Les maux bleus

Comme à Athènes en 2004, le basket français ne sera pas représenté aux JO de Pékin l'année prochaine, une absence qui fait tache vu le potentiel des équipes de France et qui provoque une profonde remise en question de tous les acteurs d'un sport tombé en décrépitude. Après les garçons, seulement huitièmes à l'Euro espagnol en septembre, ce sont les filles qui ont donné la touche finale à un beau fiasco en terminant à la même place de leur Euro en Italie.

Un résultat d'ensemble catastrophique pour une discipline qui cherche désespérément à retrouver son statut de sport collectif N.2 abandonné à un rugby aussi admiré que jalousé. Comme un symbole, c'est le jour même où le XV de France a fait pleurer de bonheur dans les chaumières avec une victoire de bande dessinée sur les All Blacks que l'équipe de France de basket féminine a rejoint son homologue masculine au cimetière des désillusions.

Un gouffre sépare désormais les deux sports et il n'est pas près d'être comblé car les équipes nationales de basket ne feront pas rêver grand monde dans un proche avenir. Au lieu d'aller chercher des médailles en Chine, elles devront en effet se farcir des qualifications à l'Euro-2009 bien moins sexy et essayer d'abord de se reconstruire en interne avant de repartir à la conquête du public.

"En termes d'exposition ça va forcément être difficile" , soupire le président Yvan Mainini qui n'a pas mâché ses mots dimanche: "Ces deux Championnats d'Europe reflètent l'état de notre basket. J'ai honte du jeu qu'on a pratiqué. Avec les moyens qu'on a on doit faire autre chose, on est à la risée de toute l'Europe." Après deux dernières campagnes respectables, 2007 devait pourtant être l'année du grand bond en avant. Au lieu de quoi, on a eu droit à un double crash qui offre des similitudes troublantes.

Que ce soient les filles ou les garçons, ce sont en effet les mêmes maux bleus, tous identifiés depuis des années sans que rien ne change: une adresse catastrophique, une maîtrise émotionnelle insuffisante, une faillite face à la défense de zone et une incapacité notoire à tuer les matches. Qui est responsable ? Les sélectionneurs Claude Bergeaud et Jacky Commères ? Le premier, durement critiqué, attend le jugement dans les jours ou semaines à venir. Le deuxième a proposé sa démission dimanche, ce dont le président Mainini a pris acte sans l'entériner pour l'instant. Si les deux, de par leur fonction, sont forcément en première ligne, le basket français ne pourra cependant pas faire l'économie d'une remise en question plus profonde.

Comment expliquer par exemple que les équipes de France n'arrivent pas à transposer les brillants résultats obtenus dans les compétitions de jeunes ? "Au-delà de 18 ans, les choses nous échappent", constate le DTN Jean-Pierre De Vincenzi qui a indiqué dimanche: "On ne va pas se débiner, on a notre part de responsabilités. Et s'il le faut, je partirai" . "Ce n'est pas la DTN d'un côté et la fédération de l'autre mais c'est un tout", a balayé Yvan Mainini, qui a cependant reconnu qu'il y avait des choses à revoir en termes de formation.

Jusqu'à imaginer une révolution culturelle pour les équipes de France, cramponnées depuis des années à leurs qualités défensives, ce qui ne suffit plus dans un contexte de plus en plus relevé. "Dans le passé, on n'était pas compétitifs chez les jeunes et, pour essayer de compenser, on a beaucoup travaillé sur le côté défensif avec des joueurs athlétiques, explique De Vincenzi. Aujourd'hui, on a un problème récurrent avec l'adresse. On voulait changer un peu les choses cette année, mais on s'est pris les pieds dans le tapis." Sans jamais arriver à se relever.