Jeux Olympiques de Milan-Cortina 2026 - Biathlon - Quentin Fillon Maillet "est dans ses standards des Jeux de Pékin 2022, même un cran au-dessus”
Mattéo Correia, champion de France espoir de mass-start en ski de fond, est devenu le partenaire d'entraînement de Quentin Fillon Maillet depuis deux saisons. Le fondeur et le biathlète se lancent cette saison à l'assaut des JO de Milan-Cortina 2026. Entre les sorties ski-roues, vélo, et même barbecues, le Vosgien nous raconte sa préparation avec celui qu'il considère comme un "grand frère."
Quentin Fillon Maillet
Crédit: Getty Images
Dix ans d’écart. Un biathlète, un fondeur. Un Jurassien, un Vosgien. Rien ne semblait unir Quentin Fillon Maillet, 33 ans, et Mattéo Correia, encore espoir l'an dernier. Pourtant, le monde du ski est un univers tout petit où les destins se croisent si facilement, en l'occurrence grâce à leur entraîneur, Nicolas Chouard. Depuis deux ans, ils s'entraînent ensemble durant la majorité de l’intersaison. Cet été 2025 a été particulièrement studieux pour préparer un hiver qui sera crucial, avec, en point de mire, les Jeux olympiques de Milan-Cortina.
Dans la douceur pyrénéenne de septembre, à Font-Romeu, Mattéo Correia nous a décrit celui qu’il voit désormais comme un "grand frère." Il raconte la préparation effectuée autour d’innombrables heures de sport mais aussi parsemée de moments plus légers… entre débats musicaux et baignades à Gérardmer.
Comment s'est déroulée votre préparation avec Quentin Fillon Maillet ?
Mattéo Correia : On a attaqué l'entraînement début mai. On a commencé avec de bonnes périodes de foncier où on a fait beaucoup de vélos de route. Et après, on a attaqué quand même assez rapidement sur les ski à roulettes pour le travail spécifique avec les intensités. Vu que j'ai emménagé dans le Jura désormais (il est originaire des Vosges, NDLR), c'est vrai que je peux profiter d'avoir Quentin qui habite à proximité. On essaye souvent de faire des semaines ensemble. Ça nous permet vraiment de nous tirer vers le haut, que ce soit sur les séances de vélo, de course à pied ou de ski-roues. On ne fait pas exactement le même sport : en ski nordique, je n'ai pas toute cette partie de tir. Par contre, j'ai deux types de ski : le classique et le skating. Donc quand il tire, je préfère travailler le classique. Ça fait au moins deux bonnes années qu'on est tout le temps ensemble sur les entraînements. Ça permet d'avoir une bonne émulation et vraiment de se tirer la bourre.
Comment s’est fait le rapprochement pour s’entraîner ensemble ?
M.C : On a un coach en commun, Nicolas Chouard, qui est devenu mon coach principal depuis deux ans. Il connaît super bien Quentin : ça fait depuis petit qu'il le suit. Le lien s'est fait tout naturellement. Le feeling est vraiment passé tout de suite entre nous. Je dirais que, sur la première année, on était plus dans une relation de partenaires d'entraînement. Depuis cette année, ça va un peu plus loin. On est quand même beaucoup plus proches. Je le vois comme un grand frère. Il m'apporte plein de choses, que ça soit sur l'entraînement, la récupération, l’optimisation de la performance. Il a beaucoup d'années d'expérience. Je suis plutôt sur le début de ma carrière et lui, il est plus sur la fin. Nos chemins se croisent, donc ça s'est fait assez naturellement. Je pense aussi qu'il a vu que ça pouvait le tirer vers le haut, notamment sur les séances d'intensité où j'essaye de le battre, même si ce n'est pas facile. Il en manque encore un petit peu.
/origin-imgresizer.eurosport.com/2022/02/20/3324542-67971108-2560-1440.jpg)
Magistral Quentin Fillon Maillet à Pékin : ses 5 médailles olympiques
Video credit: Eurosport
Vous rentrez dans une saison olympique. C'est une grande année pour lui en termes d'objectifs. Est-ce que vous en parlez ? À quel point vous le sentez prêt et déjà projeté sur les JO ?
