Benoît Paire : "C'est un peu une deuxième carrière qui commence"

La roue tourne vite. Dans les deux sens. Benoît Paire a connu une chute spectaculaire pendant des mois et sa carrière semblait lancée sur un dangereux toboggan. Il a touché un plus bas au début de l'année. Redescendu aux alentours de la 150e place mondiale, le Français a écumé les challengers et les qualifications sur le grand circuit. De sa victoire contre Julien Benneteau au 1er tour de l'US Open 2014 jusqu'au mois d'avril 2015, il n'a pas signé une seule victoire face à un joueur du Top 100.

Mais la traversée du désert est bien derrière l'Avignonnais. Lundi, il a peut-être définitivement remis sa carrière sur les rails en sortant Kei Nishikori après un match exemplaire. "C'est une grosse et belle victoire, sans doute la plus importante de ma carrière", a-t-il concédé à sa sortie du court Louis-Armstrong. Il revient de loin, Benoît Paire, mais cette victoire ne sort pas de nulle part. Il y a un petit moment que, doucement mais sûrement, il a redonné un sens à son aventure. La saison sur terre battue lui avait redonné confiance. Un bon Roland-Garros et, surtout, son premier titre, à Bastad, au cœur de l'été, ont fini de le relancer.

Du coup, même confronté à Kei Nishikori, finaliste en 2014 de ce même US Open et estampillé numéro 4 mondial, il y croyait. "Je savais que je pouvais le battre, ce n'est pas comme si je jouais contre Roger Federer, le jeu de Kei me convient, je sais que je peux le breaker, a expliqué Paire. Il n'a pas de coup faible dans son jeu, mais il ne fait pas mal non plus comme Djokovic ou Federer peuvent le faire. Pour moi, c'est moins compliqué de le jouer lui."

Malgré tout, il l'admet, il ne faisait pas le malin. D'abord parce que, depuis son arrivée en Amérique du Nord, ni son jeu ni ses résultats ne l'incitaient à un optimisme déraisonné. "Ma dernière semaine d'entraînement était même pourrie, c'était compliqué, je n'avais pas de bonnes sensations sur mes frappes, a-t-il avoué. Puis quand j'ai vu le tirage au sort, je me suis dit que cela allait être difficile. Il a atteint la finale l'an dernier ici, je me suis dit qu'il fallait que je prenne du plaisir et que je m'amuse. Mon entraîneur m'a dit aussi: 'Il faut, quand tu sors du court, que tu aies perdu ou gagné, que tu te sois amusé!'"

Du plaisir, Benoît Paire en a pris. Il en a donné aussi. Car le voir impliqué, déterminé et agressif à ce point face à un adversaire de cette envergure, c'est un vrai bonheur. Et le fait d'avoir surmonté la perte du troisième set, puis ces deux balles de match contre lui dans le jeu décisif du quatrième, donne plus de relief encore à sa victoire. "A deux sets à un pour lui, reprend le Français, ce n'était pas facile pour moi, je ne me sentais pas bien physiquement, il faut être honnête, j'ai eu pas mal de chance, car il a eu deux balles de match, je ne les ai pas sauvés, c'est lui qui me les a offerts. Il était nerveux. Mais j'ai tenu bon dans la tête."

Le poids des 1200 points à défendre a effectivement dû peser sur le rendement du jour de Nishikori, assez loin de son meilleur niveau. Tant mieux pour Benoit Paire, qui n'a rien volé. "C'est un nouveau Benoît au niveau des efforts au quotidien, je suis plus calme aussi, plus serein et j'ai les bonnes personnes qui m'aident autour de moi. C'est un peu une deuxième carrière qui commence, je veux aller en deuxième semaine en Grand Chelem." Il vient de s'en donner l'opportunité. Forcément, maintenant, après l'exploit, le plus dur est devant lui. Pas tennistiquement parlant, mais dans la gestion des évènements.

"Cette victoire me donne confiance pour la suite, le prochain match sera compliqué, c'est sans doute le plus difficile, mais je ne veux pas m'arrêter là, je veux aller le plus loin possible", promet-il. Perdre contre Ilhan après avoir sorti Nishikori serait dommage, forcément. Cela ressemblerait presque à du Benoît Paire. Enfin, à l'ancien Benoît Paire. Celui qui semblait tellement loin lundi. Pourvu qu'il reste là où l'Avignonnais l'a laissé…