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"Je suis devenue adulte"

Eurosport
ParEurosport

Publié 24/12/2009 à 11:31 GMT+1

Avant son retour à la compétition en janvier, Justine Hénin s'est confiée à Eurosport. Avec une grande sincérité, la Belge le reconnait, arrêter sa carrière fut une erreur. Elle n'y était pas prête. Au prix d'une introspection parfois douloureuse, elle revient aujourd'hui pleinement épanouie.

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Crédit: Eurosport

JUSTINE HENIN, Quelques semaines après l'annonce de votre retour, que ressentez-vous: excitation, nervosité", angoisse?
J.H. : C'est beaucoup d'émotion. Je pensais que "moi sur un court de tennis" appartenait au passé. Alors, c'est vrai que je ressens toutes ces émotions. Excitation, impatience et une grande faim de tennis. C'est vraiment magique. Je reviens avec un état d'esprit différent. Je veux que cette nouvelle carrière soit plus sereine. Je veux prendre davantage de plaisir. Je veux réaliser à quel point cette vie est précieuse. Par le passé, j'avais l'habitude d'accomplir les choses dans la souffrance. J'ai tiré beaucoup de forces des évènements douloureux qui me sont arrivés dans la vie. Je me connais beaucoup mieux. J'ai beaucoup appris ces deux dernières années. J'ai finalement réussi à m'accepter comme je suis, avec mes forces et mes faiblesses.
Cette notion de plaisir, ce sera vraiment la grande différence entre l'ancienne et la nouvelle Justine Hénin?
J.H. : Bien sûr. Vous savez, quand j'ai arrêté ma carrière, ce fut un choc pour beaucoup de gens. Mais pour moi, c'était un soulagement. J'avais besoin de sentir que j'étais vivante en dehors du tennis. Ce sport vous prend énormément d'énergie. J'avais besoin de me poser les questions qu'une personne normale de 25 ans se pose. Mais j'étais encore jeune, alors j'ai pu recharger mes batteries, physiquement, mentalement, émotionnellement.
Ce retour, est-ce une décision subite ou mûrement réfléchie?
J.H. : J'ai commencé à me demander si cette décision d'arrêter était définitive. Comment est-ce venu? C'est difficile à décrire. Une petite voix dans ma tête. Federer qui gagne Roland-Garros et me fait réaliser que, de mon côté, je dois encore remporter Wimbledon. Mais j'ai pris ma décision seule. Je n'en ai parlé à personne, pas même à Carlos (NDLR: Rodriguez, son coach). Et c'est ce qui est bien. J'ai été capable de décider par moi-même. Quand vous avez cinq ou six ans, vous voulez devenir une championne mais ça n'a rien de logique, vous ne savez pas ce que c'est. Aujourd'hui, je fais un choix en mesurant pleinement ce qu'il implique. Je suis enfin devenue une adulte.
Avez-vous ressenti que vous n'étiez pas prête à changer de vie?
J.H. : Exactement. Je suis impatiente, c'est mon problème. Je veux tout en même temps. Six mois avant d'arrêter ma carrière, j'ai commencé à me poser des questions. J'ai brûlé les étapes. J'étais impatiente de fonder une famille, avoir une vie normale, plus équilibrée. Puis j'ai réalisé que j'avais commis une erreur. Je ne suis pas pire ou meilleure qu'une autre. Je suis juste différente. J'ai toujours de l'ambition. J'ai besoin d'adrénaline, d'émotion et je n'étais pas prête à embrasser une vie calme et normale. Je m'étais inscrite dans un certain confort qui ne me correspond pas.
Y a-t-il eu des moments difficiles au cours de votre période d'inactivité?
J.H. : Oui. Surtout au bout de quatre mois. Au début, c'était l'euphorie. J'étais libre. Libre de faire tout ce que je n'avais jamais pu faire, sans excès bien sûr. Le simple fait de profiter de la vie sans contrainte horaire, passer du temps avec ceux que j'aime. Mais au bout de quatre ou cinq mois, vous êtes vide. Vous devez reprendre à zéro pour savoir comment fonctionner. Vous devez reprendre confiance en vous sans une raquette de tennis. J'ai réussi à le faire et c'est ce qui me permet de revenir aujourd'hui. Mais j'ai ressenti des moments de grande solitude.
Assimileriez-vous cela à de la dépression?
J.H. : Bien sûr. Je suis passée par ces moments. Je n'ai aucune honte à l'admettre. C'est humain et je l'accepte. Dans ces moments, peu importe si vous êtes très entourée, vous vous sentez quand même seule. C'est normal. Il faut accepter de traverser cette période où vous vous cherchez. Si vous êtes assez courageux pour franchir ce cap, tout devient plus facile après ça.
Etes-vous heureuse aujourd'hui?
J.H. : Oui, complètement. J'ai toujours des doutes, bien sûr, mais je vois clairement où je vais. Je me connais beaucoup mieux et ça n'a pas de prix. Je ne vois plus les choses en noir et blanc. Je ne suis plus tolérante aussi, plus mature. J'ai évolué. Après ma première exhibition, j'ai senti que j'étais capable de m'exprimer beaucoup mieux et plus librement.
Qu'avez-vous pensé du retour de Kim Clijsters et de sa victoire à l'US Open?
J.H. : C'est très impressionnant. Elle est quasiment la seule à pouvoir accomplir quelque chose comme ça. Elle est imprévisible. Je la connais depuis longtemps et il y a une part d'elle qui est un peu folle, dans le bon sens du terme, et ça l'aide sur le court. Sa victoire veut-elle dire qu'il y a une faiblesse générale dans le tennis féminin? Peut-être. En partie. Mais ça reste une performance incroyable. Revenir en Grand Chelem comme ça et rester maîtresse de ses émotions, franchir toutes les marches, battre les deux soeurs Williams à New York... Vraiment, chapeau. C'est une source de motivation pour moi. Kim et moi, nous n'aurions jamais été aussi fortes si l'autre n'avait pas été là. Je sais qu'elle pense la même chose. On se motive. Nous n'avons pas beaucoup de choses en commun en dehors du tennis, mais il y a beaucoup de respect entre nous et nous n'avons jamais perdu ça. J'espère que nos chemins vont vite se croiser sur les courts...
D'après votre entourage, vous êtes en forme comme jamais...
J.H. : J'ai été opérée des yeux et du genou. J'ai laissé mon corps se reposer. D'un autre côté, il va devoir se réhabituer à une certaine tension, à la pression. Votre cerveau doit aussi se trouver en état d'alerte d'une certaine manière. Je fais ça en reprenant quelques habitudes. Je dois faire de la prévention par rapport aux blessures, car à 27 ans, je ne peux plus tout me permettre.
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