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Lemaitre : "Maintenant, je cours pour ma gueule et ça marche"

Laurent Vergne

Mis à jour 19/08/2016 à 07:45 GMT+2

JO RIO 2016 – Le revoilà ! Cinq ans après s'être révélé au monde entier en décrochant le bronze aux Mondiaux de Daegu, Christophe Lemaitre a signé une performance similaire aux Jeux de Rio. Le voilà médaillé olympique. Pas une revanche, mais une sacrée renaissance pour le sprinter français, qui doit beaucoup à son changement d'approche.

Christophe Lemaitre, médaillé de bronze du 200m des JO de Rio

Crédit: AFP

Cinq ans. Cinq ans qu'il attendait ça. Depuis sa médaille d'argent et ses 19"80 à Daegu, qui lui avaient offert la médaille de bronze aux Mondiaux. A 21 ans, ce devait être un tremplin vers les sommets. Ce fut une chausse-trappe. Cinq années de déceptions, de doutes et de blessures, aussi, surtout, ont suivi. Puis Christophe Lemaitre a resurgi jeudi, en décrochant cette même médaille de bronze, olympique cette fois. A nouveau sur 200 mètres. "Etre sur le podium, c’est incroyable", a-t-il soufflé. Une médaille arrachée pour une poignée de millièmes. La roue a tourné, enfin.
Longtemps, on a pourtant cru qu'il n'y arriverait pas. Lui non plus, d'ailleurs. Car ses jambes n'ont pas répondu comme il le souhaitait dans cette finale. "Je me sentais moins bien, j’ai eu l’impression de revivre Monaco ou Rome, je n’ai pas retrouvé les sensations de la demi-finale, a expliqué le Savoyard. J’avais mal aux jambes, je sentais que c’était moins fluide. J’ai dû piocher." Et voir Usain Bolt, derrière lui, le croquer presque d'entrée, a fini de lui faire mal. "Il est revenu tellement vite sur moi, je me suis dit 'là, c'est pas bon signe', il m'a tué là", sourit Lemaitre.
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Usain Bolt et Christophe Lemaitre en finale du 200m des JO de Rio

Crédit: AFP

A quoi tient le bonheur ?

En réalité, Bolt était juste sur sa planète et c'est plutôt par rapport au couloir 8, juste devant lui, celui de Churandy Martina, que Lemaitre a calqué sa course. "Durant la course, je savais qu’il fallait que je regarde où il était, parce que s’il était devant moi, ça voulait dire que je ne faisais pas le podium". Le Français a bien doublé le Néerlandais, mais restait une menace, celle d'Adam Gemili, au couloir 2. "Je ne pouvais pas le voir, il était trop loin de moi", avoue-t-il.
Mais au bout de ce 200 mètres, les deux hommes sont sur la même ligne. Il faudra quelques secondes, qui ont paru une éternité à tout le monde, et surtout aux intéressés, pour les séparer aux millièmes. "Avant que le résultat tombe, ça a mis du temps, et quand j’ai vu que ça se jouait au millième près je me suis dit 'merde, c’est vraiment serré'." Ça l'était. Puis le verdict est tombé : Lemaitre troisième, Gemili quatrième. "Ça aurait été dur de finir quatrième comme ça, avoue le recordman de France. Je pensais que ça se jouerait plus tôt, mais j’ai bien fait de casser trois mètres avant l’arrivée". A quoi tient le bonheur ?
Pour lui, c'est donc la fin d'un tunnel de cinq années. L'occasion de mettre quelques points sur les i, aussi. "Il a fait fermer quelques bouches ce soir (jeudi)", a témoigné Kevin Mayer, l'autre médaillé bleu du jour. Mais Lemaitre l'assure, il n'y a "pas de revanche". "C'est une renaissance, oui, mais pas une revanche", insiste-t-il. S'il concède que les critiques ont pu faire "mal à mon (son) orgueil", parce que "quand tu ne fais pas de performances et qu'en plus tu dois supporter les critiques, c'est dur", il a arrêté de se focaliser dessus. "Honnêtement, j’ai couru juste pour moi. Pas pour ceux qui disaient que j’étais fini ou que j’étais trop refermé sur moi. J’ai arrêté de courir pour les autres. C’est un changement récent mais, maintenant, je cours que pour ma gueule et ça marche. Je suis devenu adulte."
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Churandy Martina, Usain Bolt, Christophe Lemaitre, Andre Grasse lors de la finale du 200m des Jeux de Rio 2016

Crédit: AFP

Je préfère être médaillé en 20"12 que quatrième en 19"80"
Cette médaille, il la place d'ores et déjà "au-dessus de celle de Daegu". Parce que ce sont les Jeux. Le sommet. Et parce qu'il en mesure davantage le prix aujourd'hui. "En 2011, tout me réussissait, je ne connaissais pas encore l'échec", rappelle-t-il. Plus sûr de lui, Lemaitre a pris de la caisse, en termes de personnalité. C'est criant. On le sent plus fort. Au final, il ne regrette pas ses années de doutes. "Je crois que les années de galère m’ont quand même fait du bien, a-t-il d'ailleurs estimé au Stade Olympique. Elles m’ont permis de réfléchir, de douter, et, au bout du compte, de me métamorphoser. Je savais que ce n’était pas mort, que j’allais revenir."
Maintenant, il va pouvoir savourer. Il attend le coup de fil de Pierre Carraz, son entraîneur historique. "Je sais déjà ce qu'il va me dire : 'tu aurais dû courir plus vite, vieux con'. Il me dit toujours ça, 'vieille chèvre, vieux con'". Mais lui aussi doit être sacrément heureux. Puis Christophe Lemaitre pense aussi, déjà, à la suite. "J'espère que ce n'est pas un 'one shot'. J'espère qu'il y en aura d'autres." Et s'il n'a pas encore retrouvé les niveaux de performances de son record de Daegu, c'est aujourd'hui sans importance. "Je préfère être médaillé en 20"12 que quatrième en 19"80", claque-t-il. Jeudi soir, sur la piste comme au micro, Lemaitre avait réponse à tout. Et c'est comme ça qu'on l'aime.
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