Gadret, encore un effort

Si le Tour d'Italie s'arrêtait ce samedi soir, John Gadret serait le plus heureux des hommes. "Je vis un Giro de rêve", a-t-il encore répété à Sestriere. Installé au pied du podium avec une victoire d'étape en poche, l'ancien cyclocrossman est en passe de signer la plus grosse performance de sa carrière. Il ne lui reste plus qu'un effort à fournir pour rester sur ces hauteurs où lui-même n'espérait pas se situer voilà trios semaines. Problème, cet effort-là est aussi le plus pénible pour le petit grimpeur de poche de l'équipe AG2R La Mondiale. Dimanche, il devra se coltiner un exercice qu'il déteste, un contre-la-montre, ultime rendez-vous de ce Giro.

Désormais, Gadret regarde dans son rétro. Voilà plusieurs jours que le podium final ne fait guère plus de doutes. Alberto Contador, Michele Scarponi et Vincenzo Nibali sont hors de portée. Pour tous les autres, il s'agit donc d'obtenir la meilleure place possible dans le Top 10. Cette place, la 4e donc, c'est pour l'instant Gadret qui y est accroché. Samedi, entre verre à moitié vide et verre à moitié plein, il a pris du temps à certains de ses adversaires directs et en a perdu sur d'autres. Mais globalement, il n'a pas fait une mauvaise affaire. Avant le chrono milanais, ils sont cinq à se tenir en trois minutes, Gadret menant ce mini-peloton.

Samedi, il a encore terminé une étape de haute montagne en haut de l'affiche, en prenant la 5e place à Sestrière. Jose Rujano et Joaquim Rodriguez lui ont repris plus d'une minute et le suivent à présent au général. Mais le Vénézuélien est encore à plus de deux minutes trente du Nordiste d'adoption et il n'est pas un bon rouleur. Rodriguez non plus, mais il est un peu plus menaçant pour Gadret puisqu'il pointe à 1'38". "C'est pour ça que j'ai attaqué dans le final, a-t-il expliqué. J'ai essayé de perdre le moins de temps possible sur Rodriguez. Je ne cherchais pas à prendre du temps à Scarponi ou Nibali. Je ne pensais pas au podium, juste à préserver ma quatrième place.J'ai tiré mes dernières cartouches."

La bonne nouvelle pour Gadret, c'est qu'il a réussi à prendre du temps aux rouleurs. Konstantin Siutsou, 5e du général samedi matin, a disparu de la circulation. Restent Roman Kreuziger et Denis Menchov. Respectivement 7e et 8e au classement, le Tchèque et le Russe accusent 2'49" et 3'02" de handicap sur le Français, à qui ils vont sans aucun doute reprendre du temps dimanche. Combien Gadret perdra-t-il par rapport à eux sur les 26 kilomètres du tracé lombard? Tout l'enjeu est là. Le Français continue pourtant de se méfier surtout de Rodriguez. "Le chrono (NDLR: qui a été réduit de 5 kilomètres, une bonne nouvelle pour lui), c'est un peu mon point faible, admet-il. Je vais donner tout ce que j'ai. Avec Rodriguez, on est à peu près du même niveau. J'espère qu'il ne me reprendra pas." Il ne lui reste plus qu'un tout petit effort à faire. Même si c'est celui qu'il aime le moins, le jeu en vaut la chandelle: la France n'a plus placé un coureur dans le Top 5 d'un grand tour depuis 11 ans.