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Wimbledon : Marcus Willis, l'incroyable histoire du prof de tennis qui va défier Roger Federer

Laurent Vergne

Mis à jour 29/06/2016 à 14:21 GMT+2

WIMBLEDON – Inconnu au bataillon il y a encore trois jours, Marcus Willis est la star de ce début de quinzaine. Sorti des pré-qualifications puis des qualifications, le Britannique de 25 ans a joué et remporté son tout premier match sur le grand circuit contre Berankis. Mercredi, en guise de récompense, il affrontera un certain Roger Federer.

Marcus Willis

Crédit: Imago

Vous n'aviez jamais entendu parler de Marcus Willis ? Pas de panique. Tout est normal. Mais si, en plus d'aimer le tennis, vous êtes sensibles aux contes de fées, son histoire ne peut pas ne pas vous toucher. Voilà un joueur de bientôt 26 ans, 772e mondial, qui, loin des strass des sommets du circuit et des stars du Top 10, galère depuis des années pour tenter de vivre de son métier. Lundi, il a disputé son tout premier match sur le circuit principal. Il l'a gagné. Mercredi, il jouera le deuxième face à Roger Federer. Un scénariste hollywoodien aurait écrit ça que son script aurait fini à la découpeuse pour déficit de crédibilité.
D'autant que, pour vraiment bien faire les choses, cette histoire se passe à Wimbledon, temple du tennis, et que Cendrillon, aka Marcus Willis, est évidemment un joueur de sa Majesté. Pour gagner sa place dans le grand tableau, le 23e joueur britannique a dû surmonter un véritable parcours du combattant : trois matches pour se qualifier pour les… qualifications, puis trois autres la semaine dernière pour se hisser parmi les 128 heureux élus.
Marcus Willis versus Roger Federer - Wimbledon 2016

Licencié à… Capdenac, dans l'Aveyron

Il y a notamment battu le Japonais Yuichi Sugita, 99e mondial. Au dernier tour des qualifs, il s'est imposé face au Russe Daniil Medvedev. Lorsqu'il a mené 5-2 dans le troisième set, Willis a tremblé et perdu son service. Mais pas au point de le priver d'un happy end. "Oui, j'ai été nerveux, admet-il. Vous savez, je n'avais jamais servi pour une place dans le tableau final de Wimbledon. Mais à 5-4, je me suis dit 'tu n'as rien à perdre, vas-y, profite du truc' et c'est passé". C'était déjà, en soi, quelque chose d'énorme pour lui. Mais lundi, la belle histoire a donc pris une autre dimension.
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Marcus Willis à Wimbledon 2009

Crédit: Panoramic

Sur un court numéro 17 surchauffé, dans une ambiance digne de la Coupe Davis, Willis a martyrisé un Ricardas Berankis complètement perdu. Le Lituanien, pourtant classé 653 places devant lui à l'ATP, a été balayé en trois sets (6-3, 6-3, 6-4) face à ce prof de tennis (si ça vous intéresse, il prend 30 livres de l'heure, mais les tarifs pourraient bien augmenter), licencié à… Capdenac, dans l'Aveyron. Il y a trois semaines, au moment où Novak Djokovic et Andy Murray disputaient la finale de Roland-Garros, Marcus Willis jouait donc en Interclubs avec Capdenac. Trois semaines plus tard, il est à Wimbledon, et jouera mercredi face au maître des lieux, Roger Federer. Sans doute sur le Centre court.

Federer : "Une des plus formidables histoires dans notre sport depuis très longtemps"

Un Federer visiblement touché par l'improbable aventure de son prochain adversaire. "C'est une des plus formidables histoires dans notre sport depuis très longtemps", a soufflé le Suisse lundi après son match contre Guido Pella. Deux joueurs vont se croiser, mais aussi deux mondes. Deux images du tennis. "Non, je n'ai jamais parlé à Roger Federer. Je ne crois pas l'avoir vu joué au Futures de Hammamet cette année", a rigolé Marcus Willis, en référence au tournoi tunisien, le seul du circuit pro sur lequel il se soit aligné cette saison. Il s'y était incliné en quart de finale, face au Portugais Pedro Sousa, 785e mondial. Gains sur la semaine : 292 dollars. Son "prize money" total sur l'année 2016 en simple, auxquels il convient d'en ajouter… 64 en double.
C'est parce qu'il n'en pouvait plus de tourner en rond et de galérer que le natif du Berkshire a eu envie de tout plaquer. Entre blessures et absences de résultats, 2015 avait viré au cauchemar. Au mois de novembre, totalement hors de forme, avec… 20 kilos en trop, il dispute un tournoi challenger aux Etats-Unis. Devant son embonpoint manifeste, des spectateurs le surnomment "Cartman" en référence au personnage de Southpark."C'était hilarant, se souvient-il. Et ils avaient raison. Mais aujourd'hui, je suis dans la meilleure forme de ma vie et en excellente condition physique. J'ai encore deux ou trois kilos à perdre, mais ça n'a plus rien à voir."
Cette rédemption, il la doit à sa compagne, Jennifer Bate. Il l'a rencontrée l'an dernier à un concert et c'est elle qui, début 2016, l'a convaincu de ne pas jeter l'éponge. "Fin 2015, début 2016, j'étais blessé aux adducteurs, raconte-t-il. J'avais quelques dettes et je n'arrivais plus à trouver des raisons de me motiver. Je ne voulais même plus sortir de mon lit. C'est elle qui m'a secoué. Elle est formidable, toujours très positive. Elle m'aide à regarder droit devant." "Il voulait abandonner le tennis et partir aux Etats-Unis pour tout plaquer, a confirmé Miss Bate dans les colonnes du Daily Mail. On se connaissait depuis une semaine ! Mon frère, qui adore le tennis, m'a dit: 'ce type a du talent, il doit s'accrocher', alors j'ai dit à Marcus de croire en lui et d'essayer une dernière fois".

De 350 dollars à 50 000 livres

Par une bien étrange trajectoire, six mois plus tard, Marcus Willis est aujourd'hui LA grande histoire de ce début de Wimbledon. La presse anglaise, et au-delà, ne parle que de lui. Son match contre Federer, mercredi, sera le plus attendu de tous. "Tout ça est complètement surréaliste, mais c'est aussi le travail qui paie", note-t-il. A tous les sens du terme. Ses gains sur la saison vont sensiblement augmenter. Après les 350 dollars cumulés à Hammamet, son parcours à Wimbledon va lui rapporter au moins… 50 000 livres (environ 60 000 euros), le total réservé aux joueurs atteignant le deuxième tour. Au passage, il va se retrouver aux abords de la 415e place au classement mondial.
Mais l'histoire de Marcus Willis n'est affaire ni de chiffres, ni d'argent, ni de points ATP. Juste l'histoire d'un type persuadé d'être arrivé au fond d'une impasse et qui, à force de conviction et de persévérance, a fini par trouver un peu de lumière. Lui dit que des champions comme Andy Murray et Roger Federer sont des sources d'inspiration. C'est difficilement contestable. Marcus Willis, de par son parcours, en est une autre.
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