M.C : C'est clair que pour nous deux, c'est une année assez cruciale. Après, on n'a pas les mêmes objectifs sur la saison. Pour ma part, si j'ai l'opportunité de participer aux JO, ce serait déjà un rêve. Ma saison serait pleinement réussie. Mais c'est sûr que lui, il n'est pas dans l'objectif d'y participer. Non, lui, c'est vraiment un objectif de performance, sachant que potentiellement, il ne lui reste pas beaucoup de JO à vivre, à part peut-être ceux en France s'il pousse jusqu'en 2030. Il a l'ambition de faire mieux que les derniers JO en 2022. C’est une ambition très élevée, sachant que faire mieux, c'est possible, mais c'est extrêmement difficile. Surtout dans le sport de haut niveau, où chaque détail compte, et surtout en biathlon, avec cette partie de tir qui est extrêmement compliquée. Il faut être super précis là-dessus. J'ai senti qu'il avait passé un gros cap dès la reprise en début d’été. Je pense qu'il a augmenté son niveau d'un bon curseur : que ce soit sur la motivation, les entraînements, même l'intensité. Il a de grandes ambitions pour cet hiver. Sa prépa est largement à la hauteur de ses ambitions.
Vous voyez une réelle différence entre l'an dernier et cette année en termes de niveau ?
M.C : Son objectif était de retrouver ses standards de 2022 à Pékin. Je pense qu'il est largement dedans, même encore un cran au-dessus. De toute façon, au niveau de l'entraînement, sur l'intensité, tous les voyants sont au vert. Il est en forme. Après, ce qu'il fallait régler à tout prix sur cette prépa, c'était de passer ce tir couché sans encombre et d'aller chercher des tirs propres. Aujourd'hui, si tu ne vas pas chercher des tirs parfaits, c'est compliqué d'aller chercher une médaille aux Jeux.
/origin-imgresizer.eurosport.com/2025/09/19/image-3ae84f99-cbe1-4c51-bbc3-00a42dd771cb-85-2560-1440.jpeg)
Quentin Fillon Maillet et sa médaille d'or olympique de l'individuel à Pékin en 2022
Crédit: Getty Images
En dehors du ski-roue, quelle était votre pratique principale entre le vélo et la course à pied ?
M.C : On avait beaucoup d'entraînements en vélo. C'est sûr que ce n'est pas le dernier pour aller se tirer la bourre (rires). Il adore accélérer pour les segments Strava et les pancartes (panneaux d’entrée d’agglomération, une tradition en cyclisme NDLR).
Et alors, qui les passait en tête ces pancartes ?
M.C : En sprint, je pense que j'ai un petit avantage sur la filière courte. Par contre, sur de plus longues distances, c'est plus dur pour moi. D’ailleurs, on a fait une semaine de prépa à Gérardmer, chez mes parents dans les Vosges. Il n'était jamais venu et ne connaissait pas. Il voulait changer de lieu d'entraînement. C'est pas très loin du Jura et cette semaine-là, il faisait plutôt beau : on a fait du vélo, de la course à pied et de la muscu. Le dernier jour, on a fait une grosse sortie à vélo. On est parti de Gérardmer et on est allé jusqu'à la Planche des Belles Filles en empruntant le parcours classique du Tour de France, et sur la Planche, il m'a lâché. J’étais cuit, il m'a bien déposé.
Cette semaine qu’il a passée au sein de votre famille dans les Vosges, quel souvenir en gardez-vous ?
