Guy Forget : "Rafael Nadal s'est excusé comme un enfant qui venait de faire une bêtise"

En général, lorsqu'une conférence de presse est donnée à l'improviste, ça sent la mauvaise nouvelle. Lorsque celle de Rafael Nadal a été annoncée vers 13h30, c'est le Rolex Paris Masters qui a retenu son souffle. A force de craindre le pire, celui-ci est arrivé tel un couperet vers 14h : la tête enfoncée dans sa casquette, l'Espagnol a annoncé qu'il stoppait bel et bien la machine, avant même de disputer les quarts de finale du Masters 1000 face à Filip Krajinovic... qui, pour le coup, a eu du mal à réaliser.

"En fait, c'est incroyable, je suis sous le choc, a admis le Serbe. C'est un objectif pour tous les joueurs de jouer contre un joueur numéro 1 mondial. C'est pour ça que vous vous entraînez et jouez au tennis, et tout d'un coup je me retrouve en demi-finale, en Masters 1000 ! Ce sera la première fois, pour moi. C'est vraiment irréel." Irréel, ce n'est pas ce que diraient les spectateurs qui ont assisté à la rencontre de la veille entre Nadal et Cuevas jeudi soir. Le troisième set a été compliqué à gérer pour le numéro un mondial. Si son punch est resté le même, ses déplacements n'étaient clairement pas bons.

"J'ai eu un traitement pour mon genou jeudi soir pour essayer de jouer aujourd'hui. Malheureusement, c'est impossible, a simplement expliqué l'Espagnol. Je ne peux pas être compétitif au niveau où je veux être. Et je ne veux pas jouer avec ce pourcentage de capacité que j'ai aujourd'hui. Il a fallu que je prenne la décision de me retirer du tournoi. Je suis désolé pour les fans, désolé pour le tournoi. J'ai parlé avec les personnes du tournoi. Guy Forget m'a dit : "merci d'avoir essayé". " Le directeur du tournoi avait peur déjà que le Majorquin prenne la même tangente que Roger Federer, qui a jeté l'éponge avant même de jouer. Nadal, lui, a pris la peine de venir. Et il n'a pas manqué de le souligner.

"Bien sûr, je vais revenir, revoir les médecins. Je l'ai fait après Shanghai. J'ai pris la décision de venir ici quand même. Alors, je vais faire des traitements. Les traitements ont bien marché dans le passé. Alors la question pour moi ce n'est pas Londres, la question est à plus long terme. On va voir ce qui va se passer." Bien sûr, personne ne manquera de souligner qu'il avait beaucoup à gagner en venant jouer à Paris : il a sécurisé sa place de numéro un mondial pour la fin de la saison en remportant son match d'ouverture contre Hyeon Chung. Mais il serait réducteur de penser que Nadal n'est venu que pour cela. Son match face à Pablo Cuevas montre qu'il a tout donné jusqu'au bout de ses possibilités.

Guy Forget précise : "Vous le connaissez comme moi, vous savez que s'il y a bien un garçon qui est dur au mal c'est lui, s'il y a bien quelqu'un qui respecte ses engagements, c'est lui, s'il y a bien quelqu'un qui donne sa parole et qui la tient, c'est lui. Quelques jours avant le tournoi, je crois que c'est au début du tournoi de Bâle, dans lequel il avait déclaré forfait, j'avais appelé Carlos Costa pour venir aux nouvelles, il m'avait dit : 'Ecoute, il a tout juste retapé la balle, il ne fait aucun pas de déplacement sur le terrain mais il va venir, il veut venir. Tu peux compter sur nous', ce qui m'avait, je ne vous le cache pas, beaucoup soulagé."

Soulagement qui s'est vite transformé quelques jours plus tard. "Jeudi soir, Nadal grimaçait. Le docteur Montalvan lui a fait un traitement le soir et le lendemain matin. A un moment, il me dit : 'Je ne peux même pas me déplacer. Je ne peux même pas rentrer sur le terrain'. Il s'est excusé auprès de moi dix fois, il m'a dit: 'Je suis désolé, désolé', comme un enfant qui vient de faire une bêtise. Je lui ai dit : 'Je suis désolé pour toi. On est triste de te voir quitter le tournoi'. Je le remercie d'avoir été présent, compte tenu de tous les forfaits auxquels on a été confrontés depuis le début de l'annonce de l'événement."

Étant donnée son histoire avec ses tendinites aux genoux, Nadal repart de Paris avec un sentiment d'inquiétude plus ou moins marqué. En voulant gagner ce tournoi qu'il n'a encore jamais décroché dans sa carrière, il s'est peut-être aussi fermé la porte d'une belle performance également au Masters de Londres, dernier grand titre qui manque à son palmarès. Croisé dans les coulisses du tournoi parisien, son agent glissait tout de même : "Il va aller à Londres à coup sûr, mais on ne sait pas encore s'il va jouer." A l'heure qu'il est, c'est le cadet de ses soucis : rater le début de la prochaine saison serait un coup autrement plus douloureux.