Kyrie Irving transféré des Brooklyn Nets aux Dallas Mavericks : cinq questions pour un trade

Cette fois, le psychodrame Kyrie Irving n'a pas traîné en longueur. A peine 48 heures après l'annonce de sa volonté de départ des Brooklyn Nets, le meneur a trouvé preneur. Le voilà envoyé chez les Dallas Mavericks, en compagnie de Markieff Morris, contre Spencer Dinwiddie, Dorian Finney-Smith, un premier tour de draft 2029 et deux seconds tours. Irving va désormais faire équipe avec Luka Doncic pour tenter de faire grimper les Mavericks en haut de la Conférence Ouest. Le coup de poker de la franchise texane secoue le microcosme NBA, à défaut d'apporter des garanties évidentes. Et les interrogations sont nombreuses.

Pour n'importe quelle franchise, l'ajout d'un talent comme Kyrie Irving est un sérieux atout. Formidable attaquant, parmi les meilleurs manieurs de ballon de l'histoire, le joueur de 30 ans est un All-Star sans la moindre discussion cette saison (27,1 points, 5,1 rebonds, 5,3 passes), titulaire même du match des étoiles le 19 février prochain. Il va surtout soulager Luka Doncic, qui doit s'occuper de tout offensivement - distribution comme finition - depuis le début de saison et le départ de Jalen Brunson l'été dernier à New York.

Avoir une deuxième star dans l'effectif ne fera pas de mal, alors que Dallas ne peut rien viser d'autre que les sommets avec un tel talent qu'est Doncic. De là à en faire immédiatement un prétendant… Les Mavs sont pour l'instant 6e de l'Ouest, dans le train ultra serré entre Sacramento (3e) et les Los Angeles Lakers (13e) qui se tiennent à cette heure en cinq matches seulement. Si l'intégration d'Irving se passe bien, ce coup de pouce peut offrir un meilleur classement en saison régulière à Dallas. Les bookmakers de Las Vegas sont plutôt confiants. La venue d'Irving ne résout pas pour autant toutes les limites des Mavericks, notamment défensives (24e rating défensif, 6e la saison dernière).

Luka Doncic, meneur qui a besoin du ballon pour être dangereux, associé à Kyrie Irving, meneur qui a besoin du ballon pour être dangereux, est-ce bien raisonnable ? Dallas suit la tendance actuelle en NBA, où il est de plus en plus important de posséder plusieurs porteurs de balle. Comme les Mavs disposaient d'ailleurs avec Brunson la saison dernière, et avec un certain succès (finale de conférence). Surtout, de tous les magiciens balle en main, peu semblent autant capable d'évoluer ensemble sur le parquet sans limiter l'impact l'un de l'autre.

Doncic sera forcément moins ciblé par les défenses et pourrait bénéficier d'un peu plus d'espace pour laisser libre court à son imagination sans limite. Sans faire injure à ses précédents coéquipiers, aucun n'est aussi fort que Kyrie Ivring, et possède un tel pouvoir d'attraction sur les défenses adverses. "Kyrie" pour sa part est habitué de partager la gonfle avec d'autres attaquants de premier ordre : LeBron James à Cleveland, un jeune Jayson Tatum à Boston, James Harden et Kevin Durant à Brooklyn… Et la qualité de tir de son tir extérieur (39,1% à trois-points en carrière) créera un danger potentiellement létal aux arrière-gardes adverses.

Avec 28 victoires pour 26 défaites, les Mavericks se devaient de se renforcer pour être en accord avec leurs objectifs. Mais avec une masse salariale bouchée et un nombre d'atouts limités dans son effectif, le champion 2011 n'avait qu'une marge de manœuvre limitée pour aller ferrer un gros poisson. Entre en scène Kyrie Irving, basketteur fantastique mais personnage clivant. Saison tronquée pour avoir refusé de se faire vacciner contre le Covid-19, absences répétées pour "raisons personnelles", prises de position maladroites voire carrément au-delà des limites de l'acceptable (ndrl : il a été suspendu pour avoir fait la promotion d'un film antisémite)… "Kai" a sérieusement abimé son image et sa cote.

Sa volonté de quitter Brooklyn sous peine de ne pas prolonger chez les Nets l'été prochain a ouvert une porte quasi inespérée pour Dallas. Mais Irving arrive aussi avec les lourdes valises susnommées, et les doutes l'entourant. Libre dans six mois, le champion 2016 avec les Cavs pourra s'en aller sans contrepartie si la greffe ne prend pas. Recruter Kyrie Irving était un risque nécessaire, et plutôt mesuré, puisque les Mavs n'ont lâché qu'un seul premier tour de draft, sans sacrifier d'éléments d'avenir. Dans le pire des cas, l'expérience restera comme une mauvaise parenthèse, qui aura au moins le mérite de libérer plus de 42 millions de dollars de salaire l'été prochain.

Avec le coup de pression mis par le clan Irving à moins d'une semaine de la trade deadline, Brooklyn se devait d'agir. Les Nets avaient bien tenté de prolonger leur star, mais s'étaient heurtés à un refus pour ne pas avoir proposé un contrat pleinement garanti lors de la dernière saison selon Chris Haynes, insider pour TNT et Bleacher Report. Une proposition vécue comme un affront par le joueur, dont les relations avec ses dirigeants s'étaient déjà refroidies ces derniers mois.

Restait alors à trouver un deal satisfaisant, faute de pouvoir réellement espérer une proposition à la hauteur du pedigree du joueur. Les Lakers et en particulier LeBron James attendaient de pied ferme les négociations, mais ont vu leur proposition être rejetée par le président de Brooklyn, qui ne souhaitait pas que Kyrie Irving rejoigne les Pourpre-et-Or, à en croire le journaliste Marc Stein. Phoenix s'est montré intéressé dans un échange avec Chris Paul, Jae Crowder et des tours de draft selon Chris Haynes. Mais Paul est sur la fin de sa carrière, Crowder est en fin de contrat, et les Suns sont pour l'instant trop compétitifs pour que leurs choix de draft soient des plus intéressants. L'offre des Clippers - Terrence Mann, Luke Kennard, un premier tour de draft et deux inversions de premiers tours - rapportée par The Ringer pouvait être intéressante sur le papier. Mais les Nets ont préféré miser sur Dorian Finney-Smith et Spencer Dinwiddie, deux vétérans confirmés, pour tenter de rester parmi les outsiders.

Le départ de Kyrie Irving, un an après celui de James Harden pour Philadelphie, valide l'échec d'une "superteam" qui devait marcher sur la ligue. Ne reste que Kevin Durant, calibre MVP en première partie de saison avant de se blesser. "KD" va désormais vivre une situation inédite : il est le seul capitaine à bord de ces Nets, lui qui a toujours évolué avec une ou plusieurs stars à ses côtés. Mais l'horizon sportif assombri pourrait l'inciter à réitérer sa demande de transfert effectuée l'été dernier.

Depuis, Brooklyn avait relevé la tête, avant de se replacer comme un sérieux prétendant avec une série de 18 victoires en 20 matches pour terminer 2022. Cela suffira-t-il pour convaincre l'ailier de laisser sa chance à ce groupe ? Rien n'est moins sûr. Ses courtisans, eux, ne manqueraient pas de se précipiter sur l'affaire. Au moins celle-ci pourrait rapporter gros aux Nets, alors que Durant, encore exceptionnel à 34 ans est sous contrat jusqu'en 2026.