Une équipe à maturité

Finalement, il n'y a pas eu de piège. Tout du moins, les Français ne sont pas tombés dedans. Jouer un premier tour à Vancouver, soit de l'autre côté du globe, n'a pas été de tout repos, mais n'a pas eu d'effets néfastes pour ce début de campagne 2012 si spéciale pour la bande de Guy Forget. Pour cette saison qui devrait être la dernière pour le capitaine des Bleus, les Tricolores ont finalement passé ce premier tour haut la main. Il est vrai que le forfait de dernière minute de Milos Raonic, pour le quatrième match du week-end face à Jo-Wilfried Tsonga, a facilité les choses, toujours est-il que la qualification aurait eu du mal à leur échapper après le gain du point du double de samedi.

"Je suis vraiment fier de la manière dont ils ont géré cette rencontre, a déclaré un Forget sûr du sérieux de sa troupe au Canada. On a eu un petit coup de pouce du destin, mais d’un autre côté, Gaël était diminué à son arrivée ici. Toutes les équipes sont touchées par les blessures. Milos Raonic, qui a joué le simple et le double, ce qui est toujours difficile à faire, a laissé des plumes dans ce match de double de très haut niveau." Un temps évoqué, Tsonga n'a finalement pas été aligné samedi avec Michaël Llodra, Forget ayant renouvelé sa confiance à Julien Benneteau pour le double, pourtant bousculé la veille par Milos Raonic. Si sa titularisation en simple a laissé quelques regrets, ce choix là a été payant. "On a pris des claques, commis des erreurs, mais on a appris aussi pas mal de nos échecs, assure le capitaine des Bleus. Aujourd’hui, cette équipe est arrivée à maturité."

Cette maturité évoquée semble arrivée au moment où une équipe-cadre prend une nouvelle forme autour de Jo-Wilfried Tsonga, seul personnage incontournable de l'équipe. Derrière lui, Gaël Monfils semble être le N.2 tricolore naturel, même si Gilles Simon est classé mieux que lui d'un rang à l'ATP (12e et 13e). Et en double, Guy Forget est revenu sur le duo Llodra-Benneteau qui a fait ses preuves en 2010 avant la blessure au poignet du Bressan, et vers lequel le capitaine tricolore a accordé toute sa confiance au Canada. "C’est aux joueurs de se rendre indiscutables. Par leurs résultats, leur état d’esprit aussi, a insisté Forget qui n'a pas oublié de mentionner Richard Gasquet et Gilles Simon dans les autres individualités susceptibles d'être sélectionnées.

"On ne peut pas dire que l'on a gagné à trois. On était quatre. Gaël était là, a souligné Tsonga. On savait que l’on pouvait compter sur lui s’il y avait eu un cinquième match. Le double a été juste énorme. Cette équipe fonctionne bien comme ça." Si certains n'aiment pas parler de leadership exclusif en ce qui le concerne, force est de constater que sans Jo-Wilfried Tsonga, les Bleus n'auront aucune chance de soulever le Saladier d'Argent. Cela ne fait aucun doute pour Jean Gachassin. "Tsonga, c’est le boss !", assure le président de la Fédération Française. Avec lui, on sait où l’on va. Il a envie de gagner, de remporter cette Coupe Davis, on le sent sur le terrain. Il sait entraîner les autres dans son sillage. C’est un meneur." Un meneur qui a terriblement manqué lors de la finale 2010 en Serbie, mais qui a montré ses limites en demi-finales 2011 sur la terre battue espagnole face à Rafael Nadal.

Cette terre battue est pourtant la surface fortement pressentie pour accueillir les Etats-Unis en quarts de finale. Les Américains sont allés dynamiter 5-0 la Suisse à Fribourg, réduisant à néant les chances de Roger Federer de remporter la Coupe Davis, créant par là même des tensions entre l'ex-N.1 mondial et Stanislas Wawrinka. Ce ne seront pas les Helvètes qui seront reçus en France du 6 au 8 avril prochain, dans un lieu et sur une surface encore à définir, mais la bande à Jim Courier où Mardy Fish, John Isner, les frères Bryan, voire Andy Roddick et Sam Querrey, ne seront pas à prendre à la légère.

"On ne fera pas l’erreur qu'a peut-être commis la Suisse, jouer en altitude", prévient Guy Forget, qui veut "une surface intermédiaire", "plutôt lente". "Il faut trouver la surface qui nous convient et qui en même temps n'avantage pas les Américains et il ne faut pas choisir une surface extrême, que ce soit rapide ou lente, analyse-t-il. Il faut éviter à tout prix les rebonds très hauts, car un garçon comme (John) Isner est un poison dans ces conditions. La terre battue est une possibilité mais pas forcément la seule." "Si c'est en salle sur dur, des villes comme Pau ou Nancy ont déjà fait part de leur intérêt, a précisé Jean Gachassin. Mais si c'est sur terre battue, et en plein air, il faudra encore chercher. Dans ce cas, pourquoi pas sur la Côte d'Azur ou dans le Sud, côté Languedoc ?"

Sur la Côte d'Azur ou ailleurs, la "route est encore longue" avant la finale. Si les Bleus battent les Etats-Unis, ils recevront ensuite l'Espagne ou l'Autriche en demi-finales, une nouvelle fois sur le sol français. De quoi garder des espoirs pour atteindre la finale, comme en 2010. Guy Forget est le premier à croire pour les autres. "S’ils arrivent à créer un climat de confiance, de solidarité, comme ils ont réussi à le faire cette semaine, s’ils arrivent à être en forme pour les grandes rencontres, avec en plus un peu de folie du public, ce sera peut-être notre année. J’espère qu’ils prennent conscience, comme moi, que des opportunités de gagner la Coupe Davis, on n’en a pas beaucoup. Dans une carrière, on peut en avoir deux ou trois. On en a déjà laissé passer une en Serbie. Il y en aura peut-être une autre cette année, ou l’année prochaine. Je souhaite vraiment que ce groupe puisse vite ramener la Coupe Davis en France. Il en a le potentiel."