tunique tricolore est son manque efficacité devant le but lors des grands rendez-vous. Sur ses 15 buts, 8 ont été marqués en amical. Ses autres réalisations ont tous été inscrites lors des qualifications (Euros ou Mondial), dont 3 contre… les Iles Féroé. Il avait toutefois répondu présent contre la Bosnie en 2010 dans un match clef (2-0)... Mais s’il n’a pas participé à un Mondial, il n'a jamais marqué dans une phase finale de l'Euro en six apparitions. Ces statistiques pourraient laisser penser que l'avant-centre du Real est incontournable en Bleu faute de concurrence digne de ce nom. Il ne faut pas se tromper : il possède le potentiel pour être le leader du secteur offensif français. Il sait aussi se montrer décisif en délivrant des passes décisives (9 en équipe de France). On attend cependant plus d'un tel talent. Après avoir manqué de réalisme face au Japon, il est attendu contre l'Espagne, sur des terres où il a l'habitude de se montrer décisif et de cultiver des statistiques de star continentale.