M.C : C'était vraiment super cool de partager une expérience comme ça. Il faisait beau, on était souvent dehors, on a pu faire des activités autres que du sport : on en a bien profité pour rigoler un peu et se marrer avec des bons barbecues le soir. C'était sympa ! On a globalement bien rechargé les batteries avant que lui et moi ne partions en stage avec nos équipes respectives. Il y a un lac à Gérardmer, on est allé se baigner quelques fois. Lui, c'est vrai que c'est un adepte des sports nautiques, notamment le kayak. Il en intègre dans sa préparation tous les ans, il essaie d'en faire un peu toutes les semaines. Moi, je suis moins un adepte, j'en fais un petit peu mais pas autant que lui. Je préfère sortir le vélo en attendant. C'est vrai qu'il aime bien varier les activités, quand il y a des lacs à proximité et du beau temps, c'est plutôt cool.
Pendant les entraînements, ça vous arrive de discuter d'autre chose que du sport ?
M.C : Ça reste axé sport, même si ça dévie sur autre chose. C'est un passionné de sport et moi aussi. On ne parle pas forcément que de ski ou de biathlon. On parle beaucoup de foot. On parle aussi d'autres sports, comme la Formule 1. Le vélo aussi ! On est quand même des grands amateurs. On aime bien débriefer les courses pendant les séances.
Si vous deviez donner le plus grand atout de Quentin, ça serait lequel ?
M.C : Il en a plusieurs. Je pense que son atout numéro un, c'est sa persévérance. C'est quelqu'un qui ne lâche rien et qui a vraiment une rigueur irréprochable. C'est sûr que si on parle du ski, techniquement ça reste un exemple, même si chacun a sa propre façon de skier. Il a vraiment une belle technique et ça lui permet d'être très costaud.
Sur la persévérance, est-ce que c'est déjà arrivé que vous en aviez marre, mais que lui voulait à tout prix continuer une sortie ou un entraînement ?
M.C : C'est même arrivé plusieurs fois : on part en séance, il pleut des sauts d'eau, il pleut vraiment des cordes ! Je lui dis : "c'est bon, on rentre, on est trempé, j'en ai assez. On a déjà deux heures et demie." Et lui me répond : "Ah non, on fait trois heures ce matin. Il y a trois heures à faire, on fait trois heures ! Qu'il pleuve ou qu'il ne pleuve pas, ça ne change rien." Je vous avoue, la dernière demi-heure, j'ai un peu râlé. J'en avais ras la casquette ! Après, tu sais que tu ne les fais pas pour rien. Ce sont tous ces efforts qui, petit à petit, payent pendant l'hiver. Il a raison, pour avoir un niveau comme le sien, il faut avoir une certaine rigueur et être constant sur l'entraînement. Qu'il pleuve ou qu'il ne pleuve pas, ça ne change rien.
Vous avez 10 ans d'écart, ce qui est quand même important, est-ce que vous le ressentez entre vous ?
M.C : Franchement, la différence d'âge, je ne l'ai pas trop sentie à part sur l'entraînement et les intensités la première année. À partir de cette année, j'ai passé un cap. Nos niveaux commencent à se rapprocher petit à petit, même s'il a encore une petite longueur d'avance sur moi. J'espère que je le battrai avant qu'il n’arrête, ce serait bien pour ma fierté ! De son côté, à partir du moment où tu passes les 30 ans, je pense que tu as quand même un certain recul par rapport à ce que tu as fait et tu arrives à te détacher des choses. Tandis que moi, j’avance un peu tête baissée, j'ai 23 ans. Là-dessus, il m'apporte beaucoup.
Même au niveau des styles musicaux, il n’y a pas trop de différences ?
M.C : Ah là-dessus, il y a un bon petit décalage générationnel ! Ça, c'est clair qu'on n'est pas du tout dans le même "mood". Moi, je suis plutôt dans des trucs de jeunes, du rap. Lui pas trop, ce n'est pas trop son truc. Là-dessus, on est complètement opposés. On a déjà beaucoup roulé en voiture ensemble et comme un ancien, il aime bien écouter la radio dans la voiture. C'est vrai que ça me fait un peu rire. Mais peut-être que je ne dirai pas ça dans dix ans !
Sur le même sujet
Publicité
Publicité
/origin-imgresizer.eurosport.com/2025/09/25/image-da1848c4-7362-47f9-a961-e4d6d33386c4-68-310-310.jpeg)